lundi 9 mai 2016

La crise actuelle
dans le contexte de l’Histoire de l’Église



Conférence prononcée par : Professeur Roberto de Mattei

Forum sur la Vie à Rome — le 6 mai 2016
SOURCE : Voice of the Family





Dans l'Évangile, Jésus utilise beaucoup de métaphores pour instruire l'Église qu'il a fondée. L'un des plus appropriées est l'image du bateau menacé par une tempête (Matthieu 8 : 23-27 ; Marc, 4, 35-41 ; Luc 8 : 22-25). Cette image a souvent été utilisée par les Pères de l'Église et par les Saints pour représenter l'Église comme une barque en mer, secouée et ballottée par les vagues et qui est, pourrait-on dire, au milieu des tempêtes, sans jamais être submergée par les vagues .

Bien connue dans l'Évangile est la scène de la tempête sur le lac de Tibériade, calmée par Notre Seigneur : « Tunc Surgens imperavit ventis et mari » ( note : « Alors il se leva, parla sévèrement au vent et à l'eau du lac ») (Matthieu 8, 26.). Lorsque la Papauté était à Avignon, Giotto a décrit la scène de la tempête ballottant la barque de Pierre dans une mosaïque célèbre trouvée à l'origine dans le pignon de la Vieille Basilique Saint-Pierre et qui est maintenant dans l'atrium de la nouvelle Basilique.

Pendant le Carême de 1380, Sainte Catherine de Sienne avait fait vœu d'aller à Saint-Pierre chaque matin pour prier devant cette image. Un jour, le 29 janvier 1380, à l'heure des Vêpres, tandis que Catherine était absorbée dans la prière, Jésus, est sorti de la mosaïque et a placé la « Navicella » de l'Église sur Ses Épaules. La Sainte, accablée par tant de poids, est tombée inconsciente sur le sol. Ce fut la dernière visite effectuée à Saint-Pierre par Catherine, elle qui avait toujours exhorté le Pape de guider la « Navicella » de l'Église sans peur.

Pendant tous les deux mille ans d'histoire, le Navire Mystique de l'Église a toujours bravé les tourmentes et les tempêtes.

Au cours des trois premiers siècles, l'Église a été persécutée sans relâche par l'Empire Romain. Durant cette période, entre Saint Pierre et le Pape Melchiade, un contemporain de l'Empereur Constantin, il y a eu trente-trois Papes. Tous sont Saints et, à l’exception de deux qui ont subi l'exil, les trente autres sont tous morts martyrs.

En l'an 313, Constantin le Grand a certes accordé la liberté à l'Église et les Chrétiens qui, une fois hors des catacombes, ont commencé à jeter les bases d'une nouvelle société Chrétienne. Mais au quatrième siècle, le siècle du triomphe et de la liberté de l'Église, a été aussi le siècle de la terrible crise arienne.

Au Ve siècle, l'Empire Romain s’est effondré et l'Église a dû faire face par elle-même à des invasions, d'abord par les Barbares, puis ensuite par l'Islam qui, à partir du VIIIème siècle, a envahi les terres Chrétiennes telles que l'Afrique et l'Asie Mineure, qui n’ont ensuite jamais été restaurées à la vraie Foi.

Au cours des siècles de Constantin à Charlemagne il y a eu soixante-deux Papes. Parmi eux se trouvaient, Saint Léon le Grand, qui a bravé seul, Attila, « le Fléau de Dieu », Saint Grégoire le Grand, qui a vigoureusement combattu contre les Lombards, Saint Martin I, envoyé en exil dans des chaînes à Chersoneus et Saint Grégoire III qui a vécu en danger continu de mort, sous la persécution par les Empereurs Byzantins. Pourtant, à côté de ces grands défenseurs de l'Église, nous trouvons aussi comme Papes, Libère, Vigile et Honorius qui vacillait dans la Foi. Honorius, en particulier, a été condamné comme hérétique par son successeur, Saint Léon II.

Charlemagne a restauré l'Empire Chrétien et fonda la civilisation Chrétienne du Moyen Âge. Même à cela, cette ère de la Foi n’était pas dépourvue de maux tels que la simonie, le laxisme moral du clergé et des rébellions contre l'autorité de la Chaire de Pierre par les Empereurs Chrétiens et des Souverains. Après la mort de Charlemagne, entre 882 et 1046, il y a eu quarante-cinq Papes et antipapes desquels 15 furent déchus et 14 emprisonnés, exilés et assassinés. Les Papes Médiévaux ont connu des combats et des persécutions, de St. Pascal I à Saint Léon IX jusqu'au dernier Pape Médiéval Saint Grégoire VII à être canonisé et qui est mort, persécuté et en exil.

Le Moyen-Age a atteint son apogée sous le pontificat de Innocence III (Le Troisième), mais Sainte Lutgarde eut une vision dans laquelle le Pape lui apparut complètement couvert de flammes, et on disait à Sainte Lutgarde que le Pape devrait rester au purgatoire jusqu'au Jugement Dernier en raison de trois fautes majeures qu’il avait commises. Saint Robert Bellarmin commente : « Si un Pape si digne et si estimé de tous souffre de ce sort, qu’arrivera-t-il aux autres ecclésiastiques, religieux ou laïcs qui se souillent d'infidélité ? »

Au XIVe siècle, au moment du transfert de la Papauté à Avignon pendant soixante-dix ans, il s’ensuivit une crise aussi terrible que celle Arienne : le Grand Schisme d'Occident, qui a vu la Chrétienté divisée entre deux, puis trois Papes, avec le problème canonique de la légitimité qui ne sera pas résolu jusqu'à 1417.

Il suivit alors un âge de calme apparent, la période de l'humanisme, qui était en réalité la préparation d'une nouvelle catastrophe : la Réforme Protestante du XVIe siècle. Une fois de plus, l'Église a réagi avec vigueur mais, dans les XVIIe et XVIIIe siècles, la première hérésie qui a choisi de ne pas se séparer de l'Église, se glissa dans le Cœur de l’Église et y est restée à l'intérieur : le Jansénisme.

La Révolution Française et Napoléon ont essayé de détruire la Papauté, mais ils en ont été incapables. Deux Papes, Pie VI et Pie VII, ont été exilés de Rome et emprisonnés. En 1799, quand Pie VI est mort à Valence, le conseil municipal a communiqué la nouvelle de sa mort par écrit au Directoire en déclarant que le dernier Pape dans l'histoire avait été enterré.

De Boniface VIII, le dernier Pape Médiéval jusqu’à Pie XII, le dernier Pape de l'ère pré-conciliaire, il y a eut 68 Papes, desquels seulement deux ont été canonisés par l'Église à ce jour : Saint Pie V et Saint Pie IX ; deux béatifiés : Pie IX et Innocence XI. Tous se sont retrouvés au milieu de tempêtes furieuses. Saint Pie V a combattu contre le Protestantisme et a animé la Ligue Sainte contre l'Islam, obtenant la victoire de Lépante ; le Bienheureux Innocence XI a combattu le Gallicanisme et a été l'artisan derrière la libération de Vienne par les Turcs en 1683. Le grand Pie IX a courageusement résisté à la Révolution Italienne qui, en 1870, lui a arraché la Ville Sainte. Saint Pie X a combattu une nouvelle hérésie — le Modernisme — la synthèse de toutes les hérésies — qui a profondément infiltré l'Église entre le XIXe et le XXe siècle.

Vatican II, initié par Jean XXIII et conclu par Paul VI, a proposé l'inauguration d'une nouvelle ère de paix et de progrès pour l'Église, mais le Post-Concile s’est avéré être l'une des périodes les plus dramatiques de la vie de l'Église. Benoît XVI, en utilisant une métaphore de Saint-Basile [1], a comparé l’époque Post-Conciliaire à une bataille navale se livrant pendant la nuit au cours d’une tempête en mer. Ceci est l'âge dans lequel nous vivons.

La foudre qui a frappé Saint-Pierre le 11 février 2013, le jour même où Benoît XVI a annoncé sa démission, est comme le symbole de cette tempête qui semble avoir englouti le Barque de Pierre et engloutit la vie de tous les fils et les filles de l’Église.

L'histoire des tempêtes dans l'Église est l'histoire des persécutions qu'Elle a souffertes, mais c’est aussi l'histoire des schismes et des hérésies qui, depuis leur création ont miné Son unité interne. Les attaques internes ont toujours été plus graves et plus dangereuses que les attaques externes. Les plus graves de ces attaques, les deux tempêtes les plus terribles, furent l'hérésie arienne du Quatrième Siècle et le Grand Schisme d'Occident du Quatorzième Siècle.

Dans le premier cas, la population Catholique ne savait pas où la vraie Foi se situait tant les Évêques étaient divisés, entre ariens, semi-ariens, et qui plus est, les anti-ariens avec les Papes ne s’exprimaient pas clairement. Ce fut alors un Saint Jérôme qui a inventé l'expression selon laquelle : « Le monde entier se réveilla et gémit dans l'étonnement de se retrouver Arien » [2].

Dans le second cas, la population Catholique ne savait pas qui était le vrai Pape alors que les Cardinaux, les Évêques, les Théologiens, les Souverains et même les Saints suivaient différents Papes. Personne ne niait la Primauté Papale et ce n’était donc pas à propos d’une hérésie, mais tout le monde suivaient deux ou même trois Papes et donc se sont retrouvés dans cette situation de division ecclésiale que la théologie définit comme un schisme.

Le Modernisme était potentiellement une plus grande crise que les deux précédentes, mais il n'a pas explosé dans toute sa virulence pour la raison qu'il a été partiellement écrasé par Saint Pie X. Il est disparu pendant quelques décennies mais a resurgi en force pendant la Second Concile Vatican II. Ce Concile, le dernier dans l'Église qui a eu lieu entre 1962 et 1965, a choisi d'être un Concile pastoral, mais à cause de la nature ambiguë et équivoque de ses textes, il a entraîné des résultats pastoraux catastrophiques.

La crise actuelle vient directement du Concile Vatican II et a son origine dans la primauté de la praxis (note : praxis= la pastorale ou la pratique auprès des fidèles) sur le dogme confirmée par le Concile Vatican II.

Jean XXIII dans son discours d'ouverture au Concile, le 11 octobre 1962 a présenté la nature pastorale de Vatican II, la distinction entre « le Dépôt ou les Vérités de la Foi » et « la façon dont elles sont présentées, leur signification étant préservée intacte [...]. »

Tous les vingt Conciles précédents avaient été pastoraux alors qu’ils avaient eu une forme dogmatique et normative en parallèle à la dimension pastorale. Au Vatican II, la pastorale n’était pas seulement l'explication naturelle du contenu dogmatique du Concile par des moyens adaptés aux temps ; au contraire, la « pastorale » a été élevée comme un principe alternatif au dogme. Le résultat a été une révolution dans le langage et la mentalité ainsi qu’une transformation de la pastorale en une nouvelle Doctrine.

Parmi les disciples les plus fidèles de l '« esprit du Concile », il y a le Cardinal Allemand Walter Kasper. Ce fut à lui précisément que François a confié la présentation du rapport d’introduction lors de la discussion au Consistoire pré-synodal de février 2014. La base de ce rapport est l'idée que ce n'est pas la Doctrine sur l'indissolubilité du mariage qui doit être changée, mais l'approche pastorale des divorcés remariés. La même formulation a été utilisée par le Cardinal Kasper en commentant l’Exhortation Post-Synodale du Pape François, Amoris Laetitia. Le Cardinal Kasper a expliqué que l’« Exhortation apostolique du Pape » ne change rien à la Doctrine de l'Église ou du Droit Canon, mais ça change tout »[3].

La boussole du Pontificat du Pape François et la clé de lecture de sa dernière Exhortation apostolique Post-Synodale, est sur le principe du changement nécessaire — pas dans la Doctrine — mais dans la vie même de l'Église. Pourtant, pour soutenir la non-pertinence de la Doctrine, le Pape a produit un document de 250 pages, où il présente une théorie sur la primauté de la pastorale. Le 16 avril, lors de son retour de Lesbos, le Pape a suggéré aux journalistes de lire la présentation du Cardinal Schönborn sur Amoris Laetitia, lui assignant l'interprétation authentique de l'Exhortation. Lors de la conférence de presse le 8 avril, quand il présentait le document, le Cardinal Schönborn a défini l’ Exhortation pontificale, tout d'abord, comme « un événement linguistique ».

Cette formulation n’est pas nouvelle : elle a déjà été utilisée par l'un des confrères de François, le Jésuite John O'Malley de l'Université de Georgetown. Dans son étude histoirique de Vatican II, O 'Malley a défini le Concile Vatican II comme un « événement linguistique » [4], une nouvelle façon d'exprimer [les choses] et qui, selon l'historien Jésuite « a marqué une rupture définitive avec les Conciles précédents » [5]. De dire [que c’était] un événement linguistique, d’expliquer O'Malley, ne signifie pas de minimiser l'ampleur révolutionnaire de Vatican II, puisque le langage est un enseignement en soi. Les dirigeants du Concile « [...] ont très bien compris que Vatican II, après s’être proclamé lui-même un Concile pastoral, [que] c’était précisément pour cela qu’il était également un Concile d'enseignement (...). Le style discursif du Concile était les moyens, mais les moyens communiquaient le message » [6].

Le choix d'un « style » de langage pour communiquer avec le monde contemporain révèle une manière d'être et de penser, et en ce sens, il faut admettre que le genre littéraire et le style pastoral de Vatican II expriment non seulement l'unité organique de l'événement, mais aussi ils sont le véhicule implicite d'une Doctrine cohérente. « Le style — O'Malley le rappelle — est l'expression ultime de la signification, c’est la signification seulement — pas d'ornement — mais c’est également l'instrument herméneutique par excellence ». [7].

Cette révolution dans le langage ne consiste pas seulement dans le changement de sens dans les mots, mais dans l'omission de certains termes et concepts. De nombreux exemples peuvent être donnés. Par exemple : affirmer que l'enfer est vide est certainement une proposition téméraire sinon hérétique. À omettre ou à limiter au maximum toute référence à l'enfer ne formule ainsi aucune proposition erronée mais constitue une omission qui fait place à l’erreur encore plus grande qu'un enfer vide : ça projette en effet l'idée que l'enfer n'existe pas puisque personne n’en parle ; et, ainsi, ce qui est ignoré, c’est comme si ça n'existait pas.

François n'a jamais nié l'existence de l'enfer mais, en trois ans, il l’a mentionné seulement une couple de fois, d'une manière très inappropriée et, en déclarant dans Amoris laetitia que « la route de l'Église est celle de ne condamner personne éternellement » (n. 296) ; il semble nier la damnation éternelle des pécheurs. Est-ce que cette ambiguïté n’a pas la même valeur pratique qu’un déni théorique ?

Rien ne change dans la Doctrine mais, dans la pratique, tout est changé. Mais si vous ne voulez pas nier le principe de causalité sur lequel l'ensemble de l'édifice de la connaissance occidentale est fondée, il est nécessaire d'admettre que tout effet a une cause et que de toute cause il y a des conséquences. La relation de cause à effet est celle entre la théorie et l'action, entre la Doctrine et la pratique. Parmi ceux qui ont très bien compris est l'Évêque Dominicain d'Oran, Mgr Jean-Paul Vesco. Dans une interview à La Vie, il a dit qu’avec Amoris Laetitia « rien ne change dans la Doctrine de l’Église et pourtant tout change dans le rapport de l’Église au monde » [8]. De nos jours — souligne l'Évêque d'Oran — le confesseur ne sera pas capable de refuser l'absolution à ceux qui sont convaincus en conscience que leur situation irrégulière est la seule — ou tout au moins la meilleure possible. Les circonstances et la situation, après la nouvelle morale, dissolvent le concept de mal intrinsèque et de péché public et permanent.

Si les prêtres cessent de mentionner le péché public et encouragent les adultères et les gens en cohabitation à intégrer la communauté Chrétienne, sans exclure leur accès aux Sacrements, [alors] selon la pratique pastorale, la Doctrine est nécessairement modifiée aussi. La norme de l'Église était que « les divorcés, les remariés civilement, qui vivent ensemble, ne peuvent pas recevoir l'Eucharistie ». Amoris Laetitia en revanche, établit « les divorcés remariés, dans certains cas, peuvent recevoir la Sainte Communion ».

Le changement est non seulement dans les faits, il est dans le principe. Une seule exception est suffisante dans la pratique pour changer le principe. Comment peut-on nier que cette Révolution dans la praxis n’est pas aussi une Révolution dans la Doctrine ? Mais même si rien ne change dans la Doctrine, nous savons ce qui va changer dans la pratique : le nombre de communions sacrilèges va augmenter ; le nombre de confessions non valides va augmenter ; le nombre de péchés graves commis contre la sixième et neuvième commandements augmentera ; le nombre d'âmes qui iront en enfer augmenteront ; et tout cela ne se passera pas contre, mais en raison de Amoris laetitia.

À Fatima, Notre-Dame a montré aux trois petits bergers la vision terrifiante de l'enfer là où vont les âmes des pauvres pécheurs et il a été révélé à Jacinta que le péché qui conduit le plus les âmes à l'enfer est celui contre la pureté. Qui aurait pu imaginer qu’au grand nombre de péchés déjà impurs, il s’ajouterait la diffusion du « mariage de droit commun » souvent ratifié civilement ? Et qui aurait pensé que cet état serait soutenu par une exhortation papale ? Pourtant, c'est ce qui est arrivé. On ne peut pas faire semblant de ne pas le voir ...

L'Église a une mission pratique : le salut des âmes. Comment les âmes sont-elles sauvées ? En les persuadant de vivre en conformité avec la Loi de l'Évangile.

Le démon aussi a un objectif pratique : la perte des âmes. Comment les âmes sont-elles perdues ? En les persuadant de vivre en déformation de la Loi de l'Évangile.

Après la Résurrection, Jésus est apparu à ses disciples sur les monts de Galilée. Il leur a donné la mission de baptiser au Nom de la Très Sainte Trinité, Père, Fils et Saint-Esprit, et d'enseigner et d'observer Sa Loi, sans porter atteinte à toute précepte : « docentes eos, servare omnia » (note : enseignez-leur à pratiquer tout ce que je vous ai commandé.) (Mt 28 : 19-20). « Celui qui croira et sera baptisé — sera sauvé — Il ajoute — mais celui qui ne croira pas sera condamné » (Marc 16 :16).

La tâche des Prêtres est d'enseigner et d'observer la loi, non pas de cesser de l'appliquer, non plus de trouver des exceptions qui la violent. Celui qui croit mais qui, dans ses œuvres, contredit la Foi dans laquelle il croit, sera condamné, comme ceux, selon Saint Paul, qui « affirment connaître Dieu, mais leurs actions prouvent le contraire. Ils sont détestables, rebelles et incapables de faire aucune action bonne ». (Ad Titum, I, 16).

Pour exprimer un jugement négatif sur l’Exhortation apostolique Amoris laetitia, il n’est pas nécessaire d'avoir étudié la théologie, le sensus fidei qui résulte du Baptême et de la Confirmation est tout à fait suffisant. Le sensus fidei nous amène, par instinct surnaturel, à refuser ce document, laissant la tâche d'appliquer les notes théologiques adéquates aux Théologiens.

Entre l’hérésie et l’orthodoxie, il y a beaucoup de gradations possibles. L’hérésie est l'opposition ouverte, formelle, persistante à une vérité de la Foi. Cependant, il y a des propositions doctrinales qui, sans être hérétiques explicitement, sont censurées par l'Église avec des qualifications théologiques proportionnées à leur gravité et à leur contraste avec la Doctrine Catholique [9]. L'opposition à la vérité, en fait, présente des degrés différents, selon qu'elle est directe ou indirecte, immédiate ou à distance, ouverte ou cachée, et ainsi de suite. Les « censures théologiques » transmettent le jugement négatif de l'Église sur une expression, une opinion ou une doctrine théologique entière. Elles considèrent le contenu doctrinal : des propositions hérétiques, proches de l'hérésie, savourant l'hérésie, erronées dans la Foi, téméraires ; elles considèrent la forme, pour lesquelles les propositions sont jugées équivoques, ambiguës, chicaneuses, suspectes, à mauvaise résonnance, etc. ; elles considèrent les effets qu'ils peuvent produire pour les circonstances particulières de temps et de lieu. Dans un tel cas, les propositions sont censurées comme perverses, corrompues, scandaleuses, dangereuses, séduisantes aux simples. Dans tous ces cas, la vérité doctrinale Catholique manque d'intégrité ou elle est exprimée d'une manière déficiente et inadéquate.

Dans une de ses réflexions, le 16 avril 2016, le Père Jean-Michel Gleize, fait référence au numéro 299 de Amoris laetitia, selon lequel : « Les baptisés divorcés et remariés civilement doivent être davantage intégrés dans les communautés chrétiennes selon les diverses façons possibles, en évitant toute occasion de scandale » (§ 299) et commente : « Selon les diverses façons possibles : « Pourquoi pas, alors, les admettre à la Communion Eucharistique ? S’il n’est plus possible de dire que les divorcés remariés vivent dans un état de péché mortel (301), pourquoi le fait de leur donner la Communion est une occasion de scandale ? Et à ce moment-là, pourquoi leur refuser la Sainte Communion ? L'Exhortation Amoris Laetitia se déplace clairement dans cette direction. Ce faisant, elle représente une occasion de ruine spirituelle pour l'Église entière ; ou en d'autres termes, ce que les théologiens appellent un « scandale » dans le plein sens du terme. Et ce scandale est la conséquence d'une relativisation pratique de la vérité de la Foi Catholique concernant la nécessité et l'indissolubilité de l'union sacramentelle du mariage ». [10]

Amoris Laetitia est un document scandaleux, avec des effets catastrophiques pour les âmes.

Nous ne manquons pas de respect pour le Pape et encore moins nous ne mettons la Primauté Papale en doute. Nous devons être profondément reconnaissants au bienheureux Pie IX pour avoir défini, au Premier Concile de Vatican, deux dogmes qui nous permettent de faire face clairement à la crise actuelle : le dogme de la Primauté Romaine et le dogme sur l'infaillibilité pontificale.

La Primauté du Pape en matière de gouvernance avec l'infaillibilité de son magistère constituent la base sur laquelle Jésus Christ a institué Son Église et sur lesquels Elle va rester ferme jusqu'à la fin des temps. Cette Primauté a été conférée à Pierre, Prince des Apôtres, après la Résurrection (Jean, 21 : 15-17) et elle a été reconnue par l'Église primitive, non pas comme un privilège personnel et transitoire mais comme un élément permanent et essentiel de l'Église de Constitution Divine.

Il n'y a pas d'autorité supérieure sur terre que celle du Pape, pour la raison qu'il n'y a pas de fonction plus élevée et pas de mission plus élevée sur terre. Quelle mission ? Celle de confirmer les frères dans la Foi, d'ouvrir le Ciel aux âmes, de paître le troupeau d'agneaux et de brebis qui appartiennent aux Christ, Lui qui est le Bon Pasteur Suprême : en bref — le gouvernement de l'Église.

Le Pape est celui qui gouverne l'Église. Cette mission lui vient du fait qu’il est le successeur de Saint Pierre à qui Jésus a confié la mission en tant que chef visible de l'Église. Une mission qui transcende sa personne car elle sera poursuivie par ses successeurs.

Le Pape n’est pas le successeur du Christ, il est le successeur de Pierre et non d'une façon immédiate, mais à travers la succession apostolique, qui, en l'espace de vingt siècles, le lie à Pierre, Prince des Apôtres et le premier Vicaire du Christ.

Le Vicaire du Christ est l'Évêque de Rome non pas parce que Rome est une ville ou un diocèse comme tout autre : elle a une vocation universelle. Les successeurs de Pierre sont Évêques de Rome puisque, par la disposition de Dieu, Saint Pierre est venu à Rome et en mourant à cet endroit, il a ouvert, pour les Évêques de Rome, la succession légitime et sans interruption de sa primauté universelle.

Tous les Évêques ont la plénitude des Saints Ordres et le Pape, sous cet aspect n’est pas supérieur aux autres Évêques, il est pareil à eux. Toutefois, seul le Pape a le pouvoir suprême de juridiction qui lui confère le pouvoir complet et illimité sur tous les autres Évêques.

Le Premier Concile du Vatican a établi comme un dogme de Foi, la primauté complète, illimitée et universelle du Pape sur tous les Évêques du monde. La primauté de juridiction est l'autorité dirigeante du Pape et comprend l'autorité de l'enseignement du Pape. En 1870, le Premier Concile du Vatican, après le dogme de la Primauté Romaine, a promulgué le dogme sur l'infaillibilité du magistère du Pape dans des conditions données. L’infaillibilité est cette prérogative surnaturelle selon laquelle le Pape et l'Église ne peuvent pas se tromper en professant et en définissant la Doctrine révélée — par voie de l'assistance divine spéciale — attribuée à l'Esprit Saint. Et le Pape, qui n’est pas infaillible à gouverner l'Église, peut être infaillible dans ses enseignements pontificaux.

Le Pape n’est pas toujours infaillible. Il doit vouloir l’être et, s’il veut l’être, il doit respecter des règles déterminées. Les conditions d'infaillibilité ont été précisées par la Constitution Pastor Aeternus : le Pape doit parler comme une personne publique, ex cathedra, avec l'intention de définir une vérité de Foi ou de morale et de l'appliquer comme étant obligatoire pour tous les fidèles à la croire.

Si ces conditions ne sont pas remplies, ça ne signifie pas que le Pape est erroné. Au contraire, nous devons avoir, en principe, un préjudice favorable à son égard. Cependant, quand le Pape n’est pas infaillible, il peut commettre des erreurs dans son administration et dans son enseignement. Le Magistère extraordinaire que l'on appelle ex cathedra par le Pape, est toujours infaillible. Un exemple est représenté par les deux dogmes de l'Immaculée Conception et de l'Assomption. Mais, aussi le Magistère ordinaire du Pape peut être infaillible, quand il réitère une vérité dans la Foi ou de la morale qui a été enseignée pendant des siècles par l'Église.

Tel est le cas de l'encyclique Humanae Vitae, qui n’est pas infaillible en elle-même, car elle n’est pas un acte ex cathedra du Souverain Pontife, mais elle est infaillible du fait qu’elle réitère la condamnation millénariste de la contraception artificielle par l’Église. Si un enseignement de l'Église est universel, non pas tant dans l'espace autant que dans l’espace temps — quand il est confirmé par la Tradition — cela signifie qu'il a été assisté par le Saint-Esprit.

Le Saint-Esprit aide les Cardinaux en conclave quand ils élisent un Pape, puis une fois le Pape élu, le Saint-Esprit l'assiste dans l'exercice de son gouvernement et du Magistère. Pourtant, comme l'histoire l’enseigne, malgré cette assistance, des Papes indignes peuvent être élus qui, dans leur vie privée ont pu avoir péché, même gravement, tout comme des Papes qui ont erré dans leur gouvernance et même dans leur Magistère peuvent être élus ; mais cela ne doit pas nous scandaliser. Même si la Providence permet un mauvais Pape d'être élu, ceci arrive pour des fins plus élevées et mystérieuses qui ne seront clarifiées seulement qu’à la fin des temps. Le Saint-Esprit sait tirer le bien du mal.

Le Salut, que les théologiens appellent la justification, est né de la rencontre mystérieuse entre la volonté de l'homme et de la grâce divine. Ceux qui pensent que, dans la vie d'un homme, l'action du Saint-Esprit est suffisante pour qu’ils soient sauvés sans la collaboration de leur propre volonté, prennent une position Luthérienne ou Calviniste.

Ceux qui soutiennent que le Pape ne peut pas se tromper parce qu’il est infailliblement assisté par le Saint-Esprit, répètent l'erreur sur la grâce des Calvinistes.

La papolâtrie est un péché parce qu'elle transforme Pierre en Christ. En attribuant au Pape la perfection et l'infaillibilité de tout acte et de toute parole, ça signifie le diviniser et la divination du Pape n'a rien à voir avec la vénération que nous devons à sa personne. La dévotion au Pape, comme la dévotion à Notre-Dame, est un pilier de la spiritualité Catholique. Cependant, la spiritualité doit avoir un fondement théologique et, avant même cela, un fondement rationnel. Afin de vénérer le Pape, nous devons savoir qui il est et qui il n’est pas.

Le Pape n’est pas, comme Jésus-Christ, l’Homme-Dieu. En lui, il n'y a pas de divinité qui absorbe son humanité. Il ne possède pas deux natures, l'une humaine et une divine en une seule personne. Le Pape n'a qu'une seule nature et une seule personne, il est un être humain : il a la tache du péché originel et, au moment de son élection, il n’est pas confirmé en grâce. Il peut pécher et il peut se tromper, comme tous les hommes, mais ses péchés et ses erreurs sont plus graves que tous les autres hommes, non seulement à cause des plus grandes conséquences qu’ils ont, mais parce que chacun de ses actes qui ne correspond pas à la Grâce Divine est d'autant plus grande dans la mesure où l'aide qu’il reçoit de l'Esprit Saint est plus grande.

Pourtant, hormis la Primauté Romaine et l'infaillibilité, il y a une troisième vérité de la Foi qui peut être considérée comme dogme, même si l'Église ne l’a jamais proclamé avec un décret extraordinaire : le dogme de l'indéfectibilité de l'Église. Cette indéfectibilité est confirmée par Jésus-Christ Lui-même quand il a dit : « Tu es Pierre et sur cette pierre Je bâtirai Mon Église et les portes de l'enfer ne prévaudront pas contre Elle » (Mt 16, 18.).

Qu'est-ce que l’indéfectibilité signifie ? Cela ne signifie pas que l'Église ne peut pas faire des erreurs. Cela signifie, comme les Théologiens l’expliquent, que l'Église arrivera à la fin du monde identique à Elle-Même, sans changement dans l'essence que Jésus Christ Lui-même Lui a donnée .

L’indéfectibilité est la propriété surnaturelle de l'Église, ce qui signifie que non seulement Elle ne disparaîtra pas, mais Elle ne changera pas, elle restera exactement comme Jésus Christ L’a instituée jusqu'à la fin du monde. L'Église restera toujours avec Ses caractéristiques, Sa Constitution, Son enseignement — identique à Elle-même : une dans la Foi, monarchique et hiérarchisée dans sa forme, visiblement organisée, perpétuellement durable, identique pour tous les hommes et tous les temps, sans conversion ou re-conversion qui soient possibles. Le décret Lamentabilis de Saint Pie X a condamné les Modernistes à cet effet par sa proposition 53 dénonçant cette affirmation : «La constitution organique de l'Église n'est pas immuable ; mais la société chrétienne est soumise, comme la société humaine, à une perpétuelle évolution ».

L'Église est indéfectible et pourtant, dans Sa partie humaine, Elle peut commettre des erreurs et ces erreurs, ces souffrances, peuvent être causées par Ses enfants et même par Ses ministres.

Cela peut se produire lorsque l'institution se confond avec les hommes qui la représentent. La force de la papauté ne découle pas de la Sainteté de Pierre, tout comme la défection de Pierre ne signifie pas Sa faiblesse ; car c’était à la personne publique du Pape, et non à sa personne privée, que Jésus a dirigé Ses paroles « Tu es Pierre et sur cette pierre Je bâtirai Mon Église ».

Le Pape n’est pas Jorge Bergoglio, ni Joseph Ratzinger. Il est, avant tout, comme le Catéchisme nous l’enseigne, le successeur de Pierre et le Vicaire de Jésus-Christ sur terre. Cela n’enlève rien à la grandeur et l’indéfectibilité du Corps Mystique du Christ. La Sainteté est une caractéristique indéracinable de l'Église, mais cela ne signifie pas que ses pasteurs, même les pasteurs suprêmes sont impeccables compte tenu de leur vie personnelle ou même dans l'exercice de leur mission.

Quand Jésus dit que les portes de l'enfer ne prévaudront pas, Il n’a pas promis ici qu'il n'y aurait pas d'attaques de la part de l'enfer. Il nous permet plutôt d’avoir un aperçu de l'existence d'une bataille acharnée. Il n'y aura pas d’absence de combats, mais il n'y aura pas de défaite [Non plus]. L'Église triomphera.

L’oeuvre principale de l'enfer est l’hérésie. L’hérésie ne prévaudra pas sur la Foi de l'Église.

Le dogme de l'indéfectibilité nous réfère à deux vérités : la première est que l'Église vit continuellement au milieu des conflits et est sujette à des attaques de ses ennemis : la seconde est que l'Église va vaincre Ses ennemis et conquérir l’histoire. Pourtant, sans lutte, il n'y a pas de victoire, ce qui est une vérité qui nous concerne, car elle touche nos vies en tant que fils et filles de l'Église, mais même comme hommes et femmes simplement.

La phrase « les portes de l'enfer ne prévaudront pas » est le même que « À la fin, Mon Cœur Immaculé triomphera » prononcée par Notre-Dame de Fatima. Un événement qui célèbre son 99e anniversaire cette année.

Le 3 Janvier 1944, Notre-Dame a adressé des paroles prophétiques à Sœur Lucie, en prière devant le Tabernacle.

Sœur Lucie raconte : « Je sentais mon esprit inondé par un mystère de lumière qui est Dieu et en Lui, j'ai vu et entendu la pointe d'une lance comme une flamme qui se détachait et touchait l'axe de la terre et elle trembla : les montagnes, les villes et les villages avec leurs habitants étaient enterrés. La mer, les rivières et les nuages dépassaient leurs limites, inondant et en entraînant avec eux, dans un tourbillon, les maisons et les gens dans un nombre qui ne peut pas être compté ; c’est la purification du monde du péché dans lequel il est immergé. La haine, l'ambition provoquent la guerre destructrice. Après j’ai senti battre mon cœur et dans mon esprit une voix douce me disait : « Dans le temps, une seule Foi, un seul Baptême, une seule Église, Sainte, Catholique, Apostolique. ! Dans l'éternité, le Ciel » Ce mot « le Ciel » a rempli mon cœur avec la paix et le bonheur d'une manière telle que, presque sans en avoir conscience, je me le suis répété pendant une longue période : le Ciel, le Ciel ! ! »[11]

« Une Foi, un seul Baptême, une seule Église, Catholique, Apostolique », les paroles de Notre-Dame sont les mêmes que le Pape Boniface VIII dans sa bulle, Unam Sanctam, dans laquelle, à la fin du Moyen-Age, il a réitéré le caractère unique de l'Église dans l’œuvre de la rédemption : « La Foi nous oblige à admettre et à conserver qu’il n'y a qu'une seule Église, Sainte, Catholique et Apostolique (...) en dehors de laquelle nous ne trouverons pas le salut, ni la rémission des péchés (...). En Elle, il n'y a qu'un seul Seigneur, une seule Foi, un seul Baptême (Eph. 4,5) [12] »

Et l'exclamation ultime : « Ciel ! Ciel ! » semble se référer au choix dramatique entre le Ciel, le lieu où les âmes sont sauvées et qui atteignent le bonheur éternel par rapport à l'enfer, l'endroit où les damnés subissent des souffrances pour l'éternité.

L'Église n’ouvre pas les portes de l'enfer, mais les portes du Ciel.

L'Église comprend non seulement le Pape et les Évêques, mais tous les fidèles : les prêtres, les religieuses, les frères religieux et les laïcs. L'assistance divine Lui est accordée jusqu'à la fin du monde et cela va L'empêcher de se perdre ou de s’affaiblir. Cela signifie que l'Église, dans l'histoire, peut avoir des moments de désorientation et de défection, mais vu dans son ensemble, elle ne conduira jamais les fidèles à la perdition.

Jésus, après Sa Résurrection, apparaît une seconde fois au lac de Tibériade et dit à ses apôtres : « Ecce ego vobiscum somme omnibus diebus, usque ad consummationem saeculi » (Mt 28, 20.). Voici, Je suis avec vous tous les jours jusqu'à la fin des temps.

Ces Paroles ne confirment pas seulement que l'Église est indéfectible, étant donné qu'Elle est divinement assistée, mais elles nous rappellent aussi que Dieu ne nous donne pas une loi inapplicable. Jésus est avec nous, chaque jour, dans toutes les situations, dans toutes les circonstances. Pratiquer la loi n’est pas impossible parce que tout est possible avec l'aide de la Grâce de Dieu. Voilà ce que nous aimerions que le Pape nous rappelle, nous confirmant ainsi dans la Foi.

Jamais, comme à cette époque, avons-nous senti tellement besoin d'une assise, d’une lumière qui nous dirige, d’un roc contre lequel nous pouvons nous ancrer. Et ce Rocher ne peut être que Pierre. Pierre, pas Simon. De Pierre, nous cherchons l'essence, le sens et l'immuable. Les hommes, tous les hommes, même les plus grands, passent. Il reste les principes et, parmi ceux-là, il en est un qui soutient tous les autres : la Primauté Romaine. Nous savons parfaitement que seule une voix suprême et solennelle peut mettre un terme au processus d'auto-démolition en action : la voix du Pontife Romain, le seul à qui est accordé la possibilité de définir la Parole du Christ, se faisant un porte-parole infaillible de la Foi. Nous savons [aussi] qu'un Pape peut contribuer à l'auto-démolition de l'Église, en tombant même dans l'hérésie et, dans ce cas, notre conscience nous oblige à lui résister.

Amoris laetitia attribue à la conscience une place essentielle et unique dans l'évaluation des actions morales (§ 303). Cependant, Amoris laetitia libère la conscience de l'objectivité de la morale alors que c’est sur la morale, la Foi et la raison que nous voulons enraciner nos choix. La lumière de la Foi, comme la lumière de la raison, ne sont pas extrinsèques à nous ; elles illuminent le cœur et la conscience de chaque et unique personne baptisée alors que la conscience n’est rien d'autre que la voix de la vérité dans notre âme. Pour cette raison, l'amour illimité que nous avons pour le Pape ne peut jamais nous amener à aller contre notre conscience.

Le Jour du Jugement, nous serons seuls devant Dieu, avec notre conscience, sans Pape ni Évêque, ni parents et amis, ni aucune possibilité de nous mentir à nous-mêmes et à d'autres, et le regard de Dieu percera et illuminera notre conscience comme un éclair de la foudre. Ceux qui suivent leur conscience avec pureté d'intention, possédant les données objectives sur la Foi et la raison comme critères de jugement, ne peuvent pas se tromper, étant donné que Dieu a déjà illuminé le chemin. Il l'éclaire avec le Don de la Foi et le Don de la raison par laquelle raison la Foi est soutenue. Nous ne pouvons rien faire qui va contre la Foi et de la raison ; rien qui ne soit en quelque sorte contradictoire, ambiguë, équivoque, puisque Dieu n’est pas contradictoire. Il est lumineux, simple, Il est égal à lui-même, dans son unité et dans sa Trinité.

La Barque de l'Église semble qu’elle ait été engloutie par les vagues et le Seigneur semble dormir [de manière] similaire à ce jour de la tempête sur le lac de Tibériade. Tournons-nous alors vers Lui, en disant : Exsurge, quare obdormis Domine? Exsurge (Ps. 42, 23). Levez-vous, Seigneur. Pourquoi est-ce que Vous semblez être comme quelqu’un endormi ?

Peut-être que ce fut l'appel que Sainte Catherine de Sienne Lui a fait en face de la mosaïque de Giotto dans ce lointain janvier de 1380. Et peut-être que ce n’est pas une coïncidence qu’en cette année, l'heure traditionnelle de l'Adoration du Saint-Sacrement pour les participants de la Marche pour la Vie, a lieu dans la Basilique de « Santa Maria sopra Minerva », où, sous le maître-autel, le corps de Sainte Catherine de Sienne repose.

En cette heure d'adoration, demandons de l'aide non seulement pour la Marche pour la Vie, mais aussi pour la Sainte Mère Église avec un intense appel au Seigneur : « Exsurge, obdormis quare Domine ? Exsurge ! »



[1] Saint-Basile, De Spiritu Sancto, XXX, 77, PG, XXXII, col. 213.

[2] S. Girolamo, Dialogus de lucifériens, n. 19, PL, 23, col. 171. « Ingemuit totus orbis, et Arianum est Miratus esse est »

[3] Vatican Insider, le 14 Avril 2016

[4] John O'Malley, Qu'est-il arrivé à Vatican II. Vie et Pensées, Milan 2010, p. 313.

[5] Ivi, p. 47.

[6] Ivi, p. 314.

[7] Ivi, p. 51

[8] http ://www.lavie.fr/religion/Catholicisme/jean-paul-vesco-dans-amoris-laetitia-le-Pape-appelle-a-une-revolution-du-regard-11-04-2016-72152_16.php

[9] Antonio. Piolanti, Pietro Parente, Dizionario di Théologie Dogmatique, Studium, Rome 1943, pp. 45-46

[10] Père Jean-Michel Gleize FSSPX, Amoris Laetitia, des considérations sur le chapitre 8 dans http ://sspx.org/en/amoris-laetitia-sspx-gleize

[11] Carmel de Coimbra, sob ou olhar Um Caminho de Maria, Edicoes Carmelo, Coimbra 2012, p. 267

[12] Boniface VIII, Bull, Unam Sanctam, 18 avril 1302, dans Denz-H, n.870.

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