mercredi 14 septembre 2016

Sur la directive de Buenos Aires



« Si certains pasteurs, après « Amoris Laetitia », s’étaient déjà fait dire par des paroissiens furieux que « le Pape François a dit que vous devez me donner la Communion », à quoi peuvent-ils s’attendre à la suite de son approbation radicale de cette interprétation Argentine d’Amoris Laetitia ? »



Edward N. Peters
13 septembre 2016 03h10 EST
SOURCE : Catholic World Report

Le Canon 915, la norme moderne (reposant encore sur des racines anciennes) qui interdit aux ministres de la Sainte Communion de donner ce Sacrement aux Catholiques qui « persévèrent avec obstination dans un péché grave et manifeste » ne nomme pas expressément les divorcés Catholiques vivant dans un deuxième (ou troisième, ou quatrième , ou cinquième ...) « mariage » comme des exemples de personnes non admissibles à la Sainte Communion, mais ils ont longtemps été l’exemple typique de ceux qui sont couverts par ce canon. Même ses critiques les plus sévères admettent généralement que le Canon 915 s’applique aux Catholiques divorcés/remariés — les difficultés émotionnelles associées à de tels cas étant, dans l'esprit de certains critiques, un bon argument pour abandonner la norme.

Maintenant, dans son approbation sans équivoque ( « Il n'y a pas d'autres interprétations possibles » [!] ) d'un projet du plan de mise en œuvre de son document Amoris laetitia par quelques Évêques Argentins, plan qui a coulé dans le public, François n'a ni « abrogé » le Canon 915, ni ne l’a « interprété » comme s’il était disparu (les deux étant le genre d'opérations techniques auxquelles le Pape montre peu d'intérêt). Néanmoins, son action sera probablement plus difficile pour les ministres Catholiques qui restent liés par le droit canon, même dans les cas complexes, à observer le Canon 915 au niveau pratique.

Fondamentalement, le projet Argentin (en supposant que c’est encore un « projet ») oriente les ministres de la Sainte Communion (les prêtres de paroisse surtout) à travailler sur des cas concrets qui ont un impact sur l'accès à au moins trois Sacrements (Mariage, Pénitence et l'Eucharistie), guidés non pas selon la sagesse pastorale accumulée par l'Église telle qu’elle est résumée dans les normes comme le Canon 915 (qui ne semble pas même pas être mentionné !), mais plutôt par un ensemble de considérations malléables sans fin formulées dans un verbiage évoquant les années 1970. Si certains pasteurs après la publication d’Amoris Laetitia s’étaient déjà fait dire par des paroissiens furieux que « le Pape François dit que vous devez me donner la Communion », à quoi peuvent-ils s’attendre à la suite de son approbation radicale de cette interprétation Argentine d’Amoris Laetitia ?

Fondamentalement le projet Argentin trébuche, je crois, de la même manière que le fait Amoris Laetitia, à savoir, en pensant que les conclusions subjectives, quoique sincères, d'une personne au sujet de son admissibilité à la Communion selon le Canon 916 l'emporte sur l'autorité de l'Église, et même sur son obligation, de refuser le Sacrement face à de certaines conditions objectives, vérifiables extérieurement par le Canon 915. Je ne reprendrai pas cet argument ici mais nous devons être clairs : compromettre l'interprétation bien établie du Canon 915 dans le cas des Catholiques divorcés et remariés remet aussi nécessairement en cause l'applicabilité de la loi aux cas de, disons, « des couples qui s’aiment » et qui cohabitent en dehors du mariage, de la promotion « par compassion » de l'avortement ou de l'euthanasie ou encore des personnes « honnêtes » qui s’engagent dans des «mariages de même sexe», et ainsi de suite.

Où va-t-on à partir d'ici ?

1. C’est difficile de voir comment les Évêques Argentins peuvent abaisser le ton d'un document que François a déjà approuvé chaleureusement mais qui sait ? Peut-être qu'ils pourraient le « clarifier » de telle manière que Rome puisse à son tour « clarifier » son approbation.

2. Le document Argentin a lui-même un langage soi-disant restrictif qui pourrait être invoqué, mais franchement, je ne pense pas que ce sera une grande aide aux pasteurs. Considérez, par exemple, l'exigence selon laquelle il faut, entre autres, être « incapable » d'obtenir une déclaration de nullité, avant d'être autorisé à la Sainte Communion. Mais pensez-y à cela — qu’est-ce qu’il doit être fait si l'on est « incapable » d'obtenir une nullité précisément parce qu'il n'y a pas de preuve de nullité ? Est-ce que le fait de perdre sa demande pour une déclaration de nullité donne soudainement un droit à la Sainte Communion malgré le remariage ? La majeure partie du reste du langage prétendument de mise en garde comme celui d '« éviter la compréhension de cette possibilité comme un accès sans restriction aux Sacrements » est d’une grande platitude — personne ne pense sérieusement que l'Église approuve « l'accès sans restriction aux Sacrements » si bien qu’un avertissement contre cet accès est inutile.

3. Aussi difficile que cela pourra être à suivre, mon conseil de base aux ministres de la Sainte Communion dans le contexte des Catholiques divorcés et remariés est d'ignorer la fureur à venir sur l'approbation par le Pape d'un document ambigu libellé par certains Évêques locaux et suivez juste la loi de l'Église qui est tout à fait claire, à moins que ou jusqu'à ce que la loi soit officiellement changée, à tel point (si on en arrive là) nous nous assoirons et nous tenterons de comprendre ce que la nouvelle loi commande.

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