mardi 15 septembre 2015

Contrez la propagande des média sur les réfugiés

Important à lire si le sujet vous préoccupe



Monseigneur Sako, le Patriarche Chaldéen Louis Raphael I :

« Maintenant les Chrétiens nous demandent
d'organiser leur fuite pour eux »


Gianni Valente
Rome

SOURCE : Vatican Insider

Le Patriarche Chaldéen Louis Raphael I — Mgr Sako
sur les réfugiés qui fuient vers l'Europe :

« Toute déclaration qui pourrait inciter nos gens
à émigrer est irresponsable en ce moment »

« Maintenant, nos gens nous critiquent. Ils veulent que nous leur trouvions des vols, des visas et des centres d'accueil dans d'autres pays. C'est impossible. Un État ne peut pas faire cela. Et l'Église non plus ». Le Patriarche Chaldéen de Bagdad, Louis Raphael I, dit qu'il est préoccupé. Il n’est pas convaincu de certaines conséquences de la nouvelle politique de l'Europe sur les réfugiés fuyant la Syrie et d'autres zones de conflit. Beaucoup d'Églises sœurs en Europe ont été impliquées dans cet appel à l'action. Il a tenu à partager sa perplexité et l'inquiétude avec d'autres pasteurs des Églises Orientales.



Quel est votre point de vue sur les actions récentes de la Communauté Internationale à l'égard du Moyen-Orient ? Est-ce que quelque chose bouge enfin ?

« Vendredi dernier, je rencontrais tous les chefs d'Églises à Bagdad à la Cathédrale Chaldéenne avec un certain nombre de religieux et des prêtres. Nous nous demandions comment la situation pouvait arriver maintenant après quatre années de guerre en Syrie et 12 conflits et massacres en Irak. Après qu’on ait permis à la situation de se détériorer depuis si longtemps, je suis inquiet ».

Parlez-vous de la situation des réfugiés ? Êtes-vous préoccupé au sujet de qui ouvre les portes ou les ferme ?

« Cette question ne peut être traitée d'une manière sentimentale ou superficielle. Ce qui est nécessaire ici, c’est du discernement. Les seules solutions durables sont ceux qui peuvent être mis en œuvre sur le terrain (1). Ces types de solutions ont besoin de temps et de patience dans la mise en marche de processus et de leur gestion ensuite. Mais cela ne semble pas intéresser les dirigeants nationaux ni les organisations internationales. Ils préfèrent laisser les émotions du public influencer leurs actions ».

Certains suggèrent d’accueillir les réfugiés Chrétiens et les minorités religieuses persécutés en premier. Est-ce une bonne idée ?

« Cela ne devrait pas arriver. Ça poserait un problème pour nous aussi. Ça encouragerait ceux qui disent qu'ils veulent donner une justification religieuse à la guerre. Ceux de chaque côté qui disent que les Chrétiens ne peuvent pas rester. Les Pays Européens doivent donner un refuge à ceux qui en ont vraiment besoin, indépendamment de la religion. Et ils doivent éviter d'agir à l'aveuglette, en aidant ceux qui ont revêtu des peaux de Chrétiens dans la file d’attente ».

À quoi faites-vous allusion ?

« Il y a des organismes et des groupes qui aident les Chrétiens à partir. C’est leur mission de faciliter l'exode des Chrétiens. Ils les financent. Ils poussent les Chrétiens à quitter leur pays et ils l’admettent ouvertement, présentant cela comme quelque chose qui profite au persécuté. Je ne sais pas en quoi consiste leur stratégie. Peut-être que, lorsque ces pays ont leurs Chrétiens hors de la voie, il leur sera plus facile de déclarer de nouvelles guerres, de vendre et d’expérimenter de nouvelles armes. Ces phénomènes doivent être examinés au lieu de simplement en bavarder ».

Mais peut-on arrêter des mères et des pères qui veulent donner à leurs enfants l'espoir d'un avenir meilleur ?

« Nous n’arrêtons pas personne. Il serait injuste aussi bien qu’impossible. Mais nous ne pouvons pas les pousser à quitter non plus. Maintenant, nos gens nous critiquent. Ils veulent que nous leur trouvions des vols, des visas et des centres d'accueil dans d'autres pays. C'est impossible. Un État ne peut pas faire cela. Et l'Église non plus. Une communauté Chrétienne qui est née dans ce pays ne peut pas penser à organiser un exode qui ouvrirait la voie à son extinction. Nous pouvons respecter le choix de partir en tant que choix personnel, mais nous ne pouvons pas en être à l'origine ».

Alors certains demandent aux Églises d'organiser une évasion massive ...

« Cela signifie qu'il y a un risque très réel aujourd'hui que le Moyen-Orient, l'Irak, la Syrie perdent tous ses Chrétiens. Toute déclaration qui pourrait inciter nos gens à émigrer est irresponsable en ce moment. On ne peut pas parler avant qu'ils ne prennent tous les facteurs et les conséquences possibles en considération ainsi que la façon dont nos paroles pourraient être interprétées ».

Certains prétendent que les intérêts économiques sont à l'origine de l'accueil soudain donné aux immigrants. Est-ce vraiment quelque chose qui peut agir dans la situation ?

« J’ai entendu des gens dire qu'ils (les pays d’accueil) sont à la recherche des jeunes et qu'ils ne veulent pas les personnes âgées ni les malades. Les gouvernements de droite comme de gauche sont d'accord sur ce point. Il y a quelque chose d'étrange. Je peux confirmer que ce ne sont pas seulement les personnes déplacées qui fuient. Les prêtres me disent qu'il y a aussi des gens qui ne sont pas trop mal à l'aise financièrement, les gens qui travaillent dans les banques par exemple, qui quittent. Les gens qui n’ont vraiment pas besoin de quitter. Ils estiment qu'une fenêtre d'opportunité s’est ouverte et ils craignent que cette fenêtre se referme bientôt alors ils en profitent. Pendant ce temps, ceux qui sont plus pauvres n’envisagent même pas de quitter. Tout le monde est perdant. Les plus capables quittent et ils sont les seuls qui pourraient reconstruire tout ce qui a été détruit au cours des dernières années. Et cela nous affecte, nous les Chrétiens, d'une manière spéciale. Les Chrétiens, avec leur ouverture et leur humanité, qui sont capables de vivre aux côtés des autres, auraient pu avoir joué un rôle crucial dans la terre où ils sont nés et où leurs pères vivaient également. Avec le temps, ils auraient aussi pu aider leurs concitoyens musulmans à se libérer de l'idéologie djihadiste qui cause de grandes souffrances chez eux aussi. Nous avons ouvert des Églises, des écoles, des cliniques et des hôpitaux. C’est un réseau d'organismes qui a fait beaucoup pour améliorer la coexistence pacifique et la vie sociale au sein des communautés, rendant les services accessibles à tous. Maintenant, il semble que tout cela est destiné à disparaître aussi ».


Dans la dernière année, vous et votre Église avez combattu contre le phénomène des prêtres et des religieux qui ont émigré à l'Ouest sans le consentement de leurs Évêques ...

« Les prêtres et les religieux qui s’échappent du Moyen-Orient sont des « émigrés de luxe ». Ils profitent de leur statut, de leurs contacts et du soutien de l'Église pour échapper, se faisant passer pour des personnes persécutées et utilisent même cette étiquette pour faire de l'argent dans certains cas. Parfois, ils parviennent à créer des entreprises rentables et sacrilèges utilisant le mot-clé « persécution ». Plusieurs d'entre eux se sont échappés des refuges où il n'y avait pas de persécution et ont ensuite aidé leur famille entière à s’installer confortablement en Amérique du Nord. Sans l'autorisation de leur Évêque et en trahissant l'esprit du Bon Berger ».

Mais des bergers sont également nécessaires dans les communautés des Chrétiens du Moyen-Orient qui ont émigré à l'Ouest ...

« Les Évêques qui servent les communautés de la diaspora ne peuvent pas venir « voler » le Moyen-Orient de ses prêtres. Ils peuvent aller s’en chercher dans leurs communautés qu'ils prétendent d’ailleurs qu’elles sont florissantes. Le fait que nous ayons embrassé la prêtrise dans ces terres signifie que nous avons offert notre vie au Seigneur et il ne faut pas chercher une vie de luxe pour nos familles. Ces « émigrés de luxe » ont donné un mauvais exemple pour le reste du peuple. Notre sacerdoce nous emmène souvent à des endroits où les gens souffrent. Être proches d'eux et montrer que vous pouvez éprouver la joie de l'Évangile, même ici, dans cette situation ».

Vous avez récemment dénoncé le vol des maisons et des terres appartenant à des Chrétiens qui ont quitté. Et pas seulement dans les territoires qui ont été prises par le Califat ...

« Les zones occupées par Daesh ne sont pas libérées. Peut-être que cela convient à certains. Pendant ce temps, les maisons et les terres des Chrétiens sont maintenant expropriées illégalement à Bagdad et à Kirkouk. Il y a un risque d'équilibres démographiques qui seront altérés pour de bon dans ces régions. Une action internationale est nécessaire afin d'assurer que les droits et les biens de ceux qui ont été forcés de quitter et qui peuvent avoir l'intention de revenir un jour soient respectés. L'ONU doit faire face à cela ».

Y a-t-il un moyen de sortir de la misère qui déferle sur le Moyen-Orient ?

« Je l'ai dit à la Communauté de Sant'Egidio qui se réunissait à Tirana et aussi à Paris, à la conférence organisée par l'Œuvre d'Orient : Il n'y a pas de « bouton magique » sur lequel appuyer pour faire tout ok en un éclair. Il faudra beaucoup de temps avant que cette terrible situation puisse être guérie. La défaite de l'idéologie djihadiste nécessite l'implication des autorités musulmanes et des gouvernements arabes. Mais les cercles Occidentaux du pouvoir ont soutenu les forces et les États où les djihadistes ont toujours bénéficié de plus de soutien. Maintenant, avec la situation des réfugiés, ces cercles Occidentaux en appellent à l'humanisme des gens qui est heureusement encore en vie dans de nombreuses personnes. Pendant ce temps, les complicités et la protection dont les djihadistes ont joui jusqu'à présent ainsi que la circulation de l'argent et des armes sont cachées. Les guerres contre le terrorisme et en faveur de la démocratie a commencé en 2003 et le résultat a été la naissance du monstre qui est Daesh. Assurément, ça doit nous dire quelque chose ».

(1) : Dans un autre interview en français très récent ici, Mgr Sako a affirmé ceci : Décidé à faire bouger les choses, le patriarche a réclamé l’envoi de casques bleus par l’ONU ainsi qu’une « intervention militaire au sol », convaincu que les bombardements aériens sont trop aléatoires et peu efficaces.

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