Par : Edward Pentin
Le 7 avril 2017
SOURCE : National Catholic Register
L'Archevêque Orthodoxe Syriaque de Mossoul, dont le troupeau est parmi les dernières personnes qui parlent l'Araméen, la langue de Jésus, critique l'Occident pour placer les droits des animaux devant le bien-être et la survie des Chrétiens.
La sécurité et l'état de droit est ce que la plupart des Chrétiens ont besoin en Irak, mais il semble que personne ne veut les leur offrir, dit le Métropolite Nicodemus Dauod Matti Sharaf, l'Archevêque Orthodoxe Syriaque de Mossoul.
Conférant avec le National Catholic Register la semaine dernière à Erbil, le Métropolie Nicodemus, qui a été le dernier Évêque à quitter Mossoul quand ISIS a envahi la ville en 2014, a eu des paroles fortes envers l'Occident : il a dit, en citant un exemple, que les pays développés favorisent le bien-être des grenouilles avant celui des Chrétiens, que l'Occident a besoin de se réveiller à la menace de l'Islam et a blâmé les anciens dirigeants Américains et leurs alliés d’avoir ruiné son pays. Il aime le président Trump, en disant : « Essayons celui qui est fou parce que nous avons essayé les dirigeants normaux et ils ont détruit nos vies ». Edward Pentin |
Métropolite Nicodemus, qu'est-ce que vous pensez de vous avoir fait refuser un visa en Grande-Bretagne ?
Quelqu'un de la chaîne de télévision RT [ Russia Tuday ] m'a appelé de l'Angleterre et a demandé pourquoi je ne pouvais pas obtenir un visa. Je lui ai dit : « Parce que je ne suis pas avec ISIS ». Le gouvernement Britannique donne des visas à ceux qui soutiennent ISIS. Je ne supporte pas ISIS. Ils ont refusé trois Archevêques. Ils ont dit que nous aurions demandé à être considérés comme réfugiés en Angleterre. Et pourtant, j'ai déjà eu une résidence permanente en Australie et des visas dans tout le monde sauf en Angleterre. En Amérique, j’y ai été cinq ans, en Russie, en Inde, tous ces endroits, mais ils ne nous acceptent pas.
Est-ce que l’Angleterre est très naïve ?
Oui peut-être cela, ou peut-être parce que ceux qui travaillent à l'ambassade sont pour la plupart des Musulmans. Le maire de Londres est Musulman.
Quel est votre point de vue sur la situation actuelle ici en tant que chef d’une Église Orthodoxe ?
Quand tout le monde me pose cette question, je réponds en tant que Chrétien, non pas comme un Orthodoxe, parce que quand ISIS est venu, ils ne font aucune distinction entre Catholiques, Orthodoxes ou Protestants. Ils nous identifient avec la lettre N, pour Nazaréens. Ils l’inscrivent sur nos maisons, sur les églises. Donc, nous devrions parler de Chrétiens et ne pas parler de Catholiques ni d’Orthodoxes.
Quelle est votre opinion personnelle sur la situation actuelle ?
La situation est comme vous la voyez : c’est si mauvais et nous ne pouvons accepter ni faire confiance à personne autour de nous. Maintenant, tous les gens parlent de retourner dans nos villages, en particulier dans la Plaine de Ninive et à Mossoul, mais je n'accepte pas cette idée. Nous ne pouvons pas revenir en arrière sans sécurité afin de reconstruire nos maisons, nos églises et nos villages sans véritable sécurité, juste sur des garanties verbales. Les garanties ne peuvent pas venir des gouvernements Irakien ou du KRG (Kurdistan), mais de la communauté internationale et de l'ONU. Si nous ne recevons pas ces garanties, ce serait très stupide de revenir dans cette situation parce que tout le monde qui nous a poussé à quitter ces villages est toujours là. Les villageois arabes qui soutiennent ISIS sont toujours là... ceux qui voulaient prendre nos terres, nos villages. C’est toujours la même chose, il n'y a toujours pas de gouvernement fort à Bagdad. Vous ne pouvez pas faire ce que vous voulez — les parties qui contrôlent ce pays sont encore les mêmes, rien de nouveau.
Qu’y a-t-il à faire plus précisément ?
Deux choses : d'une part, changer le gouvernement de Bagdad, pas le personnel, mais la façon du gouverner, pour en faire un gouvernement fort, pour qu'il y ait un état de droit. Depuis 2003 jusqu'à aujourd'hui, nous avons vécu sans état de droit. N’importe qui peut faire ce qu’il veut. Aucun pays au monde ne peut vivre dans la stabilité et la paix sans loi. Par exemple, en Angleterre ou à tout autre endroit dans le monde, disons qu’il n'y a pas d’état de droit, qu’est-ce qui sera fait ?
En second lieu, il doit y avoir des garanties de l'ONU, au moins de prendre des décisions politiques, de déclarer que les villages de la Plaine de Ninive sont des zones sécuritaires, protégées par le pouvoir international. Quand j'ai rencontré le Consul Américain, je lui ai dit que nous avions besoin de garanties internationales, de protection, de quiconque pour nous protéger. Sinon, nous aurions la visite d’un autre ISIS après quelques mois, et une autre visite ensuite sous un nouveau nom.
Qu'est-ce qu'il a dit ?
Il a dit que c’était difficile de mettre des soldats à cet endroit. Je lui ai dit que nous n’avions pas besoin de soldats, que nous avions besoin du même plan aérien de protection qui a obligé ISIS à cesser de venir à Erbil en pleine nuit [2014]. Nous voulons le même plan aérien de protection pour les arrêter de venir dans nos villages à nouveau. Il a dit qu'ils étaient prêts mais qu’il ne donnait aucune garantie. Nous avons besoin de papiers signés et pas seulement de paroles. Sans cela, nous ne pouvons pas reconstruire nos villes.
Ce serait stupide de revenir à la situation antérieure parce que, quand ISIS est venu à Mossoul, ils étaient seulement 300 personnes et, à ce moment-là, il y avait 65 000 soldats Irakiens. Alors, comment pouvons-nous encore faire confiance à cette armée pour cette ville et même encore moins pour nos villages ? Ils étaient protégés par les Peshmergas et ils sont tous partis. Nous nous sentons seuls, sans personne pour nous protéger, pour protéger notre peuple. Comment peut-on alors revenir à la situation d’avant ? C'est de la stupidité. Il y a beaucoup d'églises qui ont commencé à reconstruire et elles ont dit à leurs fidèles de revenir à leurs lieux d’origine. Mais moi, je dis à mon peuple : si vous ne me voyez pas là, je n’accepterai personne qui y retourne.
Vous avez été le dernier Évêque à quitter Mossoul ?
Oui, j'ai été le dernier Évêque de Mossoul à partir. Il y avait moi et ISIS. Ils étaient à seulement 300 mètres de moi.
Si vous ne pouvez pas retourner, n’obtenant pas de garanties, croyez-vous que des endroits comme les États-Unis, le Royaume-Uni, l'Europe devraient donner la priorité à l'émigration des Chrétiens ?
Non, nous allons mourir sur notre terre. Ce n'est pas la solution de quitter ce pays. La solution est de nous aider à rester sur notre pays. Ce n’est pas seulement une terre qui serait quittée ; elle est historique, une terre sainte pour nous.
Mais, en attendant, quitter au moins temporairement ?
Non, celui qui part ne peut pas revenir.
Que pensez-vous de Trump ?
Vous savez, quand nous en avons parlé au moment de sa victoire, quelqu'un a dit : « Il est fou cet homme. » Je lui ai dit : « Pourquoi pas ? Essayons ce fou parce que nous avons essayé des dirigeants prétendument normaux et ils ont détruit nos vies. Essayons ce fou, peut-être qu'il va nous aider, car qui n’est pas fou ? Obama ? Bush ? Clinton ? Qui n’est pas fou ? Tous ces gens ont détruit nos vies, ils ont détruit notre pays. Ils voulaient remplacer un dirigeant et ils ont détruit tout le pays. Parce qu'ils ont détruit Saddam Hussein plutôt que l'Irak. Ils voulaient détruire une personne, ils ont détruit tout le pays, ils ont détruit l'Irak. Ils voulaient détruire Bachar al-Assad et ils ont détruit la Syrie. Ils voulaient changer Gadhaffi, ils ont détruit la Libye. La personne qui fait ces choses, est-elle intelligente ou folle ? »
Alors je prie pour Trump et pour le soutenir. Je n'ai aucun pouvoir sauf de le soutenir avec mes prières parce que je pense qu’il peut nous aider.
Pensez-vous qu'il vous a donnés de bons signaux qui vous aideront ?
Oui, et nous essayons une autre manière politique. L'ancienne manière politique d'Obama, de Clinton et de Bush, le père et le fils, a détruit notre vie, a détruit notre pays. Vous savez, nous avons tout perdu, nous avons perdu nos églises, nos monastères, nos maisons, tout, même notre dignité.
Alors vous tenez en fin de compte les États-Unis ultimement responsables ?
Oui, ils sont responsables et ceux qui ont aidé l'Amérique à détruire nos vies, à détruire notre pays. Ils doivent reconstruire notre pays s’ils croyaient aux droits de l'homme. Je ne crois pas à ces deux mots, il n'y a pas de droits de l'homme. Mais dans les pays Occidentaux, il y a les droits des animaux. En Australie, ils prennent soin des grenouilles. L'un de nos citoyens Syriaques, qui est un constructeur, a acheté un terrain, a retiré son argent de la banque et a voulu construire des maisons et les vendre. Puis, quand il a voulu obtenir un certificat de construction, au milieu de sa terre achetée, il est tombé sur un trou avec huit grenouilles dedans. Le gouvernement de Sydney lui a dit : « Vous ne pouvez pas construire sur cette terre. » Il a dit : « Mais j’ai tout retiré de la banque pour cela et je dois commencer à construire » et le gouvernement l'a poussé à construire dans un autre endroit, l’obligeant à sortir 1,4 million $ de plus pour la construction dans cet endroit différent, tout ça à cause de huit grenouilles. [ Une conclusion selon le traducteur : il est très important de ne pas déplacer 8 grenouilles mais, quant aux Chrétiens d'Irak et de Syrie, bof ! ce n'est pas si grave...] Et pourtant, nous sommes les derniers qui parlent la langue de Jésus. Nous sommes le Peuple Araméen et nous n'avons pas ce droit d’avoir quelqu'un pour nous protéger ? Considérez-nous comme des grenouilles, nous allons l’accepter — faites juste nous protéger afin que nous puissions rester dans notre pays.
Aimeriez-vous que Trump fasse ce que la Hongrie a fait, à savoir créer un département pour les Chrétiens persécutés ?
Vous savez, quand on parle de la Hongrie, je suis fier de ce pays. Je prie et espère que l'Amérique fasse la même chose parce que, pour la première fois, je me sens comme un Chrétien respecté dans un pays Occidental comme la Hongrie. Le Premier Ministre, quand il a rencontré Sa Sainteté le Patriarche et moi, il a essayé d'embrasser sa main et ma main et a dit qu’il avait besoin d'une bénédiction. Cela signifie qu'il est Chrétien. Immédiatement, il a dit qu’il donnerait 1 million $ aux Orthodoxes Syriaques, 1 M $ pour les Catholiques Syriaques et, pour les Chaldéens, aussi, il a donné 1 M $. Il a dit à notre Patriarche : « Avec ces millions de dollars, vous pouvez en faire ce que vous voulez pour votre peuple ».
Je ne parle pas de lui [du Premier ministre de la Hongrie] de cette façon parce qu’il nous a donné 1 million $, mais parce qu'il nous montre du respect et nous avons l’impression d’être dans un pays Chrétien chez lui. Je n’éprouve pas cela en Amérique ni en Europe. Quand nos gens vont en Suède, on leur demande pourquoi ils sont allés ? Ils disent : « Nous avons un problème avec les Musulmans » et nos gens se font répondre : « Nous sommes Musulmans, pourquoi ne pas devenir Musulmans ? » Pour eux, c’est facile. Nous donnons notre sang pour vivre notre Foi, mais pour ces gens, c’est très facile de dire : devenez Musulmans.
Votre Patriarche a dit par deux fois, il y a cinq marques de l'Église : Une, Sainte, Catholique, Apostolique — et Persécutée. Il l'a dit à Budapest et à Londres. Croyez-vous que, sur une base spirituelle, votre souffrance ici va nous faire du bien, nous qui sommes si faibles en Occident ?
J'espère et prie pour cela.
Parce que la Foi est très faible en Europe.
Oui. J'ai parlé à Bruxelles au Parlement et leur dit : « Vous devriez vous réveiller parce que vous acceptez des gens et pensez qu'ils sont réfugiés, mais ils ne sont pas des réfugiés ». Par exemple, ce million de personnes qui se sont rendues en Allemagne à partir de l'Ukraine : la Croix-Rouge voulait leur donner de l'aide, mais quand ils ont a vu le symbole de la Croix-Rouge sur la boîte, ils n’ont pas accepté les boîtes. Ce ne sont pas des réfugiés, s'ils étaient des réfugiés dans le besoin, ils auraient pris ces boîtes de n’importe qui.
Vous croyez qu'ils ont été radicalisés ?
Oui, et je leur dis [ aux Occidentaux ] de se réveiller. Ces gens sont les mêmes que ceux qui sont venus ici il y a de nombreuses années. Et nous les avons acceptés. Nous sommes le peuple d'origine dans ce pays. Nous les avons acceptés, nous leur avons ouvert nos portes, et ils nous ont forcés à être d’abord des minorités dans notre pays, puis des réfugiés ensuite dans notre pays. Et ce sera la même chose avec vous si vous ne vous réveillez pas. Si vous ne vous réveillez pas, dite-nous le, s'il vous plaît, parce que nous avons des caravanes. Quand nous retournerons dans nos villages, nous ne vendrons pas ces caravanes, nous allons les garder pour vous quand vous deviendrez réfugiés dans votre propre pays. Croyez-moi, ça va arriver. [Le Président Turc Recep] Erdogan et le gouvernement Turc les poussent à avoir cinq enfants en Europe, chaque famille devrait avoir 5 enfants. Tous les Chrétiens dans le monde ont un bébé et demi. Je suis désolé mais c'est de la stupidité. Ils devraient avoir cinq ou six bébés [ les Occidentaux aussi ], pourquoi pas ? Pourquoi devrions-nous aider les Musulmans ? OK, nous aidons tous ceux qui en ont besoin, s'ils sont vraiment dans le besoin, nous devons les aider parce que nous sommes Chrétiens et nous aimons même nos ennemis. Mais pourquoi le Peuple Chrétien ne se réveille-t-il pas, en particulier en Europe ?
Si nous disons cela en Europe, nous sommes appelés des racistes, des fascistes.
Nous devrions définir notre Foi, notre vie.
Comment la situation actuelle en Irak se compare-t-elle maintenant à ce qu’elle était dans les années 1990, des années 1980, en particulier quant aux relations avec les Musulmans ? Pourquoi et comment est-ce que ça a changé ?
Nous avons eu le problème avec les Musulmans depuis 1400 ans, et non à partir de maintenant. Telle est la vérité, mais nous ne la disons pas que nous voulons vivre en paix. ISIS est venu à Mossoul en 2014, mais nous avons connu [l'Islam] à Mossoul quatre fois avant même ISIS, de 2003 à 2014. ISIS est la cinquième vague parce qu’ils ont dit dans les Mosquées à Mossoul et dans les environs en 2005 : « N’achetez pas de maisons des Chrétiens, vous allez les avoir gratuitement ». C'était en 2005. La foi Musulmane leur dit que « tout qui appartient à un non-Musulman est gratuit pour vous : son argent, sa dignité, ses femmes, tout ». C’est gratuit pour eux et c’est leur droit parce qu'ils ne sont pas Musulmans. C'est leur foi. Dieu leur a dit cela.
Comment se fait-il qu’ils ne semblaient pas croire à cela avant 2003 ?
En raison de l’état de droit. Nous pouvions vivre avec le mal s'il y a la loi pour contrôler l'endroit. À l'époque de Saddam, ce fut le temps d’un dictateur, d’un grand dictateur, mais il y avait la loi, il y avait la police, il y avait l'armée. Toute personne qui a fait quoi que ce soit pour vous faire du mal, vous pouviez appeler le 104, la police venait immédiatement. Après le dictateur Saddam, ce fut le temps de la démocratie. Si nous avions à appeler ce numéro et si jamais quelqu'un répondait, on nous disait : « Prenez soin de vous ». Nous ne pouvions donc pas vivre désormais avec les Musulmans. Comment pouvions-nous le faire ? Sans la loi, la société, la police. C'est le problème. Il devrait y avoir un gouvernement fort à Bagdad, pour avoir un état de droit. Sans celui-ci, nous ne pouvons pas vivre avec personne parce que, en tant que Chrétiens, nous ne sommes pas formés à nous battre, mais eux [ les Musulmans] le sont. S'ils ne trouvent personne avec qui se battre, ils vont se battre entre eux-mêmes, Sunnites, Chiites. C’est leur problème et nous n'avons pas été éduqués ainsi. Nous avons donc besoin d’un état de droit, et s'il y a la loi, nous pouvons vivre avec tout le monde. Nous vivons en paix ici à Erbil au Kurdistan parce qu'il y a un gouvernement fort, il y a la loi pour nous protéger.
Mais si les Peshmergas vous abandonnaient ? Avez-vous confiance en eux à long terme ?
Oui, mais nous avons besoin de garanties de leur part pour leur faire confiance. Sans garanties que nous ne pouvons pas faire confiance à personne et je le dis au Président, aussi.
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