lundi 4 septembre 2017

Saint Pie X était-il un Libéral ?
Mais pourquoi donc les Modernistes (Pape compris)
se l'approprient-ils ?



Écrit par Chris Jackson
Contributeur à The Remnant
Le 3 septembre 2017
SOURCE : The Remnant

Aujourd'hui c’est la fête Traditionnelle de Saint Pie X. C'est évidemment un jour de prière et de souvenir de ce grand saint. Cependant, c'est aussi un jour où nous devrions peut-être nous poser quelques questions sur la raison de l'étrange éloge Moderniste que certains prélats, y compris le Pape, lui donnent.

Le 21 août, en la fête de Saint Pie X dans le nouveau calendrier, le Pape François a froncé les sourcils en assistant à une Messe en l'honneur de Saint Pie X et a exprimé de l'admiration pour lui. Comme le site Vatican Insider l’a rapporté :

« Je suis un dévot de Saint Pie X ... » C'est ainsi que François a expliqué sa présence parmi les fidèles à Mgr. Lucio Bonora dans la chapelle dédiée à Saint Pie X. La chapelle, située dans la Basilique Saint-Pierre, abrite les reliques du feu Pape Vénitien. Lucio Bonora est un prélat de Trévise dans le nord de l'Italie qui travaille au Secrétariat d'État et qui est un érudit de Saint Pie X. Le vendredi 21 août, le jour où l'église commémore Saint Pie X, François a célébré une messe privée le matin et est allé à la Basilique pour prier au tombeau de son prédécesseur. À 7 h, alors qu'il était agenouillé à l'autel, le Père Bonora a commencé sa propre célébration de la Messe. Quand il est entré dans la chapelle, il a vu environ 50 fidèles et voici que le Pape était là aussi. Selon le site de l'hebdomadaire diocésain La Vita del Popolo de Trévise, François a décidé de rester pour la célébration de la Messe. Il s'est levé du banc pour échanger des souhaits de paix et s'est mis en ligne pour recevoir la Communion, suivi d'un moment de culte où François a rendu grâces à genoux ... »

Beaucoup de Catholiques Traditionnels se demandent, et se demandent toujours, comment un Pape très Libéral comme François pourrait être un dévot de Saint Pie X. La plupart se sont secoués la tête et ont mis cette situation sur le compte de la nature apparemment erratique et contradictoire de beaucoup d’autres actions du Pape. Mais existe-t-il une méthode pour comprendre cette folie ?

La clé est de reconnaître la différence dans la façon dont les Traditionalistes voient Saint Pie X et comment les Libéraux voient Saint Pie X. Les Traditionalistes voient l'homme qui a dirigé courageusement une croisade contre le fléau du Modernisme dans l'Église et qui a sanctionné le clergé qui répandait cette erreur tout en défendant la Vérité Catholique. Les Libéraux, en revanche, rejettent les actions de Saint Pie X contre le Modernisme, ils les limitées à son temps et à son contexte historique ; ils se concentrent plutôt sur l'amour de la pauvreté par Saint Pie X et ses réformes de la liturgie et de la Curie. Mais surtout, les Libéraux aiment citer son assouplissement concernant les règles de réception Eucharistique afin de permettre aux fidèles de la recevoir quotidiennement et d'ouvrir la réception de la Communion aux enfants à plus jeune âge.

Maintenant, on peut en être certains, tous ces actes et ces aspects de Saint Pie X que les Libéraux soulignent étaient bons en eux-mêmes. Le danger réside dans la manière insinuante que la gauche répète ces événements, en essayant de s’approprier l'héritage de Saint Pie X pour soutenir leur propre agenda. La première chose qu'ils font est de confondre, peut-être délibérément, les actes doctrinaux irréformables de Pie X avec les actes pastoraux et prudentiels variables de Pie X.

Les écrits de Pie X condamnant le Modernisme ne se limitaient pas seulement à son temps, mais sont pour tous les temps. Le Modernisme était erroné alors et il est erroné maintenant précisément parce qu'il s'agit d'une attaque contre la nature même de l'Église et de la nature immuable du Dogme.

D'autre part, les changements disciplinaires que Pie X a faits, tels que permettre une réception plus fréquente de la Sainte Communion, étaient variables et ont été provoqués par les moments du temps où il vivait. Sans doute, Pie X croyait que la sainte révérence et le respect de l'Eucharistie étaient en tant que tel un point fort de l'Église et qu'il n'y aurait aucun danger pour les fidèles de considérer la Communion fréquente de manière désinvolte. Au lieu de cela, Pie X a cru que, dans ce contexte, l'expansion des opportunités de la Sainte Communion ne pouvait que renforcer la sainteté et la dévotion chez les fidèles. C'était un jugement prudentiel et sage pour les temps où Pie X vivait.

En revanche, il est intéressant de penser ce que Pie X ferait de nos jours. Aujourd'hui, presque personne ne va se confesser, mais les lignes de Communion sont pleines. En outre, le Corps du Christ est souvent traité avec pas plus de révérence que des croustilles qui sont distribuées par des laïques aux mains d'autres laïcs debout. Dans ce contexte, il n'est pas déraisonnable de croire que Pie X récuserait immédiatement sa permission de recevoir fréquemment la Communion jusqu'à ce que cette attitude tragique de la part des laïcs soit corrigée.

En plus de l'Eucharistie, les Libéraux se concentrent sur la pauvreté et l'amour des pauvres de Pie X. C'est vrai que Pie X possédait ces qualités. Pourtant, il existe des différences clés dans la façon dont Saint Pie X a abordé ces questions et comment les Libéraux abordent ces problèmes. D'une part, l'accent mis dans le pontificat de Pie X était la défense de l'orthodoxie. D’être généreux envers les pauvres ne signifie rien si les pauvres et le reste de l'Église sont infectés par une erreur qui destruit des âmes. En outre, bien que Saint Pie X ait grandi dans la pauvreté et ait détesté la papauté ostentatoire, il l'a endurée par respect pour la fonction papale. Tous ses actes d'humilité et de pauvreté se firent en privé. Nous n'en connaissons que par des écrits ultérieurs de témoins. Il n'a pas fait de spectacles publics pour répudier et pour condamner la gloire que tous les Catholiques voulaient accorder au Vicaire de Christ, ce qui aurait fait en sorte que tous ses prédécesseurs auraient semblé avoir été fiers et vains. (Pour plus d'informations sur la vraie pauvreté et l' humilité de Saint Pie X, consultez l'article Remnant « Le faux Dieu de la pauvreté »)

Le processus de s’approprier et de fausser l'héritage de Saint Pie X peut être vu le plus clairement dans une entrevue du 13 juin, 2014 avec le Père Bernard Ardura chez ZENIT, le Président du Comité Pontifical des Sciences Historiques. L’année 2014 a été le 100 e anniversaire de la mort de Saint Pie X et le Comité a organisé une journée d'étude intitulée « Saint Pie X : Un Pape réformateur face aux défis du nouveau siècle ». Dans l'interview Père Ardura a déclaré ce qui suit :

« Pendant son pontificat, il était un réformateur très important, mais entre ses activités de réforme, il devait intervenir sur des questions liées à la Doctrine, car il était confronté à un mouvement difficile, appelé le Modernisme. Et sa condamnation du Modernisme a obscurci les parties positives de son ministère. On s’est souvenu de lui comme un Pape de la condamnation, mais il était plutôt un grand réformateur, un grand innovateur. Oui, il a condamné le Modernisme, mais il était en fait très Moderne, ce qui est évident grâce à ses réformes ».

La condamnation du Modernisme par Saint Pie X a « obscurci » les parties « positives » de son ministère ? Est-ce que cela signifie que la lutte de Saint Pie X contre le Modernisme était une partie « négative » de son ministère ? « Un Pape de la condamnation » ? Depuis l'avènement du Vatican II, est-ce que la notion même de condamner n'importe quoi, quelle que soit la dangerosité pour les âmes, est considérée comme une mauvaise chose ? Pourtant, regardez ce sur quoi le Père Ardura se concentre comme « positif ». Il appelle Saint Pie X un « grand réformateur, un grand innovateur » « très Moderne ». Si l'on écoute le Père Ardura on pourrait penser que Saint Pie X a été le précurseur au début 20 e siècle de Hans Kung. Lorsque vous voyez des prélats Libéraux qui louent Saint Pie X, rappelez-vous ces paroles du Père Ardura. Car cette caricature inventée est ce en quoi ils ont transformé le grand Pape. Le Père Ardura continue :

« Il était plus conscient que d'autres prédécesseurs papaux que l'état du pontificat devait avancer et ne pouvait pas reculer, seulement en avant ... Une autre contribution clé a été liée à la réception des Sacrements, en particulier de la Communion. Il a avancé l'idée que les jeunes, à l'âge de sept ans, pouvaient recevoir leur première Communion, même s'ils ne connaissaient pas complètement la Doctrine de l'Église à ce moment-là. De plus, il a avancé l'idée que les adultes puissent fréquenter la Communion plus souvent. Auparavant, il y avait cette idée qu’il fallait aller se confesser avant d'aller à la Communion. Bien qu'il préconise de se confesser régulièrement, il a avancé l'idée d'aller souvent à la Communion, même en encourageant les Chrétiens à y aller tous les jours ».

« Auparavant, il y avait cette idée qu’il fallait aller se confesser avant d'aller à la Communion » ? Quelle chose terriblement étrange à dire pour le Président du Comité Pontifical. Est-ce que le Père Ardura dit que Saint Pie X a estimé que ce ne serait plus le cas ? Que, tant que les Catholiques allaient se confesser « régulièrement », ils n'avaient pas à faire en sorte que tous les péchés mortels aient été confessés chaque fois qu'ils ont reçu la Sainte Communion ? Évidemment, Saint Pie X ne pensait pas cela. Et le Père Ardura est chargé d'étudier l'héritage de ce grand Pape canonisé ? Que Dieu nous aide. Pourtant, le Père Ardura a gardé le « meilleur » pour la fin en essayant de définir le Modernisme chez ZENIT ...

« C'est une erreur, une erreur philosophique, qui relativise un peu de tout, et d'un point de vue doctrinal, c'est quelque chose de délicat. Par exemple, différentes idées ont été promulguées dans le contexte particulier, culturel de l'époque. Mais aujourd'hui, nous n'avons pas à relativiser ces différents points de vue sur la Doctrine. Pie X, on peut dire, travaillait dans un contexte particulier ».

L'Église dans laquelle nous croyons, s'inspire du Saint-Esprit dans un contexte qui n'existe pas par une cause accidentelle, mais qui contient la substance des enseignements inspirés par le Saint-Esprit et, par conséquent, nous n'avons pas à relativiser ces réalités qui sont fondamentales car sinon, nous devrions mettre en discussion tout ce que nous croyons.

Et là vous l'avez. Le Modernisme, appelé « la synthèse de toutes les hérésies » par Saint Pie X est maintenant « quelque chose de délicat ? » Apparemment, Pie X n'était pas d'accord. Car il a été signalé comment il a répondu lorsqu'il était invité à mettre la pédale douce envers les Modernistes :

« La gentillesse est pour les imbéciles. Ils veulent qu'ils soient traités avec de l'huile, du savon et des caresses, mais ils doivent être battus avec les poings ! Dans un duel, vous ne comptez pas ou ne mesurez pas les coups, vous frappez comme vous le pouvez. La guerre n'est pas faite avec charité, c'est une lutte, un duel. Si notre Seigneur n'avait pas été terrible, il n'aurait pas non plus donné l'exemple. Voyez comment il a traité les Philistins, les semeurs de l'erreur, les loups en vêtements de moutons, les traîtres dans le Temple. Il les a flagellés avec des fouets ! »

À peine une approche « délicate ». Ensuite, le Père Ardura déclare que « Pie X, on peut dire, a travaillé dans un contexte particulier ». Mais, dans quel contexte possible Pie X aurait-il pu travailler qui changerait un iota de ses condamnations doctrinales claires et répétées du Modernisme ? Quant au contexte, ces décrets ont été publiés dans des changements qui ne concernent en rien leur contenu. L'auteur du terme Modernisme dans l’Encyclopédie Catholique avait même ceci à dire au sujet de la nature des condamnations prononcées par Pie X :

« Dans le présent avis de l'auteur, depuis la nouvelle confirmation accordée à ces décrets [Pacendi et Lamentabili] par le Motu proprio, ils contiennent dans leurs conclusions doctrinales l'enseignement infaillible du Vicaire de Jésus-Christ.

Alors, pourquoi tout l'éloge et la réécriture soudains de l'héritage de Saint Pie X par les clercs Libéraux, vous demandez-vous ? La réponse peut avoir quelque chose à voir avec le prochain Synode sur la Famille. Nous savons que la gauche est désespérée de trouver un soutien théologique pour permettre aux divorcés/remariés de recevoir la Communion. Si elle est capable de transformer l'héritage de Saint Pie X comme étant l'une des « réformes Modernes » en particulier en ce qui concerne l'accueil de la Sainte Communion, elle pourra expliquer sa position comme simplement un avancement et une extension logique de la politique Eucharistique « libéralisatrice ».

Il suffit de considérer certaines des citations présentées ci-dessus dans le contexte de permettre aux divorcés/ remariés de recevoir la Communion (mon soulignement) :

  • « On s’est souvenu de lui comme un Pape de la condamnation, mais il était plutôt un grand réformateur, un grand innovateur. Oui, il a condamné le Modernisme, mais il était en fait très Moderne, ce qui est évident grâce à ses réformes

  • « Il était plus conscient que d'autres prédécesseurs papaux que l'état du pontificat devait avancer et ne pouvait pas reculer, seulement en avant ... ».

  • « Une autre contribution clé a été liée à la réception des Sacrements, en particulier de la Communion..., il a avancé l'idée que les adultes puissent fréquenter la Communion plu souvent. Auparavant, il y avait cette idée qu’il fallait aller se confesser avant d'aller à la Communion... »

De plus, nous rappelons que dans Evangelii Gaudium François a déclaré que l'Eucharistie « n’est pas un prix destiné aux parfaits, mais un généreux remède et un aliment pour les faibles . Ces condamnations ont des conséquences pastorales que nous sommes appelés à considérer avec prudence et audace ». Ces paroles de François génèrent la ligne suivante dans le dernier paragraphe de l'article du Vatican Insider d'autant plus intéressant. Il [ Saint Pie X] n’a pas présenté l'Eucharistie comme un prix pour ceux qui sont déjà parfaits mais comme un soutien quotidien pour que les gens se rapprochent de Dieu ».

Comme le dit le Pape François, il est un « dévot de Saint Pie X ». La question que nous devrions poser est de quel Saint Pie X parle-t-il ? Le vrai Saint Pie X qui défendait la Doctrine immuable ? Ou le « Pie X » Moderne, innovant et réformateur, de fiction, innovant et réformateur du Père Ardura ?

Le vrai Saint Pie X

Enfin, de peur que je ne sois pas accusé de déprimer mes lecteurs lors d'une journée de fête si glorieuse, je voudrais terminer par les paroles de l'Éminence Cardinal Mercier concernant Saint Pie X dans sa lettre pastorale du Carême en date du 2 février 1915 :

La bonté charmeuse du Saint-Père n'était aucunement une douce sentimentalité des faibles. Pie X était fort. On rapporte qu'il a été l'écrivain d'une courte prière que les prêtres ont à dire à certains moments pour leur Évêque. Elle s’énonce comme suit :

« Stet et pascat in fortitudine tua, Domine, in sublimit ate nominis tui » ( Fort dans Ta Force, 0 Seigneur, laissez-le se tenir debout et nourrir le troupeau dans la sublimité de Ton Nom).

Et ceci, à moins que je ne me trompe, est la note caractéristique de ce Pape du passé — une combinaison merveilleuse de tendresse paternelle avec une force de caractère qui l'a fait maître de lui-même et qui a transmis à son âme la fermeté de l'équilibre, remplissant son expression de ce mélange de gravité, de sérénité, de condescendance et presque d’allégresse, ce qui attirait tellement tout le monde par son charme.

Le public le regardait avec émerveillement, parfois avec anxiété, et admirait le viril pontife dans sa lutte corps-à-corps contre le Modernisme.

Aux jours de Luther et de Calvin, si l'Église avait eu un Pape du tempérament de Pie X, le Protestantisme aurait-il réussi à libérer un tiers de l'Europe de Rome ?

Pie X était un homme de perspicacité et de décision. Il ne se laisserait pas séduire par les cajoleries des réformateurs, ingénieusement ambitieux d'infuser les veines de l'Église avec du sang neuf et de la Moderniser pour s'adapter aux fantaisies et aux erreurs du Protestantisme et du Rationalisme mis à jour. Fidèle à la Tradition Catholique, il a porté le blason de l'axiome qu'au Vème siècle, Saint Vincent de Lérins, lui-même disciple d'un Évêque martyr du troisième siècle, Saint Cyprien qui a employé contre ceux qui favorisaient un progrès doctrinal le fait que la conscience du Chrétien aurait ressenti ne pas être en amélioration, mais en révolution dans laquelle tous les trésors du passé auraient disparu : Nihil innovetur nisi quod Traditum est ( Pas d'innovations : cramponnez-vous à la Tradition ).

Son plan, une fois établi, le Pape poursuivit, dans son ensemble et en détail, dans le domaine de la Doctrine et de la discipline, dans des travaux scientifiques, dans la presse, dans la littérature, dans l'enseignement des séminaires et des universités et même auprès des personnes qu'il aimait le plus ; il a poursuivi sa pleine réalisation, dis-je, avec une énergie et une persévérance parfois déconcertantes.

Lorsque nous examinons avec recul cette ligne d'action composée de plusieurs facettes pourtant large et pénétrante, nous sommes unanimes à admirer la force de notre grand Pape et à remercier la Providence de sauver le Christianisme d'un immense péril, non seulement d'une seule hérésie, mais de toutes les hérésies combinées, amalgamées ensemble dans une manière plus ou moins perfide. » ( Lettre et mandement de Pastorale de 1915 Carême )


Petite réflexion du traducteur : est-ce que le désir du Vatican de réintégrer dans ses rangs la FSSPX ne serait pas un intérêt immédiat pour que le Chef de l'Église manifeste une dévotion au Patron de la Fraternité ?

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