par : Dr. Jeff Mirus ( Droit Canon)
Le 17 mars 2017
SOURCE : Catholic Culture
On se demande où François trouve les personnes qui fournissent à l'Osservatore Romano des articles qui attaquent ceux qui soulèvent des questions au sujet de son leadership. Le dernier est le Père Salvador Pié-Ninot, qui a critiqué ce qu'il appelle « la dissidence sous la forme de critique publique » de l'Exhortation Apostolique Amoris Laetitia. Bien sûr, je ne sais pas si le Pape a activement recruté le Père Pié-Ninot. Comme en témoigne la diatribe publiée par le Cardinal Donald Wuerl de Washington, il y a beaucoup d'ecclésiastiques qui sont heureux de prêcher la Tradition et l'Orthodoxie quand ceux qui peuvent les promouvoir sont traditionalistes et orthodoxes et de condamner ceux qui valorisent la Tradition et l'Orthodoxie quand ceux qui peuvent les promouvoir ne le font pas.
Cela n'a rien de nouveau bien que je reconnaisse volontiers l'incertitude quand il s’agit d’attribuer des motifs dans des cas particuliers. Ce que je sais vraiment, cependant, c’est que les arguments présentés par le Père Pié-Ninot déforment complètement la nature des préoccupations des fidèles en la matière. Comme le Père Pié-Ninot est un théologien, on a peu de choix de supposer qu’une telle déformation soit ou bien délibérée ou bien inconsciemment motivée par une idéologie — même si l'on admet que ceci est seulement une hypothèse raisonnable et non pas un fait connu.
Je dis cela parce que la critique du Père Pié-Ninot est basée sur l'affirmation que certains Catholiques se sont rendus coupables de « dissidence sous la forme de critique publique ». Mais il y a deux erreurs flagrantes dans cette affirmation. Tout d'abord, la critique n’est pas dissidence à moins qu'elle prenne la forme de nier la vérité sur quelque chose que l'Église a enseigné. Deuxièmement, et ceci est le point principal, comme règle générale ceux qui ont critiqué l'approche du Pape face au divorce, au remariage et à la Communion n’ont pas nié la vérité de quoi que ce soit que François a officiellement enseigné.
Deux questions
Je regrette que, même dans certains de nos propres commentaires, nous avons utilisé une sorte de sténographie, en parlant de la controverse sur Amoris Laetitia. Mais la controverse qui secoue l'Église à l'heure actuelle ne porte pas sur ce que Amoris Laetitia dit réellement mais comment ça doit être interprété dans la pratique. Les questions se posent précisément parce que François lui-même a encouragé les Évêques et les pasteurs à répondre à ces questions de mariage selon des manières qui (a) sont interdites selon le droit canonique ; (b) qui sont contraires à la Tradition Catholique et à l'enseignement magistériel clair du Pape Jean-Paul II ; et (c) qui ne sont pas, en fait, enseignées dans Amoris Laetitia.
Le seul problème que les critiques raisonnables ont discerné (pour utiliser l'un des mots préférés de François Pape) dans Amoris Laetitia est un manque malheureux (et peut-être tendancieux) de clarté. Cela affecte deux questions particulières :
La Gradualité :
Dans la section 8 du document, François répète la conclusion du Pape Jean-Paul II que la gradualité dans la théologie morale peut être utilisée pour décrire les étapes subjectives de la croissance morale, mais ne peut jamais être comprise comme étant la « gradualité de la loi ». Bien que François ne le dise pas, la gradualité de la loi signifierait que les différents enseignements moraux s’appliquent aux personnes à différents stades de croissance morale : ce qui est un péché pour un saint ne sera pas jugé coupable pour une personne qui est moins avancée spirituellement. Ceci, bien sûr, serait un non-sens. Les comportements pécheurs sont objectivement faux. Seuls les degrés de culpabilité personnelle peuvent varier.
Malheureusement, au lieu de clarifier ce point, François poursuit avec une discussion qui peut être interprétée comme sautant directement dans ce qu'il vient de refuser, à savoir la gradualité de la loi. Il suggère (mais ne l’enseigne pas clairement) qu'il est possible de reconnaître qu'un pécheur peut faire du mieux qu'il peut même s’il a choisi de persister dans son péché (par opposition à celui qui se repent mais qui tombe parfois à nouveau). Cela conduit à une spéculation (implicite) à savoir si la personne doit être jugé comme péchant. Le Pape suggère (mais ne l’enseigne pas clairement) l'idée qu'une telle personne peut poursuivre un moindre bien qui est simplement à court de l'idéal. Dans la mesure où ce texte peut être pris pour miner la confiance de l'Église dans la libération de la grâce disponible par le Christ, la discussion serait interprétée comme dérivant tacitement vers la gradualité de la loi.
L'admission à la Communion :
Sur la question de l'évolution de l'enseignement Catholique traditionnel et de la discipline concernant la réception de l'Eucharistie, le texte d’Amoris Laetitia ne le traite pas directement. Au contraire, il offre deux indices incertains.
Premièrement, dans le paragraphe # 300, le texte indique que, « le degré de responsabilité n’est pas le même dans tous les cas », « les conséquences ou les effets d'une norme ne doivent pas nécessairement être toujours les mêmes ». La note de bas de page # 336, attachée à cette phrase, n’est pas beaucoup plus claire : « Pas davantage en ce qui concerne la discipline sacramentelle...»
Deuxièmement, # 305, le texte se lit comme suit : «À cause des conditionnements ou des facteurs atténuants, il est possible que, dans une situation objective de péché – qui n’est pas subjectivement imputable ou qui ne l’est pas pleinement – l’on puisse vivre dans la grâce de Dieu, qu’on puisse aimer, et qu’on puisse également grandir dans la vie de la grâce et dans la charité, en recevant à cet effet l’aide de l’Église ». Mais il n'y a pas de clarification de ce que cela pourrait signifier dans les cas de mariage, et, encore une fois, la note 351 (attachée à cette phrase ), n’est pas beaucoup plus claire : « Dans certains cas, il peut s’agir aussi de l'aide des sacrements ». La note rappelle ensuite les lecteurs de certains aspects de la Pénitence et de l'Eucharistie, sans préciser quand et comment ils doivent être utilisés. Pourtant, l'utilisation des deux a été exprimée clairement et uniformément dans le passé, en encourageant la Pénitence dans ces cas et interdisant la Communion.
Confusion immédiate
Il est impossible de prétendre (comme certains ecclésiastiques l’ont fait) qu'il n'y a pas de confusion sincère. En tant que document public, le texte de Amoris Laetitia qui affecte ces deux questions a signifié des choses différentes, même auprès de différents Évêques et Cardinaux. Certains Évêques (et les Conférences Épiscopales) ont décidé que le texte ne change pas la discipline sacramentelle existante de l'Eucharistie, d'autant plus que le droit canonique n'a pas été modifié. En effet, cela est aussi la conclusion du Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, le Cardinal Gerhard Müller. D'autres Évêques (et les Conférences Épiscopales) ont décidé que le texte a l'intention de permettre la réception de la Communion dans une partie (ou quelques) cas par ceux qui sont divorcés et remariés, sans bénéficier d'une nullité après une période de discernement avec l'aide de leurs pasteurs.
D'autres Évêques ont décidé que la réception de la Communion pour les personnes dans toutes sortes de situation matrimoniale irrégulière est maintenant laissée aux personnes concernées ; elles doivent décider elles-mêmes si elles se sentent suffisamment à l'aise avec leur situation pour recevoir l'Eucharistie. Pour autant que nous savons, François n'a jamais même officieusement favorisé cette troisième point de vue, mais non plus n’a-t-il officieusement favorisé la première. La seule interprétation que le Pape a favorisé dans des interviews, des conversations et des lettres personnelles est la deuxième. Pendant ce temps, un certain nombre d'Évêques et de théologiens ont proposé des exemples de cas qui pourraient justifier la réception de la Communion en vertu de la seconde interprétation, mais ils n’ont pas convenu entre eux lesquels cas seraient admissibles.
En d'autres termes, il existe diverses interprétations mutuellement incohérentes à tous les niveaux et c’est précisément ce dont les fidèles Catholiques partout dans l'Église se sont plaints. En outre, c’est précisément cette confusion que les Cardinaux qui ont soumis les « dubia » au Pape François espéraient remédier. Ils ont utilisé la méthode traditionnelle de demander des éclaircissements en présentant un certain nombre de questions précises qui ne peuvent être répondues que par un « oui » ou un « non » clair. Pour leur labeur, François a non seulement refusé de préciser ce qu'il veut dire, mais il a rabaissé tous ceux qui ont des questions, y compris les Cardinaux. Il leur a tiré des noms, il a lancé une campagne de critique publique, il a rétrogradé des critiques ainsi qu’encourager à la fois la publication et de promotion de ceux qui sont prêts à défendre l'incertitude, prétendant que seuls les mauvais Catholiques sont confus.
Conclusion
Le but de tout cela est de démontrer que le Père Salvador Pié-Ninot a complètement raté la cible en caractérisant les Catholiques avec des questions légitimes comme des dissidents. La vérité est que aucun de ceux qui sont confus par le comportement général du Pape dans cette affaire ne l'ont accusé d'erreur dans l'exercice de son magistère ordinaire (comme Amoris Laetitia). Ce qui les préoccupe est l'incertitude du texte couplé avec le soutien personnel (non-magistériel) du Pape des pratiques pastorales qu’il, encore une fois, n'a pas officiellement enseignées. Sommairement, ces pratiques pastorales et les revendications qui les justifient contredisent le Code de Droit Canon, dévient de la Tradition Catholique, diffèrent de la conclusion formelle enseignée sur ce même sujet par le Pape Jean-Paul II dans Familiaris consortio (n ° 84) et ont donc jeté l'Église dans le conflit et la confusion dans le monde entier.
Il est essentiel de reconnaître que ce n'est pas une question de dissidence. C’est une demande pour l'élimination de la grave confusion qui a été activement encouragée par le Pape. Comme je l'ai dit à plusieurs reprises, François poursuit activement un programme pastoral et administratif fondé sur les principes de la Foi et de la morale que le Saint-Esprit semble l'avoir empêché d'enseigner officiellement. Dans de telles circonstances, la dissidence n’est pas en question du tout. Il est honteusement malhonnête de laisser entendre qu'elle y est. Deux seules choses entrent dans cette question : la consternation que ça se produit dans l'Église et une profonde préoccupation pour le soin des âmes.
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