SOURCE : Voice of the Family
Le 24 novembre 2015 (La Voix de la Famille) - Dans ce discours prononcé à la conférence « Voix catholique » organisée par le groupe Foi de Nos Pères, Matthew McCusker de Voix de la Famille (Voice of the Family ) discute de trois éléments clés de la stratégie « progressiste » déployés au Synode ordinaire: 1) l’argumentation concernant les changements de langage de l'Église, 2) l'obscurcissement des absolus moraux en insistant sur les « aspects positifs » des situations de péché et 3) les appels à la « décentralisation » de l'autorité doctrinale aux Conférences épiscopales. On y aussi décrit certaines des principales préoccupations soulevées par le rapport final du Synode. Cette conférence a été donnée à Limerick, en Irlande le 21 Novembre à 2015.
Introduction sur le Synode
Je suis ici aujourd'hui pour représenter la Voix de la Famille, une coalition de 26 organisations pro-vie et pro-famille, gérée par la Société pour la Protection des enfants à naître. Voix de la Famille a été créée en août 2014 par la Société pour la Protection des enfants à naître (SPUC) en raison de nos préoccupations croissantes face au Synode extraordinaire sur la Famille qui s’est tenu à Rome en octobre de l'année dernière. L’approche du Synode avait été dominée par la proposition faite au premier plan par le Cardinal Walter Kasper à savoir que les Catholiques divorcés et remariés civilement devraient être admis à la Sainte Communion sans modification de leur vie.
Une équipe de Voix de la famille était présente à Rome au long des deux Synodes extraordinaires en octobre 2014 et du Synode ordinaire en octobre 2015. Pendant ce temps, nous avons cherché à aider les Pères synodaux dans leur défense de la Doctrine Catholique sur la Famille et à aider le grand public à comprendre ce qui se passait en offrant un reportage précis et une analyse en profondeur.
Les deux Synodes ont été appelés à relever les défis de la famille et la mission de la famille dans le monde moderne.
Malheureusement les deux Synodes ont été en fait dominés par des tentatives visant à saper ou à modifier l'enseignement et la discipline de l'Église sur un large éventail de questions relatives au mariage, à la famille et à la sexualité humaine. Les deux assemblées ont été témoins de division entre les Pères synodaux qui désiraient maintenir l'enseignement Catholique et ceux qui voulaient le saper ou le modifier.
Malgré les efforts de certains Pères synodaux pour faire débattre les défis concrets de la famille, très peu d'attention a été accordée à ces menaces dans les documents officiels de deux Synodes.
Les questions qui ont été soit entièrement négligées ou ayant eu une attention insuffisante comprennent : l'avortement, la fécondation in vitro, les expériences sur les embryons, l'euthanasie, le suicide assisté, l'éducation sexuelle anti-vie anti-famille, les attaques contre les droits parentaux et la menace croissante à la liberté civile des citoyens de beaucoup de pays de l’Ouest qui souhaitent vivre des vies fidèles à la foi Catholique et à la loi naturelle.
Comme précédemment, beaucoup de discussions dans les médias et parmi les Catholiques concernés se sont centrées autour de la question de la réception de la Sainte Communion par les « divorcés remariés civilement ». Cependant, ce ne fut pas la seule question que les soi-disant Pères synodaux « progressistes » étaient déterminés à poursuivre en tant que telle.
Les discussions au Synode ordinaire de ce mois d’octobre ont été réalisées selon le contenu de l'Instrumentum Laboris, le document de travail du Synode. Voix de la Famille a produit une analyse détaillée de ce document et a conclu qu'il constituait une menace sérieuse pour l'intégrité de la Doctrine Catholique.
Nous avons soutenu dans notre analyse du document, qui se trouve sur notre site Web, que la clé de la compréhension de l'Instrumentum Laboris, et par extension des débats plus larges au Synode, pourrait être trouvée dans la déclaration suivante : « Que le principe « décrivant l'expérience synodale et indiquant la tâche à accomplir » est « de lire les Signes de Dieu et l'histoire humaine dans une fidélité double pourtant unique qu’implique cette lecture ».
Cette déclaration proclame que la tâche du Synode est d'être fidèle à deux sources différentes d'autorité : d'une part « les Signes de Dieu » et d'autre part les signes de « l'histoire humaine ». Par conséquent, ça place l'histoire humaine et les changements de la société humaine au fil du temps comme un objet de fidélité qui doit être obéi aux côtés de la fidélité due à Dieu.
C’est en vertu de ce principe que nous soutenons que l'Instrumentum Laboris et plusieurs des Pères synodaux cherchaient à mettre l'Église en conformité avec le monde moderne.
Si l'homme doit être fidèle à la fois aux « Signes de Dieu » et à « l'histoire humaine », il en résulte que chaque fois qu'il y a un conflit entre leurs demandes réciproques, un compromis doit être trouvé. Lorsque cette approche est adoptée, la loi morale naturelle n’est plus considérée comme immuable mais plutôt sujette à modifications au cours du temps.
La conséquence de ceci est que l'Instrumentum Laboris, qui était la base des travaux du Synode ordinaire, menace toute la structure de l'enseignement Catholique sur le mariage, la famille et la sexualité humaine.
L'Instrumentum Laboris a justement fait cela. Voici en quoi :
en sapant la Doctrine de l'encyclique Humanae Vitae, en proposant une fausse compréhension de la relation entre la conscience et la loi morale (paragraphe 137)
en discutant des méthodes artificielles de reproduction sans donner aucun jugement sur la moralité de ces méthodes ou toute référence à l'énorme perte de vies humaines qu'elles entraînent (paragraphe 34)
en préparant la voie à l'admission des « divorcés remariés » à la Sainte Communion sans modification de vie (paragraphes 120-125)
en réduisant l'indissolubilité du mariage au niveau d’un « idéal » (paragraphe 42)
en suggérant que la cohabitation a des « aspects positifs » et peut, dans une certaine mesure, être considérée comme une forme légitime d'union (paragraphes 57, 61, 63, 99, 102)
en préparant le terrain pour l'acceptation des unions de même sexe en reconnaissant la nécessité de définir « le caractère spécifique de ces unions dans la société » (paragraphe 8)
en adoptant des notions modernes laïques de « l'égalité des sexes » et en acquiesçant de la nécessité de « repenser les devoirs des conjoints » contribuant ainsi à la dissolution des structures traditionnelles de la famille (paragraphe 30)
et, enfin, en niant les pleins droits des parents en tant que premiers éducateurs de leurs enfants (paragraphe 86).
Ce document a été, comme je l'ai dit, la base de discussion au Synode ordinaire. Et ce fut cette approche précisément qui était évidente alors qu'un nombre important de Cardinaux et d'Évêques ont travaillé énergiquement à amener l'objectif de l'enseignement Catholique en conformité avec les principes qui prévalent dans l'Occident moderne laïque. Cependant il y avait une forte résistance offerte par d'autres Pères synodaux, en particulier ceux d'Afrique et d'Europe de l'Est, qui étaient déterminés à défendre les enseignements immuables de l'Église.
Par conséquent, le groupe des hétérodoxes ont été contraints d'adopter une variété de stratégies visant à changer l'enseignement de l'église tout en donnant l'impression que la Doctrine resterait intacte. Je voudrais discuter de trois des plus importantes et dangereuses de ces stratégies en commençant par l'accent mis sur la nécessité de modifier la langage que l'Église utilise pour exprimer ses enseignements.
1. Modification du langage
Cet argument a été basé sur l'affirmation selon laquelle le langage qui est actuellement utilisé par l'Église n’est plus compris par la majorité des gens, soit parce qu'il est trop technique ou soit parce qu’il semble faire « trop de jugement ». Par conséquent, il doit être remplacé par un langage qui est « pertinent », « pastoral » et surtout « miséricordieux ».
Une voix importante au cours du Synode en faveur de ceux qui préconisent un changement radical dans le langage de l'Église était le Père Thomas Rosica, le porte-parole de presse anglais au Saint-Siège.
Le premier jour du Synode, lors d'une conférence de presse, le Père Rosica a fait l'appel passionné suivant :
« Il doit y avoir une fin au langage d'exclusion » a-t-il dit. « Le Jubilé de la Miséricorde exige aussi une nouvelle forme de langage à la fois public et privé. [Il] nécessite un langage de la miséricorde. ... La langue de l'inclusion doit être notre langage, en tenant toujours compte des possibilités et des solutions pastorales et canoniques ».
Évidemment, il y a beaucoup de choses que l'on puisse dire à propos de ce passage, pas moins en ce qui concerne l'utilisation du langage idéologique tels « exclusion » et « inclusion », mais je veux me concentrer sur l'affirmation selon laquelle l'Église requiert « une nouvelle forme de langage ».
En particulier, je tiens à attirer l'attention sur deux exemples marquants de termes que les Pères synodaux ont estimé qu’ils ne devraient plus être utilisés par l'Église. Ce sont « intrinsèquement désordonnés », plus précisément en référence à l'homosexualité et « indissolubilité ».
Ces termes ont été jugés impropres à notre époque actuelle et dans le besoin d'être remplacés par la langue « pastorale » et « miséricordieuse » sans changer leurs enseignements sous-jacents.
Mais est-ce bien le cas ?
Le but de la langue, après tout, est de transmettre une signification. Il est nécessaire pour les mots d’exprimer une signification claire s’ils doivent être comprises par l'auditeur ou le lecteur, ce qui est particulièrement important pour l'Église, qui a le devoir de transmettre de façon intacte le Dépôt de la Foi », que Dieu a donné aux siens une fois pour toutes. ( Jude 1 : 3) Afin de transmettre le contenu de la Révélation Divine inchangée, elle doit utiliser une terminologie claire et précise qui conserve une signification stable.
Je dirais que les modifications proposées au langage conduiraient en effet à un changement dans l'enseignement de l'Église et c’est précisément ce que les Pères synodaux qui ont proposé ces changements désirent.
« Intrinsèquement désordonnés »
Au sujet de l'expression « intrinsèquement désordonné », l’Archevêque Mark Coleridge de Brisbane, en Australie, a déclaré :
« Quand nous disons que tel ou tel acte est « intrinsèquement désordonné » ou mal, nous sommes conduits à dire que la personne qui commet l'acte est « intrinsèquement désordonnée » ou mauvaise. Parce que la sexualité n’est plus considérée comme étant une question de ce qu'une personne fait ; elle est maintenant considérée comme ce qu’une personne est... Ainsi donc, nous ne pouvons plus désormais condamner le péché mais pas le pécheur ».
Maintenant, on peut se demander si la façon dont l'Archevêque Coleridge voit la sexualité ou est désormais considérée, est exacte mais son approche est néanmoins claire. Je vais répéter ici les éléments clés:
« Parce que la sexualité n’est plus considérée comme étant une question de ce qu'une personne fait ; elle est maintenant considérée comme ce qu’une personne est... Ainsi donc, nous ne pouvons plus condamner le péché mais pas le pécheur ».
En d'autres termes, parce que le monde séculier a changé son point de vue sur la sexualité, l'Église doit changer son langage afin de se conformer aux tendances modernes. Donc, comme beaucoup de gens s’identifient comme homosexuels et considèrent cela être normal comme identité naturelle, conséquemment l'Église doit, selon Coleridge, accepter de ne plus faire référence à l'homosexualité comme « intrinsèquement désordonnée ».
Alors ce qui se passe ici n’est pas fondamentalement de faire du langage de l'Église un langage plus « pastoral » mais plutôt de conformer l'enseignement de l'Église aux idées modernes.
« Indissolubilité »
Le deuxième terme que je voudrais regarder est l’« indissolubilité ». L'Église Catholique enseigne, comme nous le savons, qu'il n'y a aucune autorité sur terre qui a le pouvoir de dissoudre un mariage sacramentel conclu et consommé. Un tel mariage ne prend fin qu'avec la mort de l'un des conjoints. C’est ce que signifie dire que le mariage est « indissoluble ».
Un certain nombre de Pères synodaux cependant croient que le terme ne devrait plus être. Blaise Cupich, Archevêque de Chicago, pense qu'il est « trop juridique » et « trop dur » pour plusieurs à comprendre. Il ne reflète pas « l'indissolubilité d'une alliance mais des menottes. » Il a suggéré l’expression « fidélité tout au long de la vie » comme une alternative.
Mgr Diarmuid Martin de Dublin a convenu que « La plupart des familles ne sentent pas qu'ils vivent l’indissolubilité » a-t-il dit « ils vivent la fidélité, l’intimité et l’attention ».
Un troisième Père synodal, le Cardinal Vincent Nichols, Archevêque de Westminster, a également comparé les deux termes en disant que l’« indissolubilité » pourrait être considérée comme « peu attrayante et objective » tandis que « la fidélité » était un terme « terre à terre ». Il a accentué l'importance d'utiliser un langage que les gens peuvent comprendre.
Alors nous avons des Pères synodaux qui suggèrent un remplacement d'un terme afin, disent-ils, d’améliorer la clarté.
Toutefois, bien sûr, le contraire de fait se produit parce que l’« indissolubilité » et « la fidélité » n’ont certainement pas la même signification.
L'indissolubilité du lien matrimonial dure jusqu'à ce que l'un des conjoints décède considérant que la fidélité au lien conjugal peut être ou ne pas être présente. Le mariage reste indissoluble indépendamment de savoir si les époux sont fidèles l’un à l’autre pendant la durée de leur mariage.
Donc le terme « indissoluble » ne peut tout simplement pas être remplacé par le terme « fidélité ». Et s’il l’était, il suggèrerait qu'un mariage ne durerait aussi longtemps que dans la mesure où les deux conjoints sont fidèles l’un à l'autre. Ceci est en fait l'une des positions tenues par certains théologiens Orthodoxes de l’Orient pour justifier la pratique de tolérer les deuxièmes mariages.
Alors il n’est tout simplement pas vrai que le remplacement du terme « indissolubilité » par « fidélité » serait plus facile pour les Catholiques à comprendre que ce que l'Église enseigne, ce serait effectivement conduire à un changement de Doctrine.
Que les changements proposés au langage conduirait à une rupture avec la Tradition de l'Église a été franchement admis par Mgr Luc Van Looy de Gand, en Belgique, quand il a dit lors d’une conférence de presse au Vatican que : « Ce pourrait être le début d'une nouvelle Église » a-t-il dit et « la fin d'une église qui porte un jugement sur chaque situation ».
2. Refus des absolus moraux
Le deuxième élément de la stratégie « progressiste » que je souhaite discuter qui est étroitement lié aux appels à un changement dans le langage, est la tentative d'abolir effectivement la notion que certaines actions sont intrinsèquement mauvaises et cela se fait en soulignant les aspects positifs d'actes objectivement pécheurs.
Par exemple, le document de travail ( Instrumentum Laboris ) a souligné les soi-disant « aspects positifs » de la cohabitation dans ses diverses formes sans donner une présentation claire de la nature pécheresse des actes sexuels en dehors du mariage et la résultante a causé un préjudice à des individus et à la société.
En fait le document est allé jusqu'à laisser entendre, au paragraphe 102, que le mariage civil et la simple cohabitation peuvent être décrits comme « un lien durable, stable et ouvert à la vie » et que le « mariage sacramentel est un éventuel bien qui doit être proclamé comme un cadeau pour enrichir et renforcer la vie conjugale » . Il est clair que l'implication ici est clairement à l’effet que les mariages civils non reconnus comme valides par l'Église et pas plus même la cohabitation, sont une forme de vie conjugale.
Cela a aussi été implicite dans le paragraphe 99 qui parlait de valoriser les aspects positifs de la cohabitation jusqu'au temps où la « plénitude de l'union dans le Sacrement pourrait être atteinte » ; comme s’il y avait un certain degré d'union légitime déjà dans une relation sexuelle en dehors du mariage.
Donc ce qui se passe vraiment quand « les aspects positifs » des unions pécheresses sont loués, c’est que le mal intrinsèque des actes pécheurs qui est impliqué est obscurci ou même nié.
Cependant, de nombreux Pères synodaux étaient déterminés à poursuivre cette approche au Synode ordinaire. Le Cardinal, Vincent Nichols de Westminster, est allé jusqu'à critiquer publiquement les Pères synodaux qui ont pris le point de vue opposé. Dans une interview avec le magazine américain, il a dit qu'il y avait des Évêques qui ont trouvé « très difficile de reconnaître en aucune manière à tout ce que nous pourrions citer comme évident et comme semences de bonté dans une situation et qu’ils voulaient la classer tout simplement comme immoral ». Il a poursuivi en accusant ces Évêques d'être motivés « par la peur et l'anxiété ».
Le déni des absolus moraux qui sous-tend ces vues peut être vu dans l'intervention du Cardinal Marx, Archevêque de Munich et Freising et membre du Cabinet des Neuf Cardinaux de François qui a dit :
« Est-ce que les gens peuvent vraiment avoir le sentiment qu’ils font partie de nous quand ils sont considérés comme vivant en état de péché mortel ? »
Il a poursuivi :
« Il est douteux aussi que des actes sexuels dans un deuxième mariage civil puissent être jugés indépendamment des circonstances de la vie. Pouvons-nous juger tous les actes sexuels sans exception dans un deuxième mariage civil comme adultères ? »
La réponse à la question de Cardinal Marx peut être trouvée dans l'enseignement immuable de l'Église, exprimée ici par le Pape Jean-Paul II dans son encyclique Veritatis Splendor, qui enseigne que :
« La raison atteste qu'il peut exister des objets de l'acte humain qui se présentent comme « ne pouvant être ordonnés » à Dieu, parce qu'ils sont en contradiction radicale avec le bien de la personne, créée à l'image de Dieu. Ce sont les actes qui, dans la tradition morale de l'Eglise, ont été appelés « intrinsèquement mauvais » (intrinsece malum) : ils le sont toujours et en eux-mêmes, c'est-à-dire en raison de leur objet même, indépendamment des intentions ultérieures de celui qui agit et des circonstances ».
La déclaration du Cardinal Marx est juste un des nombreux exemples des leaders prélats rejetant ouvertement la Doctrine Catholique ; par conséquent, il n’est pas surprenant que Mgr Peta d'Astana au Kazakhstan, s’est senti ému de dire au Synode qu'il pouvait sentir la « fumée infernale » dans les nombreuses interventions des Pères synodaux.
3. L'appel à la « décentralisation »
Le Cardinal Marx constitue une bonne introduction au troisième aspect de la stratégie « progressiste » que je voudrais discuter. De retour en février de cette année, le Cardinal Marx a dit, en référence à l'Église en Allemagne, que :
« Nous ne sommes pas une filiale de Rome. Chaque conférence épiscopale est responsable de la pastorale dans son propre contexte culturel et doit prêcher l'Évangile à sa manière originale. Nous ne pouvons pas attendre un Synode pour nous dire comment nous devons façonner la pastorale du mariage et de la famille. »
Ces appels à la décentralisation de l'autorité doctrinale pour les conférences épiscopales ont été entendus fréquemment tout au long du Synode. Jeremias Schröder, un abbé allemand qui assistait au Synode au nom de l'Union des Supérieurs Généraux, a déclaré à la conférence de presse du Vatican que :
« Beaucoup de discours dans les débats généraux ont évoqué la possibilité de faire face à des questions sur la base d'un contexte culturel donné. Je dirais qu'il y a eu environ une vingtaine d'interventions et seulement deux ou trois étaient contre qui ont prétendu que le fait de remettre les pouvoirs de l’Église auraient des conséquences fatales. ... Quant à moi, par exemple, je suis allemand et il me semble que la question des divorces remariés est très fortement et largement ressentie en Allemagne et beaucoup moins ailleurs. Ceci est une zone où il pourrait y avoir de l’espace pour des idées pastorales originales et il en va de même de la compréhension de l'homosexualité, une question qui varie vraiment d'une culture à une autre. Les Conférences épiscopales nationales pourraient être autorisées à rechercher des solutions pastorales qui sont en harmonie avec leur contexte culturel spécifique ».
Ce même abbé est aussi cité dans un journal allemand à dire :
« Nous n’avons pas besoin pour chaque problème d’une solution uniforme, une solution pour toute l’Église confectionnée à Rome. Peut-être que l'Église doit arriver à un accord sur le fait que, dans les différentes régions et les sociétés du monde, une autre relation avec le sujet compliqué de la Famille soit permis ».
En d'autres termes les différentes parties de l'Église peuvent adopter différentes approches sur des questions morales.
La tendance à la décentralisation de l'autorité doctrinale a reçu une impulsion par François dans un important discours prononcé le 17 octobre 2015, quand il a dit qu'il « sentait la nécessité de procéder à une « décentralisation » saine du pouvoir aux « Conférences épiscopales » .
Ceci fait écho à un appel qu'il avait fait déjà, dans l'Exhortation apostolique Evangelii Gaudium à savoir que l’on devrait accorder aux Conférences épiscopales une « véritable autorité doctrinale ».
Ces appels sont troublants étant donné que ces prélats, comme le Cardinal Marx, qui est le plus ardent demandeur d’une telle dévolution de l'autorité sont précisément ceux qui souhaitent utiliser ces pouvoirs décentralisés afin de poursuivre des chemins incompatibles avec les enseignements de l'Église Catholique comme l'admission des « divorcés et remariés civilement » à la Sainte Communion avec comme condition l’amendement de vie.
En effet, une image de ce qu'est une Église décentralisée pourrait ressembler à ce qui été fournie par l'Archevêque Cupich de Chicago, qui a tenu une conférence de presse impromptue à Rome où il a parlé non seulement d'admettre les « divorcés et remariés civilement » à la Sainte Communion mais aussi ceux qui vivent activement le style de vie homosexuelle.
Si une telle voie était suivie, nous verrions une pratique dénoncée comme un péché grave dans une partie du monde mais considérée comme parfaitement acceptable dans une autre.
Une telle approche est bien sûr totalement incompatible avec une compréhension orthodoxe de la nature de l'Église Catholique, l'Église qui est définie par Saint Robert Bellarmin comme « un corps d'hommes unis ensemble par la profession de la même foi Chrétienne et par la participation aux mêmes sacrements, sous la gouvernance de pasteurs légitimes, plus particulièrement du Pontife Romain, le seul Vicaire du Christ sur terre ».
L'Église ne peut tout simplement pas enseigner des Doctrines différentes sur les questions de foi et de morale dans différentes parties du monde et rester l'Église Catholique.
4. Les droits des parents en tant que premiers éducateurs
Le Synode ordinaire s’est terminé le 24 octobre avec la publication d'un rapport final. Ce rapport, assez remarquablement, n'a toujours pas été publié dans une autre langue que l'italien. Cependant, nous avons eu divers extraits traduits et il y en a beaucoup au sujet desquels nous devons être extrêmement concernés. Les paragraphes 84-86 offrent un certain nombre d'ouvertures à la Sainte Communion par le « divorcés remariés civilement ». D'autres paragraphes, comme le paragraphe 71 sur la cohabitation, mettent une emphase erronée sur les « aspects positifs » des unions pécheresses que nous avons considérées précédemment.
Cependant, pour terminer mon discours aujourd'hui, je veux attirer l'attention sur le paragraphe 58 qui traite de l'éducation sexuelle. Ce paragraphe dit que : « La famille, tout en conservant son espace primaire dans l'enseignement (cf. Gravissimum Educationis, 3), ne peut pas être le seul endroit pour l'enseignement de la sexualité ».
Pour comprendre pourquoi ce passage est une grave menace pour les droits parentaux, nous devons examiner deux choses : d'abord, la menace actuellement posée aux parents et aux enfants par les gouvernements et les organisations internationales et, d'autre part, il y a la réponse traditionnelle de l'Église à de telles menaces.
Donc, nous devons d'abord comprendre qu'il y a une forte détermination de la part des politiciens les plus puissants du monde, y compris les gouvernements nationaux et les organisations internationales telles que l'Organisation des Nations Unies, à entraver l'exercice du droit des parents à être les premiers éducateurs de leurs enfants.
Malgré l'article 26 de la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme qui dit : « Les parents ont le droit de choisir le genre d'éducation à donner à leurs enfants », des instances puissantes telles que le Comité de conformité de l'ONU pour la Convention relative aux Droits de l'Enfant font pression sur les pays en développement, en particulier les pays africains, pour donner aux enfants à partir de 12 ans l'accès à la contraception et à l'avortement à l'insu de leurs parents.
De plus, l'UNESCO et l'Organisation Mondiale de la Santé font la promotion anti-vie et des programmes d'éducation sexuelle pornographique qui cherchent à éliminer le rôle des parents en tant que premiers éducateurs et protecteurs de leurs enfants.
On refuse également aux parents de familles dans les pays occidentaux le droit de contrôler l'éducation sexuelle dans les écoles de leurs enfants, y compris dans les écoles Catholiques. En Angleterre et dans le Pays de Galles, par exemple, les enfants ont accès à la contraception et l'avortement à l'insu de leurs parents, y compris dans les écoles Catholiques avec l'autorité de la Conférence des Évêques d'Angleterre et du Pays de Galles.
De plus, les enseignants dans les écoles primaires britanniques sont formés par « Stonewall » une organisation militante pour les « droits » des homosexuels, ce groupe qui a pour politique que l’on doit enseigner aux enfants qu’ils pourraient grandir et épouser une personne du même sexe. La formation des enseignants par Stonewall se déroule dans les écoles primaires Catholiques avec la coopération de l'Évêque Catholique local.
Alors comment l'Église a-t-elle déjà composé avec cette menace ?
Le Pape Jean-Paul II a répété l'enseignement constant de l'Église quand il a dit dans son Exhortation apostolique Familiaris consortio et je cite :
« L'éducation sexuelle - droit et devoir fondamentaux des parents - doit toujours se réaliser sous leur conduite attentive, tant à la maison que dans les centres d'éducation choisis et contrôlés par eux ».
Comparez et contrastez les deux déclarations :
Le Synode dit : « La famille ... ne peut pas être le seul endroit pour l'enseignement de la sexualité ».
Mais Jean-Paul II a complètement enseigné que c’est de la responsabilité des parents de décider s’ils impliquent des institutions en dehors de la famille et encore plus, s’ils en choisissent, ces institutions doivent être contrôlées par les parents et leurs enfants doivent rester « sous leur conduite attentive ».
Le Pape Léon XIII a enseigné la même Doctrine dans son encyclique Sapientiae Christianae :
« Car c'est à eux [ les parents ] qu'il appartient, en vertu du droit naturel, d'élever ceux auxquels ils ont donné le jour, avec l'obligation d'adapter l'éducation et la formation de leurs enfants à la fin pour laquelle Dieu leur a donné de leur transmettre le don de la vie. C'est donc une étroite obligation pour les parents d'employer leurs soins et ne négliger aucun effort pour repousser énergiquement toutes les injustes violences qu'on leur veut faire en cette matière, et pour réussir à garder exclusivement l'autorité sur l'éducation de leurs enfants.».
Dans son encyclique Divine Illius Magistri Pape Pie XI était capable d’affirmer :
« L'histoire est là pour témoigner comment, spécialement dans les temps modernes, des cas se sont présentés, et se présentent encore, de violation par l'Etat des droits que le Créateur a conférés à la famille. Mais elle montre aussi splendidement comment l'Eglise a toujours pris ces droits sous sa tutelle pour les défendre. La meilleure preuve en est la confiance spéciale des familles à l'égard des écoles de l'Eglise [ écoles catholiques ] ».
Malheureusement Pie XI ne serait pas capable de dire ces paroles aujourd'hui parce que la confiance placée par les parents Catholiques dans les écoles Catholiques a été systématiquement violée.
La semaine dernière, l'Académie Pontificale des sciences a organisé un atelier qui annonçait comme sujet de discussion comment déployer les enfants comme « agents de changement » dans la cause du développement durable. Les conférenciers de l'atelier étaient les plus grands architectes du mouvement international de contrôle de la population, y compris Jeffrey Sachs, conseiller spécial du Secrétaire général de l'ONU Ban Ki-Moon.
Jeffrey Sachs est un ardent promoteur du contrôle de la population, appelant en particulier à réduire considérablement le taux de natalité en Afrique par des programmes gouvernementaux visant à accroître l'utilisation de la contraception. Dans son livre de 2008 « Common Wealth : Economie pour une planète surpeuplée », il a aussi, semble-t-il, mis de l’avant les effets soi-disant positifs qu’une légalisation sur l'avortement sur les niveaux de population
Le document d'information pour cet atelier affirme que les enfants sont à risque de leurs « parents » et aussi des « agences officielles qui se fondent sur des principes religieux » et qui ont des opinions jugées anti-scientifiques.
Il est aussi nécessaire, soutient cet atelier, pour les écoles Catholiques d’« absorber les objectifs de développement durable de l'ONU » — les mêmes objectifs de développement durable qui appellent à un accès universel à la « santé reproductive », autrement dit l'accès universel à l'avortement et à la contraception.
Dans ce contexte, il est extrêmement inquiétant de constater que la lettre encyclique Laudato Si aborde l'éducation dans l'environnementalisme aux paragraphes 209 à 215 sans faire aucune référence aux parents.
Dans ce même contexte, l'approbation du paragraphe 58 du rapport final du Synode par 94% des Pères synodaux indique un échec très grave par la hiérarchie de l'Église à reconnaître la gravité de la menace à laquelle font face actuellement les parents.
Je voudrais terminer par une citation d'un autre Pape, Pie XII, qui en 1946 discernait déjà la crise à laquelle nous sommes confrontés aujourd'hui ; et la question qu'il a posée est celle-là même que nous devons tous nous poser aujourd'hui. Il a dit :
« Il y a beaucoup de discours, mais sans la clarté nécessaire des concepts au sujet d'une « nouvelle théologie », qui doit être en constante transformation, à l'instar de toutes les autres choses dans le monde, qui sont dans un état constant de flux et de mouvement, sans jamais atteindre leur terme. Si nous devions accepter une telle opinion, qu’est-ce qui adviendrait des dogmes immuables de la foi Catholique ; et que deviendrait l'unité et la stabilité de cette Foi ? »
Aujourd'hui plus que jamais, nous devons rester fidèles aux enseignements immuables de l'Église Catholique.