mercredi 15 novembre 2017

L’Église reste fermement opposée au Malthusianisme
Hum ! Tant que la relecture d'Humane Vitae n'aura pas eu lieu...


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Par : Mélinée Le Priol
Le 15 novembre 2017

SOURCE : La Croix





Si l’« ouverture à la vie » est bien constitutive du mariage chrétien, l’Église n’en appelle pas moins les couples catholiques à une « paternité responsable ».

Mais pour le pape François, réduire le nombre de bouches à nourrir n’est pas une solution face à la crise écologique actuelle.

« Soyez féconds et multipliez-vous » (Gn 1, 28). L’injonction biblique serait-elle devenue irresponsable, à l’heure où la planète semble menacée par une possible surpopulation ? Fidèle à l’esprit de ce verset de la Genèse, l’Église a toujours été et demeure aujourd’hui indéniablement nataliste, voyant dans les familles nombreuses « un signe de la bénédiction divine et de la générosité des parents »(Catéchisme, 1992, n. 2373).

Mais si l’« ouverture à la vie » est bien constitutive du mariage chrétien, l’Église n’en appelle pas moins les couples catholiques à une « paternité responsable ». Utilisé par l’Église depuis un demi-siècle, ce concept établit la possibilité pour les parents de décider du nombre d’enfants qu’ils se sentent capables d’accueillir, notamment en fonction de leurs ressources économiques. Dans l’encyclique de Paul VI Humanae vitae, publiée en 1968, cette paternité responsable est assimilée aux méthodes naturelles de régulation des naissances : ces méthodes sont le seul moyen « licite », pour l’Église, de réguler la natalité. En cinquante ans, le Vatican n’est jamais revenu sur cette position.

Face à la prise de conscience du péril écologique ces dernières années, la question du contrôle des naissances s’est toutefois posée à plusieurs reprises. On se souvient des propos du pape François dans l’avion qui le ramenait des Philippines, en janvier 2015 : « Certains croient, excusez-moi du terme, que pour être de bons catholiques, ils doivent être comme des lapins. » Quelques mois plus tard, en décembre de cette même année, le cardinal Peter Turkson, représentant du Saint-Siège à la COP21,avait même reconnu au micro de la BBC que le contrôle des naissances pourrait être une « solution » face aux conséquences du réchauffement climatique.

Ces déclarations ont fait mouche, mais l’enseignement officiel, lui, n’a pas changé. Dans son encyclique écologique Laudato si’, parue en 2015, le pape François affirme ainsi que « la croissance démographique est pleinement compatible avec un développement intégral et solidaire ». Plus récemment, le 16 octobre dernier, le Saint-Père a soutenu devant l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO) que « réduire le nombre de bouches à nourrir » n’est pas une solution pour contrer l’accroissement de la demande de denrées alimentaires. Fustigeant le « gaspillage » de certains, le pape a exigé que « les fruits de la terre soient à la disposition de tous ». Et de conclure : « Il est aisé de réduire, en revanche le partage exige une conversion, ce qui n’est pas une mince affaire. »

Les politiques de limitation des naissances, auxquelles l’Église s’est toujours fermement opposée, sont pour Mgr Jean-Luc Brunin, évêque du Havre, « le signe d’une paresse intellectuelle et politique ». Consonant avec les récentes déclarations du pape, il assure que « ce ne sont pas les enfants qui naissent qui menacent la planète, mais l’exploitation éhontée des ressources par quelques-uns ». « La solution est de vivre plus sobrement », renchérit Mgr Bruno Feillet, évêque auxiliaire de Reims et membre du Conseil famille et société. Pour lui, le malthusianisme est même « foncièrement égoïste », dans la mesure où « des pays riches demandent aux pays pauvres de limiter leur natalité pour qu’ils puissent rester riches ».

Certains théologiens ne se satisfont pas de ces arguments, à l’instar d’HenriWattiaux, professeur émérite de théologie morale à l’Université catholique de Louvain (Belgique). « Refuser de contrôler la fécondité ne fait qu’augmenter le nombre d’humains vivant dans des conditions inhumaines, affirme-t-il. Il est temps d’intégrer la morale sexuelle à une véritable éthique sociale. » De son côté, le père assomptionniste Bernard Holzer, missionnaire aux Philippines, a récemment dénoncé dans la revue jésuite Projet la « position dogmatique » et le « moralisme clérical » des évêques philippins face aux femmes pauvres de ce pays, « premières victimes de naissances multiples et souvent non désirées ». « L’Église devra montrer qu’elle sait écouter, dialoguer et débattre », espère-t-il sobrement.

Mélinée Le Priol

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