La mort de Dieu et la perte de la dignité humaine
par l'Évêque élu Robert Barron
Le 28 juillet 2015
SOURCE :
National Catholic Register
Je suis sûr que maintenant beaucoup d'entre vous ont vu l'effroyable vidéo avec caméras cachées de deux médecins de Planned Parenthood plaisantant joyeusement avec des interlocuteurs se présentant comme des acheteurs potentiels de parties du corps de nourrissons avortés. Alors qu’ils boivent bruyamment leur vin dans des restaurants élégants, les bons médecins — deux femmes —parlent sans émotion des prix auxquels ils devraient s’attendre pour la fourniture de précieux organes internes et comment les habiles avorteurs de Planned Parenthood savent exactement comment assassiner des bébés afin de ne pas endommager la marchandise commandée ( foie, cœur, etc…). Un des médecins a précisé que les avorteurs emploient des méthodes « moins croquantes » quand ils savent que les organes d'un bébé vont être récoltés pour la vente. Cela dit, le « croquant » dont elle parle est une référence au broyage du crâne, le démembrement avec le couteau ainsi que l’aspiration généralement employée dans les avortements. Pour moi, le moment le plus glacial fut lorsque l'un des médecins a informé que le prix qu'elle demandait était trop faible, elle eut un regard concupiscent et dit : « Ah bon, parce que je voudrais une Lamborghini ».
Maintenant, il est assez facile de remarquer et de déplorer la grossièreté morale de ces femmes, la façon particulièrement répugnante qui combinent la violence et la cupidité. Mais je voudrais explorer un problème plus profond que ces vidéos mettent en lumière, à savoir l'oubli de la dignité de l'être humain qui est plus clairement manifesté dans notre culture occidentale. Il suffit de considérer que plus de 58 millions d'avortements ont eu lieu, sous la pleine protection de la loi, dans notre pays (USA) depuis le jugement Roe v. Wade en 1973, ou de voir aussi la poussée de plus en plus insistante permettant l'euthanasie, même d’enfants dans certains pays européens ou encore les meurtres gratuits qui se commettent tous les soirs dans les rues de nos grandes villes. Les chiffres pour ma propre ville natale de Chicago dépassent typiquement ceux enregistrés sur les champs de bataille du Moyen-Orient.
Je dirais que c’est l'atténuation de notre sens de l'existence de Dieu qui rend possible cette sorte de violence surprenante contre des êtres humains. Dans la perspective occidentale classique, la dignité de la personne humaine est une conséquence et une fonction de son statut en tant que créature de Dieu. Précisément parce que l'être humain est créé à l'image et à la ressemblance du Créateur et destiné, enfin, pour la vie éternelle avec Dieu là haut, il est un sujet de droits inaliénables. J’utilise le langage de Jefferson dans sa Déclaration d'Indépendance expressément ici car le grand père fondateur savait que le caractère absolu des droits qu’il décrivait découle de leurs dérivés de Dieu : « Ils sont doués par le Créateur de certains droits inaliénables ...» Quand on retire Dieu du portrait, les droits de l'homme disparaissent plutôt rapidement, ce qui peut être constaté clairement dans les temps anciens et modernes. Pour Cicéron, Aristote et Platon, une élite culturelle appréciait les droits, les privilèges et la dignité, alors que la grande majorité des gens était légitimement reléguée à un statut inférieur, certains même à une condition d'esclavage. Dans les totalitarismes du siècle dernier — dans tous les cas caractérisés par un rejet véhément par des millions de Dieu — un nombre incalculable d'êtres humains ont été traités comme juste un peu plus que de la vermine.
Je réalise que de nombreux philosophes et théoriciens sociaux ont essayé de fonder un sens de la dignité humaine dans quelque chose d'autre que Dieu, mais ces tentatives se sont toutes avérées infructueuses. Par exemple, si la valeur humaine est une fonction de l'intelligence d'une personne ou de sa créativité ou de son imagination ou de sa capacité d’entrer en relation, alors pourquoi ne pas conclure que cette valeur disparaît lorsque ces pouvoirs sont sous-développés, affaiblis ou carrément éliminés ? Ou si le respect de la dignité humaine est reliée à la force des sentiments pour une autre personne, alors qui peut dire si cette dignité disparaît lorsque ces sentiments changent ou se tarissent ? Je soupçonne que si nous avions à interroger des gens sur la rue et qu’on leur demanderait pourquoi les êtres humains devraient être respectés, certaines versions de leur raisonnement sortirait de leur sentimentalité. Mais encore une fois, le problème est que les sentiments sont si éphémères, mouvants et changeants comme le vent. Si vous doutez de moi, lisez certains des comptes-rendus des officiers et des soldats dans les camps de la mort nazis, qui, après des années d’avoir tué, ont perdu tout sentiment pour ceux qu’ils ont assassinés, les voyant comme un peu plus que des rats ou des insectes.
Au cours des deux cents dernières années, les athées ont bruyamment affirmé que le rejet de Dieu conduirait à la libération humaine. Je dirais vigoureusement précisément le contraire. Une fois que l'être humain se rend autonome de Dieu, il devient, à très court terme, un objet parmi les objets et, donc, susceptible de la plus grossière manipulation par les puissants et les gens centrés sur leurs intérêts. Dans la mesure où les gens parlent encore de la dignité irréductible de l'individu, ils sont, qu'ils le sachent ou non, assis sur des bases bibliques. Lorsque ces fondations sont ébranlées — car elles le sont de plus en plus aujourd'hui — une culture de mort suivra aussi sûrement que la nuit suit le jour. S’il n'y a pas de Dieu, alors les êtres humains ne sont pas indispensables — alors pourquoi ne pas échanger les organes de nourrissons pour une belle Lamborghini?
L'Évêque-élu Robert Barron est un évêque auxiliaire élu de l’Archidiocèse de Los Angeles et le fondateur de la Parole de feu, un ministère catholique.
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