SOURCE : Catholic Herald
Augustin n'a pas été le seul saint à « avoir été jadis un grand pécheur ». Au-delà des hagiographies, plusieurs ont vécu de grands scandales.
Lorsque les Catholiques discutent des saints qui ont déjà été de grands pécheurs, celui qui nous vient en premier à l'esprit est St Augustin d'Hippone. Et pour une bonne raison : lorsqu’adolescent, Augustin a abandonné la foi catholique dans laquelle il avait été élevé par sa mère, sainte Monique et il a emménagé avec une maîtresse et, ensemble, ils ont eu un fils hors mariage. Les Catholiques qui sont bien instruits sur les Pères de l'Église peuvent mentionner St-Jérôme, le linguiste et traducteur qui nous a donné la Bible Vulgate et qui avait la plus grande sensibilité à fleur de peau, était le plus colérique et acariâtre des Docteurs de l'Église.
Après cela, la présentation actuelle est susceptible de se calmer parce que, pendant des générations, les curés de paroisse bien intentionnés ont présenté tous les autres saints comme tellement, que dire, saints. Et ce n’est pas utile pour nous tous qui luttons avec des péchés mortels et des véniels à peu près sur une base quotidienne.
Ce ne fut pas toujours ainsi. Dans les premiers siècles de l'Église et tout au long du Moyen Âge, les écrivains étaient parfaitement candides à propos de saints qui étaient loin d'être saints initialement. C’est à partir de ces sources anciennes que nous apprenons que Ste Marie d’Égypte traînait dans les rues d'Alexandrie pour faire de nouvelles conquêtes sexuelles et que St Olaf avait une compréhension imparfaite de comment convertir une nation.
Sans minimiser la gravité des péchés d'Augustin ou sans sous-estimer comment désagréable ça pouvait être d'être le récepteur d'une semonce de Jérôme mais à comparer à d'autres pécheurs convertis en saints, Augustin et Jérôme étaient des sous-performants.
Alors, comment avons-nous fait pour passer de la candeur des histoires aseptisées des saints que nous avons entendues depuis l'enfance ? Nous pouvons rejeter le blâme sur les écrivains du 19ème siècle (ou peut-être plus tôt) qui ont passé par-dessus les années les plus embarrassantes de leur vie avec la seule phrase « il / elle était autrefois un grand pécheur/pécheresse ». Quand j’étais gamin et que je tombais sur cette phrase, je ne pouvais pas m’empêcher de penser : « Je me demande bien ce qu’il (elle) faisait ». Je ne doute pas des bonnes intentions des hagiographes, mais c’était peu judicieux de modifier les années rebelles de la vie d'un saint.
Le but de lire sur les années lorsque certains saints était tombé en bas de la coche n’est de ne pas éprouver un certain plaisir tabloïd mais de comprendre comment fonctionne la grâce dans le monde. Chaque jour, toute la journée, Dieu répand sa grâce sur nous, nous pousse, nous câline de se détourner de tout ce qui est basique, vulgaire et peu satisfaisant et de nous tourner vers la seule chose éternelle, parfaite, et vraie qui est Lui-Même. Et c’est la raison pour laquelle que tant hagiographes au cours des siècles glorifiaient la vie de grands pécheurs qui sont devenus de grands saints parce que cela livrait un message très rassurant : si ces gens peuvent être sauvés, alors vous aussi vous pouvez l’être !
St Matthieu (1er siècle)
Dans les Évangiles, les percepteurs des taxes (aussi connus comme publicains) sont fréquemment mentionnés dans le même souffle que les prostituées et ils méritaient leur moche réputation. Sous les Romains, le gouverneur de chaque province pouvait sous-traiter la collecte des impôts à des particuliers.
Ces pigistes profitaient de cet arrangement pour imposer des surcharges ou extorquer autant qu'ils pouvaient en obtenir des contribuables. Les Romains ne s’en souciaient guère aussi longtemps qu’ils obtenaient la totalité de leur part. Les Juifs, d'autre part, voyaient les collecteurs d'impôts juifs comme des escrocs éhontés qui collaboraient avec des païens et qui prenaient en proie leur propre peuple.
Matthieu, appelé Levi également dans les Évangiles de Marc et Luc, était un collecteur d'impôts à Capharnaüm, une ville de garnison romaine. Il était assis à sa table dans la maison des douanes secouant hardiment ses voisins quand Jésus passa devant. Notre Seigneur venait juste de guérir un homme paralysé : là maintenant, il allait réconcilier un pécheur. « Suis-Moi» a dit le Christ. À la surprise des gardes romains, des greffiers et des contribuables, Matthieu se leva, laissa l'argent là où il se trouvait sur la table, tourna le dos à une vie de vol approuvé par le gouvernement et a rejoint la poignée d'hommes que nous connaissons comme les Apôtres .
Quand les pharisiens se sont plaints que ce n’était pas des affaires de Jésus de dîner avec un collecteur d'impôts notoire, le Christ répondit : « Je suis venu appeler non pas les justes, mais les pécheurs ».
Moïse, un vengeur, un homme violent lubrique, était le chef d'un gang de 75 hommes qui étaient tous presque aussi méchants que lui. Moïse et ses brigands devinrent l'horreur du désert égyptien, pillant les villages, tuant et volant les voyageurs qui avaient fait l'erreur d'essayer de traverser le territoire de la bande. Le gouverneur de la province a envoyé des troupes pour enrayer Moïse et ses hommes, mais les bandits ont fait rebrousser chemin à chaque escouade envoyée contre eux.
Le jour vint enfin lorsque le gouverneur a envoyé une force suffisamment puissante pour détruire les brigands. Face à un tel un grand corps de troupes, les voleurs se sont dispersés. Moïse a voyagé à travers le désert seul jusqu'à ce qu’il atteigne le Monastère de Petra à Skete, l'une des communautés monastiques les plus renommées de l'Égypte. Dans l'esprit de Moïse, c’était la planque parfaite. Il voulait se terrer avec les moines tant que la situation se calme puis retourner ensuite et assembler ce qui restait de sa bande.
Avec un coup d'oeil sur ce géant brut d'homme, les moines devaient savoir qu’il n’était pas un pèlerin banal. Néanmoins, ils ont donné à Moïse une cellule, l'ont nourri, le traita avec bonté et ne lui ont posé aucune question. Comme le temps passait, cependant, quelque chose d'inattendu est commencé à arriver à Moïse. La bonté des moines l'a transformé. Il ne voulait plus retourner à sa vie de voleur et de meurtrier : il voulait commencer une nouvelle vie à Petra.
Ça n'a pas été facile. Moïse a découvert que l'abstinence de vin était dure et la chasteté s’est avérée particulièrement difficile. Les tentations qu’il ressentait étaient si fortes qu’il a presque abandonné la vie de moine. Guidé par l'abbé Saint-Isidore, Moïse a appris à surmonter ses impulsions pécheresses. Une fois, juste avant l'aube, Isidore et Moïse ont monté sur le toit du monastère afin de regarder le soleil se lever. « Vois combien de temps il faut à la lumière pour chasser l'obscurité de la nuit ? » a dit Isidore. « Il en est de même avec l'âme ».
Ste Marie d'Égypte (environs 344-421)
Marie, l'enfant d'une famille chrétienne égyptienne, était âgé de seulement 12 ans quand elle s’est enfuie de la maison pour vivre à Alexandrie, une des plus grandes villes et des plus peuplées de l'Empire Oriental de Rome. Alexandrie proposait aussi quelque chose à Marie qu’elle désirait : l’aventure sexuelle. Elle a abandonné sa virginité peu de temps après son arrivée dans la grande ville et a commencé une carrière de 17 ans de promiscuité débridée.
Contrairement à ce que certaines courtes biographies de Ste Marie d'Égypte disent, elle n’était pas une prostituée. Comme elle l’a dit à son biographe, le Père Zosime, elle faisait « gratuitement ce qui me faisait plaisir ». Elle a particulièrement apprécié corrompre les jeunes hommes. Elle a aussi avoué au Père Zosime : « Il n'y a pas de dépravation nommable ou innommable dont je n’ai pas été pas leur professeur ».
Un jour, elle a vu une foule d'hommes qui attendent d'embarquer sur un bateau dans le port. Un passant lui dit que c’étaient des hommes pèlerins en partance pour la Terre Sainte. La notion de séduire toute une liste de passagers a attiré Marie, elle a rejoint le groupe. À Jérusalem, Marie rejoint une foule en direction de l'Église du Saint-Sépulcre. Mais comme la foule entra dans l'église, Marie sentait une force invisible l’empêchant d’entrer.
Tout à coup il lui vint à l’esprit que les Puissances des Cieux la gardaient loin de la Tombe du Christ. La pleine réalisation de tout ce qu'elle avait fait tomba sur elle, elle a été envahie de honte et d’un dégoût d’elle-même.
À travers ses larmes, elle vit une icône de la Vierge Marie au-dessus de l'entrée de l'église. « Aidez-moi » a-t-elle prié la Mère de Dieu, « car je n’ai pas d’autre aide ». Sa prière fut exaucée. La force qui lui avait barré le chemin la relâcha. À l’intérieur de l'église, elle s’est confessée à un prêtre, elle a assisté à la messe et elle a vénéré la Relique de la Sainte Croix.
Ensuite, elle est allée dans le désert à travers le Jourdain pour y vivre une vie de pénitence. Pendant de nombreuses années, elle a enduré de puissantes tentations de revenir à son ancienne vie, mais avec le temps, comme elle a dit au Père Zosime : « Après la violente tempête, le calme durable descend ».
Olaf était âgé de seulement 12 ans quand son père l’a confié à un Viking expérimenté. Lors de raids dans la Baltique, Olaf a appris à détruire des villes, à piller des monastères, à tuer des civils et des soldats, le tout avec une conscience claire. Dans les métaphores colorées des sagas nordiques, par ses exploits de guerre, Olaf avait « repu la nichée du loup », « réveiller la tempête d’acier » et « convoqué l'assemblée des flèches ».
Puis, inexplicablement, quand il eut environ 18 ans, Olaf s’est converti au Christianisme en Normandie. Deux ans plus tard, il est retourné en Norvège, devint roi et s’employa de faire de ses sujets des Chrétiens. Les bonnes vieilles méthodes de conversion par la prédication, le bon exemple et la persuasion étaient un travail lent et Olaf était pressé.
Toute personne qui n’abandonnait pas le paganisme risquait l'exécution, la cécité ou avoir une main ou un pied élagué. Lorsque les rebelles anti-chrétiens ont éconduit Olaf de son trône, il a laissé sa femme et sa fille et il partit en exil avec sa maîtresse et son fils illégitime. Peut-être qu’il avait manqué quelques classes de catéchisme là où ces sujets étaient couverts.
Olaf est retourné à la tête d'une armée et, dans une ultime bataille pour son trône et pour l'âme de son royaume, il a été abattu. Immédiatement, les Chrétiens scandinaves ont salué en lui un martyr et un saint.
C’était courant à l'époque, mais on peut affirmer avec certitude que dans le cadre formel des procès de canonisation en place depuis plusieurs centaines d'années, Olaf n’aurait jamais rempli les critères.
Tous ces saints — et il y a un peu plus — nous enseignent que les saints hommes et les saintes femmes ne seront pas infailliblement parfaits tout le temps. Mais tout comme les bons vieux conteurs n’ont pas blanchi les méfaits des saints, ils n’ont pas non plus minimisé l'effort impliqué dans leur conversion.
Une expérience de conversion n’est pas de la magie : c’est seulement la première étape dans une vie pour chercher à éviter les vieux péchés, à grandir dans la vertu et à conformer sa volonté indisciplinée et rebelle à la Volonté de Dieu. Tout ça est difficile à faire, mais la récompense est éternelle.
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