Par: Phil Lawler
Phil Lawler a été journaliste Catholique depuis plus de 30 ans. Il a édité plusieurs revues Catholiques et écrit huit livres. Fondateur de World Catholic News, il est le directeur des nouvelles et analyste en chef à CatholicCulture.org.
SOURCE : Catholic Culture
Le 11 mai 2018
Sans exception, les personnes avec lesquelles j'ai parlé sur la question ont convenu que c’était stupidement spectaculaire pour le Vatican de s'impliquer dans le Met Gala. Ils ont tous vu venir le problème bien avant l'apparition des titres et des reportages photographiques.
Alors, comment est-ce arrivé ? Pourquoi les responsables du Vatican n'ont-ils pas anticipé le problème que mes amis ont vu ?
Eh bien, apparemment les gens avec qui je parle régulièrement n'ont pas le même point de vue sur ces choses que les décideurs du Vatican.
Soyons honnêtes : le clergé Catholique, et donc le Vatican, est fortement peuplé d'hommes qui sont fascinés par le monde de la mode, le monde du divertissement, le monde qui montre sa propre indulgence lors d'événements pailletés comme les Oscars et le Met Gala. Ainsi, les vêtements liturgiques prêtés par la collection du Vatican sont devenus la toile de fond d'une célébration de l'hédonisme. Les célébrités rivalisaient pour attirer l'attention des photographes, vêtus de faux habits épiscopaux, rivalisant pour être vus dans les costumes les plus outranciers. Madonna était là, en train de chanter « Like a Prayer », ce qui a été jugé approprié parce que la chanson parle de ... la prière, me disent-ils ; il s'agit de la prière ( bien que ceux qui entendent la chanson ou regardent la vidéo, pensent généralement à un autre sujet plus étroitement associé à Madonna ). Rihanna était là, berçant des vêtements pontifiés et montrant beaucoup de peau. Des dizaines de célébrités sont venues en costumes qui, d'une manière ou d'une autre, ont fait allusion simultanément à la liturgie Catholique et à la sexualité perverse.
Matthew Schmitz ( Éditorialiste en chef du site First Things ) a décrit la scène surréaliste dans le site First Things : « Les hommes dans des costumes de Thom Browne ( marque distinguée de vêtements pour homme ) et les femmes avec des sacs à main Chanel admiraient un masque de bondage drapé de chapelets et admiraient des mannequins vêtus de vêtements papaux avec traînes avant d'aller voir les vêtements sacrés portés par les Successeurs de Saint Pierre ».
Certains Catholiques ont naturellement considéré ce spectacle comme blasphématoire. D'autres, moins indignés, reconnaissaient encore que les célébrités se moquaient de la Foi ou, à tout le moins, exploitaient des symboles religieux pour leur propre amusement. Mais certains Catholiques ont vu l'événement comme un bon amusement — pas un bon amusement honnête, certes, mais encore plus excitant à cause de son atmosphère osée et chargée de sexualité.
Apparemment, le Conseil Pontifical pour la Culture, qui a pris la décision de prêter des vêtements au Metropolitan Museum of Art, pensait que l'exposition explorerait les arts liturgiques Catholiques. Le Conseil Pontifical pour la Culture n’a pas pensé non plus le fait que le projet serait dirigé par le rédacteur d'un magazine de mode, ni que le titre choisi pour l'exposition d'été (« Heavenly Bodies » [ Corps célestes ] ), avec son double sens, n’a pas suffi à ébranler la confiance des planificateurs du Vatican.
Néanmoins, même ces fonctionnaires du Vatican ont été complaisamment pris au dépourvu, comme Edward Pentin le rapporte dans le National Catholic Register, quand ils ont réalisé que leur collection du Vatican serait la toile de fond pour le Gala Met. Avoir des vêtements liturgiques exposés dans un musée célèbre est une chose ; inviter la foule Hollywoodienne à une fête costumée est toute autre chose.
Il y a encore beaucoup d'ecclésiastiques Catholiques influents ravis de pouvoir côtoyer des artistes afin de montrer leur volonté d'accueillir des approches alternatives à la sexualité humaine. L'omniprésent Père James Martin, SJ, aurait joué un rôle déterminant dans l'organisation de l'événement et, bien sûr, il était présent pour le Gala, annonçant joyeusement à son auditoire que l'un des fêtards l'avait félicité pour son costume de prêtre sexy. Oui, je parie en effet.
Le Cardinal Timothy Dolan, de New York, était sous le feu des projecteurs et un prélat de moindre importance aurait pu se sentir mal à l'aise. Mais le Cardinal Dolan, irrépressiblement jovial, était ravi de l'attention qui lui était portée. Il a déclaré à la Radio Sirius : « Je n'ai vraiment rien vu de sacrilège. J'ai peut-être vu des choses de mauvais goût, mais je n'ai décelé personne pour offenser l'Église ».
Qu'est-ce que le Cardinal a détecté alors ? Il a dit que les personnes avec qui il parlait ont été « certainement affables pour moi, elles étaient certainement gentilles avec moi et un certain nombre de personnes sont venues parler de leur éducation Catholique ». De cette preuve, le Cardinal a déduit que l'événement aidait ramener les fêtards à leurs racines Catholiques. Et si tel était le cas, alors l'exposition pourrait certainement être considérée comme une forme d'évangélisation, n'est-ce pas ?
Mais les célébrités Catholiques non pratiquantes ont-elles montré un intérêt à retourner à la pratique active de leur Foi ? Ou entretenaient-elles juste une conversation polie, divertissant le prélat affable avec des histoires de leurs premières années ? Bien sûr, George Clooney pourrait avoir de bons souvenirs de servir comme un servant de messe. Et j'ai de bons souvenirs des étés passés à jouer à Wiffleball ( variation du baseball pour espaces restreints avec balle trouée ) dans l'arrière-cour. Mais c'est de l'histoire ancienne maintenant.
« Quand une Foi vivante est traitée comme une pièce de musée », écrivait Ross Douthat pour le New York Times, « il est difficile pour ses adhérents de savoir s'il faut traiter ce moment comme une opportunité de rayonnement ou d'indignation ». Le Vatican a rendu très facile de traiter la Foi comme une pièce de musée, en participant à une exposition — un défilé de mode glorifié de fait — dans un musée.
Les vêtements liturgiques ne sont pas et n'ont jamais été pour la mode. Ils peuvent ( et devraient ) être beaux, mais ces vêtements sont bien conçus pour obtenir un effet à l'opposé de ce que recherchent les créateurs de mode. Les vêtements sacerdotaux sont destinés à montrer que le célébrant est mis à part de la vie quotidienne agissant en tant que Souverain Sacrificateur éternel, bien au-delà du royaume des tendances changeantes et des apparences superficielles.
Le Cardinal Dolan a dit à la Radio Sirius qu'il avait vu l'exposition Met comme une célébration de l'imagination Catholique. À quoi Matthew Schmitz a répondu à juste titre : « Ce que l'imagination sacramentelle devrait signifier, avant tout, c'est la Foi dans les Sacrements ». Cette Foi religieuse essentielle manquait manifestement à l'atmosphère du Met Gala. Et malheureusement, pas seulement lors de ce Gala.
Ma femme Leila a fait le point dans un message sur Facebook :
« Les beaux objets destinés au culte et à la Gloire de Dieu, exposés au Metropolitan Museum, ont été le débordement artistique d'une abondance d'amour — en particulier et particulièrement d'amour liturgique : l'amour de Notre-Seigneur dans la liturgie ».
« Pensez-y : toute personne pauvre aurait pu voir ces choses à tout moment, gratuitement, en allant à la Messe où de telles choses étaient présentes. Leur beauté a littéralement attiré tous et chacun à « voir » la Présence de Dieu ... Maintenant nous ne sommes manifestement plus capables de réaliser un tel objectif — pour la simple raison que la Liturgie a été réduite à un squelette le plus dépouillé qui soit en la dénudant de sa magnificence intérieure. Il n'y a malheureusement plus d'abondance à partir de laquelle une telle beauté pourrait s’épandre pour faire connaître sa splendeur ».
La liturgie Eucharistique est l'expression la plus complète de la Foi, « la source et le sommet » de la vie spirituelle Catholique, le banquet céleste rendu présent sur terre et le désir de rendre ainsi la liturgie belle — maintenant, chaque dimanche, chaque jour — est un excroissance naturelle d'une Foi active. Si les beaux vêtements ne sont vus que dans un musée, alors que l'expérience de la liturgie dominicale dans une paroisse typique est délibérément banale, alors, la beauté de la Foi Catholique, manifestée dans la vieille collection du Vatican, a été réduite à un artefact .
Les trésors de la collection du Vatican devraient refléter quelque chose de plus que l'art fait pour l'art. Pris seuls, ces objets artistiques ne commandent pas le respect ; c'est leur utilisation appropriée qui leur donne de la valeur. L'art sacré nous dirige vers ce qui est saint, vers l'autre. Sans la reconnaissance de cet « autre », comme l'a observé Ross Douthat dans sa chronique perspicace du New York Times, les produits de l'imagination Catholique peuvent facilement être perçus comme simplement bizarres. Je suppose qu'ils ont été perçus ainsi par la plupart de ceux qui ont assisté au gala. Et donc ils ont été embrassés parce que beaucoup de ces gens se délectent dans le monde de l'étrange.
Pour les Catholiques croyants, cependant, Douthat soutient qu '« il n'y a pas de chemin plausible qui n'implique pas plus de ce qui a été affiché et approprié et blasphémé à New York lundi soir, plus de ce qui a rendu le Catholicisme à la fois grand et étrange et qui pourrait le rendre à nouveau les deux ». Le Catholicisme ne peut pas prospérer en s'adaptant à la culture matérialiste régnante ; la Foi ne prospérera que lorsque le monde reconnaîtra dans l'Église le portail de « l'autre », du sacré, de l'éternel.
Les vêtements et les rituels, en eux-mêmes, ne peuvent pas atteindre ce but. La « voie de la beauté » est un chemin éprouvé de la Foi, mais elle ne mène que jusqu'à la porte. L'entrée dans la Foi Catholique, et donc dans l'imaginaire Catholique, exige l'acceptation d'un système de croyance, d'un engagement à vie, d'une affirmation joyeuse d'une Foi en désaccord avec l'hédonisme exposé au Met Gala.
Sans une expression de Foi qui n’éprouve aucun remords, qu’est-ce qui pourrait avoir sorti de cette collaboration entre le Vatican et l'industrie de la mode ? Est-ce que cet événement n'était pas toujours destiné à promouvoir une sorte d'appropriation culturelle ? La chorale de la Chapelle Sixtine a chanté pour l'élite culturelle New-Yorkaise : un public qui n'a aucun intérêt pour la Foi Catholique mais qui a saisi une autre occasion de s'amuser.
Le Cardinal Dolan a dit à la Radio Sirius qu'en se couchant après le Gala, il a demandé dans sa prière : « Une seule personne retournera-t-elle à la Foi après ce soir, mon Seigneur ? En raison de juste une fascination ou de quelque chose ? » Sans doute c'est possible ; l'Esprit se meut de manière imprévisible. Mais…
Au Gala, l'Église Catholique a rencontré le monde de la mode, le monde de l'éphémère, le monde de l'auto-promotion et de l'auto-indulgence. Le monde de la mode s'est montré pour ce qu'il est vraiment. L'Église ne l’a pas fait. Je rejoins le Cardinal Dolan en priant qu'au moins une personne soit revenue à la Foi Catholique. Mais je prie aussi pour qu’il n’y ait pas trop d'âmes qui se soient perdues ou ne s'éloignent encore plus loin. Et je me demande quand les dirigeants Catholiques reconnaîtront que l'évangélisation ne signifie pas rechercher l'affirmation d'une culture décadente, mais offrir une alternative.
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