dimanche 11 septembre 2016

François dans le contexte conciliaire



Howard Kainz
Mercredi, 7 septembre 2016
SOURCE : The Catholic Thing




Après son élection à la papauté, le Pape François lui-même s’est décrit comme « un fils fidèle de l'Église ». Mais comme nous le savons que trop bien, les réactions de François dans la presse écrite Catholique et dans les publications en ligne au cours des quelques dernières années ont susciter toute la gamme des émotions partant du positif au négatif passant par le « confus». Ça peut être une quête futile, mais ça peut aider à notre compréhension d'un Pape qui n’est pas facile à comprendre de voir précisément comment il essaie, tant bien que mal, de mettre en œuvre les objectifs du Concile Vatican II.

Commençons par examiner certains des principaux objectifs du Concile :

1. Aggiornamento : La « mise à jour» de l'Église recherchée par le Pape Jean XXIII a rapidement tourné à de l'œcuménisme sérieux, avec l'espoir de favoriser l'unité chrétienne en rejoignant les Protestants et les Orthodoxes. Dans l'esprit des Pères du Concile les plus optimistes, une possibilité existait de réaliser enfin la vision de Jésus à la Dernière Cène : « Que tous soient un ». Très peu de temps après que le Concile eut commencé, le Secrétariat pour la Promotion de l'Unité des Chrétiens a reçu le pouvoir par le Pape Jean XXIII de vérifier et, si nécessaire, de réorienter les travaux des diverses autres commissions.

2. Dans les milieux théologiques, il y avait encore de forts vestiges de conciliarisme qui était considéré comme ayant été rejeté par la forte affirmation des prérogatives du Pape, y compris l'infaillibilité pontificale de Vatican I. Vatican II offrait une fois pour toutes la chance d’effacer le question de la compétence du Pape. Cette précision était attendue afin de soutenir les objectifs œcuméniques des « Progressistes » au Concile, surmontant les craintes des Protestants et des Orthodoxes concernant la subordination au Pape.

3. Le Code de Droit Canonique de 1917, qui était exécutoire dans les années 1960, distinguait clairement la fin « primaire » du mariage — à savoir la procréation — de la « fin secondaire » — à savoir « l'entraide mutuelle et l’apaisement de la concupiscence ». Le stéréotype au sujet des Catholiques comme étant de ceux qui mettent l'accent sur « la reproduction » se devait d’être surmonté, de l'avis de certains Pères Conciliaires et de leurs conseillers théologiques, en reformulant la théologie du Sacrement du Mariage.

4. Les Catholiques dans les années 1960 ont prié pour les « Juifs perfides » dans la liturgie du Vendredi Saint et ils étaient familiers avec la représentation traditionnelle de l'Église Catholique comme étant le « Nouvel Israël » supplantant l’Alliance de l'Ancien Testament. Mais ils étaient aussi intensément conscients des possibles ramifications antisémites à la suite de l'Holocauste et de la formation du nouvel État d'Israël. De repenser la relation du Catholicisme envers le Judaïsme était indispensable.

Il est également utile d'examiner la façon dont le Concile s’est mis à fixer les objectifs de Vatican II :

1. L’oecuménisme : les « observateurs » Protestants et Orthodoxes ont été accueillis au Concile et ont été consultés fréquemment pour leur apport œcuménique. Dans le document, Lumen Gentium, l'Église Catholique a été présentée comme un élément central du plan du salut, mais son adhésion n'était pas nécessaire pour le salut dans les cas de « l'ignorance invincible ». La Messe devait être offerte dans la langue vernaculaire et envisagée comme la « Cène du Seigneur » comparable ainsi à celle de nombreuses dénominations Protestantes. Des dispositions ont été prises pour les « dialogues interreligieux » avec les Confessions Chrétiennes et les Patriarches Orthodoxes.

2. La primauté papale : les Progressistes au Concile se sont engagés à surmonter les « dommages » encourus au Vatican I par la proclamation de l'infaillibilité pontificale. En essayant de démocratiser l'Église, ils ont souligné la « collégialité », une primauté du Collège Apostolique, avec le Pape comme Primus inter pares, i.e. « premier parmi les égaux ». Mais en dépit de quelques succès, les Progressistes ont subi la défaite. Le Pape Paul VI (sur ce que les Progressistes appellent le « jeudi noir ») a ajouté de nombreuses modifications apportées aux documents clarifiant la primauté du pontife en ce qui concerne le collège épiscopal et ajoutant que, si un Pape pouvait souhaiter consulter le Collège Apostolique, son autorité ne dépendait pas de cette consultation. De même, lorsque les Progressistes ont vaincu avec succès les efforts de nombreux Pères du Concile de proclamer Marie comme « Co-rédemptrice » — qu'ils considéraient comme un obstacle au regroupement avec les Protestants — le Pape Paul VI a mis un terme à la Commission d'examen de cette question et a insisté pour que le Concile donne à Marie le titre : « Mère de l'Église ».

3. Le mariage et la procréation : En ce qui concerne le mariage, le Concile a complètement laissé tomber la terminologie « primaire » et « secondaire », exhortant les couples mariés à « glorifier le Créateur » en procréant, mais a aussi mentionné de façon quelque peu ambiguë que les « Fils de l'Église ne peuvent pas entreprendre d’utiliser des méthodes de contrôle des naissances qui se trouvent blâmables par l'autorité d'enseignement de l'Église dans son déploiement de la Loi Divine ».

4. Les Juifs et le plan du salut : Dans Nostra Aetate, l'élucidation de l'importance de l'Alliance de Dieu avec les Juifs a conduit à l'élimination des charges de « déicide » juif dans les documents de la liturgie et de l'Église.

Les mises en oeuvre personnelles du Pape François :

1. Vers le regroupement des Chrétiens : au cours de son pontificat, François a eu de nombreuses rencontres cordiales avec des Protestants et prévoit se rendre à Lund, en Suède, en octobre pour le 500e anniversaire de la Réforme Protestante. Il a développé « une relation chaleureuse » avec le Patriarche Oecuménique Orthodoxe Bartholomée et a publié une déclaration conjointe à l'amiable avec le Patriarche Russe Krill à Cuba. En un mot, il « enlève tous les obstacles » dans l'entreprise œcuménique de Vatican II.

2. Sur la collégialité et la papauté : la participation de François dans les sessions du Synode extraordinaire sur le mariage ainsi que l'inclusion de la note très discutée 351 au paragraphe §305 de son Exhortation Apostolique post-synodale, Amoris laetitia, indiquent qu'il est en train d’essayer d'inclure des positions minoritaires qu'il peut ou ne peut pas être d'accord avec le Collège apostolique.

( Note du traducteur : il ne faudrait pas oublier la décentralisation des décisions ( et même de nature doctrinale !) auprès des Conférences des Évêques telle que le Pape l’a stipulée à la Conférences des Évêques Polonais lors de son séjour dans ce pays lors des JMJ de Cracovie. Cette décentralisation suggérée aux Évêques Polonais portait sur la Communion aux divorcés/remariés. Mais elle peut porter sur toute autre chose, a-t-il dit, qui requiert une « adaptation à la culture ». Voilà pour l’érosion du pouvoir unique de décision du pape ( ou primauté papale ) qu’a voulu protégé Paul VI. Voir plus haut. )

3. Le mariage sacramentel : François suit méticuleusement l'exemple de Vatican II dans le fait de minimiser la distinction entre la fin « primaire » et la fin « secondaire » du mariage. Dans une interview au sujet du virus Zika, il a indiquer la contraception comme un « moindre mal » que l'avortement, car c’est une infraction contre le sixième commandement plutôt que contre le cinquième.

( Note du traducteur : l’auteur, bien malgré lui au moment de publier son article, ignorait la lettre du Pape aux Évêques Argentins confirmant la pleine valeur de la note # 351 qui permet de donner la Communion aux divorcés/remariés, dévalorisant ainsi le Mariage sacramentel. C’est sans compter ses deux affirmations à St-Jean de Latran : que la « grande majorité des mariages sacramentels sont nuls » et que des concubins fidèles l’un à l’autre sont parfois mieux que des mariages. Voilà pour la perception papale du Mariage sacramentel. )

4. Sur l'antisémitisme : Malheureusement, comme je l'ai mentionné dans une colonne précédente, des déclarations positives du Concile sur le Judaïsme a également conduit à une croyance de certains Pères du Moyen-Orient, que Nostra Aetate pourrait être perçue comme « pro-sioniste » et devrait être équilibrée avec des évaluations positives similaires pour l'Islam. Cette manœuvre purement politique n'a pas été favorable aux intentions oecuméniques du Concile mais elle a été perpétuée par le Pape en dépit des conflits avec la réalité.

Plusieurs ont écrit au sujet des racines Argentines de François et il y a beaucoup à y comprendre tout aussi bien. Mais il est également tout à fait clair qu'il est en train de poursuivre un programme conciliaire que plusieurs pensaient avoir été réglé — plutôt différemment — depuis des décennies.

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