mardi 7 novembre 2017

La culture de la réprimande
a pris racine dans le discours de l'Église






Écrit par : Père Raymond J. Sousa
Le 6 novembre 2017
SOURCE : National Catholic Register




COMMENTAIRE : Le dialogue que le Pape François réclame souvent n'a pas réellement lieu au sein de l'Église.

La plus récente réprimande —exprimée après réflexion et respectueusement faite — à l'exercice du magistère du Pape François est venue du Père Capucin très respecté Thomas Weinandy, qui a servi de 2005 à 2013 en tant que directeur exécutif du Comité des Évêques Américains sur la Doctrine.

Il est tellement respecté que le Pape François l'a nommé à la Commission Théologique Internationale (CTI), le principal organe consultatif de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, en 2014.

La lettre du Père Weinandy au Pape François, datée du 31 juillet et rendue publique le 1er novembre, reproche au Saint-Père d'avoir encouragé la « confusion chronique » par un enseignement « ambigu », affirmant qu'il « censure et même moque » ceux qui soutiennent l'enseignement Traditionnel et qu'il tolère l'enseignement contraire à la Doctrine de la Foi. La lettre du Père Weinandy est claire et directe : la « calomnie » du Saint-Père de ceux qui suivent la Tradition de l'Église est « étrangère à la nature du ministère pétrinien » qui existe « pour dissiper l'erreur et non pas pour la favoriser ».

Le Père Weinandy a dit au site Crux qu'il a publié la lettre publiquement parce que « la lettre exprime les préoccupations de beaucoup plus de gens que moi seulement, des gens ordinaires qui sont venus me voir avec leurs questions et leurs appréhensions, et je voulais qu’ils sachent que je les ai écoutés ».

En effet, il n'y a rien dans la lettre du Père Weinandy que les journalistes n'entendent pas parler ouvertement parmi les Cardinaux et les Évêques, ne serait-ce qu’officieusement.

La Conférence des Évêques Catholiques des États-Unis a demandé au Père Weinandy de démissionner en tant que consultant auprès de son comité de doctrine. Il reste à voir si le Saint-Père permettra au Père Weinandy de rester sur la Commission Théologique Internationale ou le remerciera de ce rôle, jugeant qu'il n'a plus rien à offrir.

Appel au dialogue et à la charité

Une déclaration remarquable du Cardinal Daniel DiNardo, Président de la Conférence des Évêques Catholiques des États-Unis, a été publiée en rapport avec la lettre de Weinandy. Elle ne contient pas un mot de critique du Père Weinandy, mais appelle au « dialogue au sein de l'Église » et dit que « la charité Chrétienne doit être exercée par tous ceux qui sont impliqués ».

Le « tous » comprendrait apparemment le Saint-Père lui-même et ses proches.

Le Cardinal DiNardo est le troisième Cardinal, après le Cardinal Pietro Parolin et le Cardinal Gerhard Müller, à réclamer un dialogue authentique dans l'Église après les reproches publics — dont l'un appelé « correction filiale » au Saint-Père.

L'implication est claire : le dialogue que le Pape François appelle souvent ne se déroule pas réellement au sein de l'Église.

En effet, quelque chose d'une culture de réprimande a pris racine à la place.

Le Cardinal DiNardo a cité Saint Ignace de Loyola sur la façon dont un « bon Chrétien devrait être plus désireux de donner une bonne interprétation suite à une déclaration du prochain que de la condamner ».

Choix pastoral délibéré

Dans cet esprit, nous pourrions demander ce que le Saint-Père a l'intention de réaliser avec la culture de la réprimande qu'il a apportée dans la vie de l'Église. Que ce soit un choix pastoral délibéré n'est pas contesté. La question est de savoir comment l'Église devrait l’accueillir.

Considérez seulement les exemples majeurs suivants de la manière dont le Saint-Père emploie la stratégie pastorale de la réprimande :

  • Dans une interview avec des publications Jésuites, en août 2013, il a réprimandé certaines femmes consacrées comme étant des « vieilles filles » spirituelles stériles et certains pasteurs d'être « enfermés dans des règles bornées ». Plus tard viendra la mention que les prêtres font du confessionnal une « chambre de torture ».

  • Dans son adresse à la Curie romaine pour Noël 2014, il a énuméré, en détail, 15 maladies spirituelles auxquelles ceux qui écoutaient étaient sujets.

  • Dans une conférence de nouvelles aéroportée de janvier 2015 , le Pape François a répondu aux questions de fertilité en dénonçant une femme particulière qui attendait son huitième enfant, ayant eu sept accouchements auparavant par césarienne. Le Pape François a dit à deux reprises qu'en la rencontrant dans une paroisse Romaine, il avait réprimandé la femme pour son irresponsabilité. Le Pape François a donné suffisamment d'informations pour qu'il soit facile pour ses collègues paroissiens de connaître son identité.

  • Dans le discours de clôture du Synode sur la Famille en octobre 2015, le Saint-Père a déclenché une avalanche de condamnations sur les Cardinaux et les Évêques qui ne sont pas d’accord avec lui, les accusant de « répétition facile de ce qui est évident ou de ce qui a déjà été dit » ; d’« enterrer leurs têtes dans le sable » ; d’« endoctriner » l'Évangile « dans des pierres mortes pour être jetées sur les autres » ; de se cacher « derrière les enseignements ou les bonnes intentions de l'Église, pour s'asseoir dans la chaire de Moïse et juger, parfois avec supériorité et superficialité, des cas difficiles et des familles blessées » ; et de s’adonner dans « des théories de conspiration et des points de vue bornés ».

  • En 2016 et en 2017, le Saint-Père a refusé de clarifier les ambiguïtés sur Amoris Laetitia (La joie de l’amour), tout en permettant à ses proches subordonnés de lancer des attaques ad hominem sur ceux qui cherchent des éclaircissements selon la Tradition de l'Église.

  • Le mois dernier, une lettre personnelle du Pape François au Cardinal Robert Sarah, le Préfet de la Congrégation pour le Culte Divin et la Discipline des Sacrements, sur les questions liturgiques a été divulguée à la presse et a ensuite été ordonnée d’être envoyée à toutes les Conférence des Évêques du monde. Le contenu de la lettre corrigeait publiquement les efforts du Cardinal Sarah et la manière semblait être conçue pour atteindre une publicité maximale.

Un commentateur enthousiaste a noté que la manœuvre était « sans précédent. ... Certainement pas depuis Vatican II, nous avons vu une telle fessée publique d'un prélat de haut rang ».

En outre, à plusieurs reprises, le Pape François a appelé à un débat ouvert et à un discours franc et audacieux dans lequel les membres de l'Église n'ont pas peur de s'exprimer et même de contredire le Saint-Père lui-même. Par conséquent, la culture de la réprobation que favorise le Pape François s'est répandue dans toute l'Église.

Par conséquent, il y a les événements de ces dernières semaines avec des réprimandes publiques et des corrections au Saint-Père lui-même. Les commentaires Catholiques, y compris les Évêques et les prêtres, ont également intensifié ces dénonciations rhétoriques atteignant des dimensions fiévreuses.

La fièvre mise de côté, c'est une caractéristique, pas un bug, pour emprunter une phrase du monde du logiciel. Le Saint-Père croit que, dans le conflit d'idées et le choc des personnalités, la vérité peut être clarifiée. C'est une idée empruntée à la philosophie Allemande et le Pape François est particulièrement attentif aux priorités et aux méthodes de l'Église en Allemagne.

Le Christ est le point de départ

Le point de départ pour comprendre la préférence pastorale du Pape François pour la dénonciation et la réprimande est le ministère du Seigneur lui-même. Jésus a réprimandé, souvent dans un langage vigoureux, beaucoup de ses auditeurs. Il a ordonné à ses disciples de « secouer la poussière » de leurs pieds contre ceux qui ne voulaient pas les écouter.

Dans la vie récente de l'Église, ces modes d'action pastorale ont presque entièrement disparu.

Il est très difficile d'imaginer un Évêque s'adressant à ses prêtres de la même manière que le Saint-Père s'est adressé aux Évêques. Un curé ne ferait jamais remarquer aux médias qu'une femme en particulier était « irresponsable » dans ses décisions en matière de procréation. Et pourtant, Jésus le ferait-il ?

Le Pape François le pense évidemment à savoir que l'Église doit retrouver les dénonciations que nous trouvons dans la prédication et l'enseignement de Jésus.

Ce n'est pas toute l'histoire, bien sûr, car le Pape François a parlé de la « tendresse » qui caractérise le Chrétien et comment le « langage dur » n'a pas sa place dans l'esprit, le cœur et la bouche d'un pasteur.

C'est un équilibre difficile, pour être sûr. Les homélies quotidiennes du Pape François sont empreintes d'une langue dure quand il interprète les paroles de l'Écriture Sainte. Il prononce fréquemment des jugements sur des catégories entières de personnes sur ce qu'il considère qui leur manque.

Le Saint-Père essaie évidemment de présenter un modèle plus complet de Jésus le Bon Pasteur, qui porte les brebis et emploie la houlette et le bâton pour les maintenir en rang.

La culture de la réprimande ne peut pas être le seul mode de discours ecclésial même si nous lui donnons une plus grande importance à la suite de la direction du Saint-Père.

Il doit être complété par un dialogue dans la vérité et la charité ; dans le foyer de la Foi, les reproches eux-mêmes doivent être faits dans la charité.

C'est le défi actuel et ce pourquoi le Cardinal DiNardo a invité à la réflexion sur le dialogue dans l'Église après la lettre du Père Weinandy., Ça reste à voir si cela va venir.





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