Écrit par Hilary White
ex-correspondante à Rome
Le 3 novembre 2017
SOURCE : The Remnant
L’univers Catholique de Twitter est vivant aujourd'hui avec la critique de la décision de la Conférence des Évêques Américains de limoger le Père Thomas Weinandy, l'ancien responsable de leur Commission sur la Doctrine. Il a fallu quelques heures aux défenseurs courageux du statu quo pour intervenir contre le plaidoyer poli du doux Frère Franciscain au Pape François afin qu’il défende la Foi et les fidèles Catholiques. Ou au moins d'arrêter de les attaquer.
Dans une lettre rendue publique le 1 er Novembre, le Père Weinandy, ancien chef d'état-major de la Commission sur la Doctrine de la Conférence des Évêques des États-Unis et membre de la Commission Théologique Internationale du Vatican, a averti le Pape François qu'il avait causé une « confusion chronique » parmi les fidèles et les Évêques.
Il a écrit au Pape : « Enseigner avec un tel manque de clarté apparemment intentionnel fait courir le risque de pécher contre l’Esprit Saint, l’Esprit de vérité ». Il a ajouté que les Catholiques sont « décontenancés par votre choix de certains Évêques, des hommes qui semblent non seulement ouverts à ceux qui défendent des thèses contraires à la Foi Chrétienne mais qui les soutiennent et même les défendent ».
Dans une interview hier avec John Allen de chez Crux, il a ajouté, plus prophétiquement qu'il ne l’avait peut-être prévu : « Je ne pense pas que le monde puisse ou devrait associer ma lettre avec la Conférence des Évêques Américains ou les Évêques Américains. Rien non plus qui soit impliqué dans l'écriture de la lettre et dans sa publication ne sera une nouvelle pour eux ».
« Les Évêques apprennent vite » écrivait-il dans sa lettre, « et ce que beaucoup ont appris de votre pontificat ce n’est pas que vous êtes ouvert à la critique mais bien que vous ne l’admettez pas », affirmant que beaucoup d'Évêques ne parlent pas publiquement parce qu’« ils sont nombreux à craindre que, s’ils disent ce qu’ils pensent, ils seront marginalisés ou pire ».
Et bien sûr, dans les heures qui ont suivi la publication de sa lettre, nous avons appris que le Père Weinandy avait été viré. Bien sûr, l’univers de Twitter est occupé à commenter l'ironie : comment un homme exprimant de graves inquiétudes qu'il y a une atmosphère de peur d'être puni pour avoir exprimé de graves inquiétudes, ait pu être immédiatement renvoyé.
Peut-être l'aspect le plus étonnant de ce petit incident est jusqu’à quel point les Évêques Américains — comme presque tous les Épiscopats — sont complètement aveugles à ce que les analystes politiques appellent « l'optique ». Les consultants politiques demandent souvent : à quoi ça a de l’air ? Et ça a l'air extrêmement mauvais. Comme si le brouillard de l'ironie n'était pas assez épais, en réponse à l'indignation des Catholiques, la Conférence des Évêques Américains a fait ce que tous les autres membres de la cabale du Pape François ont fait : ainsi, la Conférence a commencé à bloquer les critiques de son compte Twitter. Ce qui, il faut le dire, ne fait que davantage prouver le point du Père Weinandy encore une fois.
Certaines des critiques ont été exceptionnellement acerbes. Le Père Hunwicke a écrit cet après-midi : « Cette humiliation rituelle bon marché et vulgaire illustre la mesure dans laquelle le P [ape] F [rançois] préside une Église de petits INTIMIDATEURS où les Évêques nabots et les mini cardinaux se concurrencent entre eux pour se vaincre les uns les autres dans les enjeux de la flagornerie. Tout comme Tom Weinandy vient de le dire ».
Alors que je suis en train d’écrire cet article, l'outrage est loin de s’estomper, il s’amplifie et est certainement un signe de la façon dont les Catholiques dégoûtés — même ceux qui ne se sont jamais identifiés comme Traditionnalistes — sont devenus avec ce Pape et sa structure de despotes épiscopaux. Dans sa lettre, le Père Weinandy a tenu à préciser qu'il n'est pas signataire de la Correction Filiale ou de toute autre déclaration publique contre l’agenda du Pape François.
En fait, un de ses anciens étudiants m'a écrit aujourd'hui en disant :
« Je vois que le Père Thomas Weinandy a été écrasé. Il était un de mes professeurs en Patristique à Oxford et il était l'un des universitaires les plus doux, les moins conflictuels, les plus aimables qu'on aurait pu espérer rencontrer. Pour moi, le fait qu'il ait choisi d'écrire pour exprimer sa préoccupation au sujet de la crise dans l'Église et la papauté est très significatif.
Il est ni un traditionaliste, ni un polémiste, mais un frère humble et simple qui est lucide et tout à fait fidèle à l'Église et à son enseignement. Je serais surpris maintenant si nous ne voyions plus ce genre de lettre / exercice de conscience. J'imagine qu'il deviendra de plus en plus difficile pour les hommes de conscience et de statut de s'asseoir sur la clôture ».
Quand je l’ai publiée, cette évaluation a été soutenue par Joseph Shaw, le directeur de la Société de la Messe Latine du Royaume-Uni et le porte-parole de la Correction Filiale, qui a écrit : « Ceci est tout à fait vrai. Ce n’est pas un homme à chercher la confrontation ».
L’article du site Crux offrait une liste succincte des points du Père, à savoir les inquiétudes de Weinandy. Il a dit que le Pape ...
- Favorise la «confusion chronique».
- « Déshonore » l'importance de la Doctrine.
- Nomme des Évêques qui « scandalisent » les croyants avec un « enseignement et une pratique pastorale » douteuse.
- Donne aux prélats qui s’objectent l'impression qu'ils seront « marginalisés ou pires » s'ils s'expriment.
- Fait en sorte que les fidèles Catholiques « perdent confiance en leur Berger Suprême ».
Le Père Dominique Fabien Rimaz reproduit ici en français la lettre in extenso, elle vaut vraiment la peine d’être lue. Le Père Weinandy a envoyé la lettre au Pape le 31 juillet, la Fête de Saint Ignace de Loyola. Comme les Cardinaux des dubia, il a dit qu'il l'a rendue publique seulement après que le Pape l'ait ignorée pendant des mois.
Ce qui est remarquable dans sa critique en sa saveur pastorale distincte, c’est sa préoccupation sur l'effet que la situation a sur les gens ordinaires. Le Pape, a-t-il dit, semble « censurer et même se moquer » des critiques de Amoris Laetitia dans leur désir de l’interpréter en accord avec l’enseignement Catholique, et ce faisant, commet un « genre de calomnie qui est étranger à la nature du ministère pétrinien ».
Dans une interview accordée à Crux , Weinandy dit qu'il n’a pas peur des représailles mais qu’il est « plus préoccupé par le bien que ma lettre pourrait faire ». La lettre « exprime les préoccupations de beaucoup plus de gens que juste moi, des gens ordinaires qui sont venus à moi avec leurs questions et leurs appréhensions. Je voulais qu'ils sachent que j'ai écouté ».
« J'ai fait ce que je crois que Dieu voulait que je fasse, [ Voir le signe très clair qu'il a demandé à Jésus ici ] » a-t-il dit.
En fait, le Père Weinandy a renforcé ma propre théorie sur le « Grand Clarificateur », en disant que ce pontificat, et l'absence de réponse à celui-ci de la part des prêtres et des Évêques, est autorisée par Dieu afin de révéler « à quel point est faible la Foi de beaucoup dans l'Église ». Il a ajouté que François a révélé que beaucoup dans l'Eglise « soutiennent des thèses pastorales et théologiques nuisibles ».
Ce qui fait inévitablement penser à d'autres réponses qui n'ont pas été aussi claires, ni si pastorales.
Quand le Cardinal Müller a été renvoyé brusquement de son poste de Préfet de la Congrégation de la Foi, le monde Catholique conservateur s'est plaint que c'était un autre cas où un « bon » prélat était éliminé. Et ça semble clair, d'après la façon dont cela a été fait, et la façon dont François a traité Müller en général et dont il s'en est débarrassé. Mais sa description par des écrivains conservateurs comme un champion assiégé de l'orthodoxie Catholique persécuté par le régime pour sa fidélité trahit une mémoire un peu sélective et à courte vue. Ed Pentin a un long fichier des interviews avec lui et des articles sur Müller qui montrent clairement son incapacité totale à se décider sur quel côté il doit se brancher.
Un rapide examen des interviews et déclarations de Müller révèle un esprit irrésolu et finalement calculateur d'un homme qui est — des sources proches de lui me l’ont dit — motivé principalement par un désir puéril d'être approuvé par les « gars cool » du Vatican, d'une part, et une conviction inébranlable de son propre génie théologique de l'autre.
Plus récemment, le 30 Octobre, Crux a cité sous le titre : « Le Cardinal Müller soutient le Pape François contre les critiques d’« Amoris Laetitia » dans laquelle l'ancien Préfet de la CDF a enfin grimpé à bord du train Kaspérien concernant la réception de la communion pour adultères impénitents.
Signalant furieusement avec les mots à la mode de l’Église de François et avec les incohérences les plus vives, Müller écrit que « les facteurs atténuants de la culpabilité » peuvent conduire les couples dans une « situation matrimoniale incertaine » à travers un « chemin de repentance » toujours « accompagné » par un confesseur délicatement sensible — à un point où la réception de la Communion n'est plus un péché. Probablement parce que l'adultère lui-même n'est plus un péché. Ni un sacrilège non plus, je suppose. Ou quelque chose du genre. D'une certaine manière, la « nouvelle évangélisation » est impliquée là dedans bien qu'on ne sache pas exactement comment cela rend l'adultère et le sacrilège justifiés. En outre, il est très important d’accomplir l'obligation de la Messe Dominicale, et comme tout le monde le sait, on ne peut peut-être pas aller à la Messe un dimanche sans recevoir la Communion.
Nous entendons encore, comme nous l'avons fait incessamment de la part des Kaspériens pendant les Synodes, le cas difficile de la pauvre femme pauvre qui a été abandonnée par le premier mari et qui « ne trouve d'autre issue que de se confier à un autre personne bonne de coeur », avec qui, je suppose, elle n'a pas d'autre choix que d'avoir des relations sexuelles. En raison de sa gentillesse.
Quoi qu'il en soit, le résultat de ceci est une « relation ressemblant à un mariage » à propos de laquelle les confesseurs doivent faire très attention à ne pas dire des choses méchantes. Ou d’être trop « extrêmes ». Il est très important pour celui-ci d'éviter une « adaptation bon marché au Zeitgeist relativiste », d'une part, et une « application froide des Commandements dogmatiques et des règles canoniques » de l'autre. Parce que cela pourrait être trop polarisant. Et méchant.
Et de toute façon, les péchés de la chair ne sont jamais les pires choses. Il y a comme « différents niveaux » de gravité, vous savez ? Et, comme tel, cela dépend du type de péché, non ? « Les péchés de l'Esprit », comme la fierté spirituelle, l'avarice et de telles choses, sont pires que « les péchés de la chair », vous savez ? Les péchés de la chair sont, en tant que tels, seulement un résultat de la « faiblesse humaine », non ?
Apparemment, le vrai problème avec tout cela a été que le chahut Kaspérien a été complètement gonflé, mais gonflé hors de proportion, et la « polarisation » qu'il a causée a été « regrettable ». La question de la Communion pour les Catholiques divorcés et « remariés » civilement, a-t-il dit, a été « faussement élevée au rang d'une question décisive du Catholicisme et d'une mesure de comparaison idéologique pour décider si l'on est conservateur ou libéral, favorable ou contre le Pape ».
Pendant des années sous le Pape Benoît, Müller était engagé dans une guerre ouverte avec l'Épiscopat Allemand qui insistait sur le fait qu'ils allaient permettre la Communion pour les divorcés/remariés, quoi qu’en dise Rome, menaçant même d'entrer en schisme s'ils n’obtenaient pas raison. [1].
Müller, avec peu de soutien du Pape Benoît XVI — qui semblait se contenter de permettre à son Préfet de la CDF et aux Allemands de crier leurs différences — et avec une opposition catégorique de François, s'efforça en effet de tenir la ligne. Le fait que François a orchestré les Synodes pour saper ce qui n’était certainement pas de la faute à Müller. Et il est difficile d'imaginer que quelqu'un soit dans une position pire que ce que Müller était à ce moment-là.
Mais depuis lors, Müller a démontré très peu de son ancien cran, en essayant plutôt d'un jour à l'autre d’apaiser les deux côtés. Il aurait été remercié de la CDF — et bien sûr adulé par les « conservateurs » — pour sa légère opposition assez équivoque à Amoris Laetitia, Muller a fait des allers-retours dans ce qui peut facilement être vu comme une tentative désespérée de trouver des amis dans les deux camps. Dans cet esprit, on peut être pardonné de ne pas prendre son essai du 30 octobre trop au sérieux.
Peut-être l'un des bons effets à venir de la persécution du Père Weinandy sera de démontrer comment un pasteur de l'Église Catholique est censé agir. Comme l'a dit mon ami, peut-être « il va devenir de plus en plus difficile pour les hommes de conscience et de statut de s'asseoir sur la clôture » en supposant qu'il en reste.
[1] Il est à noter que ces crises de colère hurlantes des Évêques Allemands firent halte brusquement au même moment où le Cardinal Kasper a prononcé son discours tristement célèbre au Consistoire de février 2014.
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