jeudi 24 août 2017

Le Cardinal Burke
« Le Pape n'est pas une idole »

Partie 2




par Christopher A. Ferrara
SOURCE : Fatima Network Perspectives
Le 23 août 2017

Ma dernière chronique a discuté d'une récente allocution du Cardinal Burke dans laquelle il a distingué « les paroles de l'homme qui est le Pape et les paroles du Pape en tant que Vicaire du Christ sur terre ». J'ai comparé cette distinction avec l'observation du Père Aidan Nichols en regard à la crise provoquée par Amoris Laetitia, à savoir que « ce n'est pas la position de l'Église Catholique Romaine qu'un Pape soit incapable de détourner les gens par un faux enseignement en tant que docteur [enseignant] public ... Il peut être le Suprême Juge d'Appel de la Chrétienté ... mais cela ne l'empêche pas de commettre des gaffes doctrinales ».

L'auteur de cet éditorial est Monsieur Christopher A. Ferrara. Monsieur Ferrara est avocat de profession. Il agissait aussi comme collaborateur principal de Feu Père Nicholas Gruner, fondateur du Centre de Fatima, Fort Érié, Canada et ayant aussi des installations à Rome. Il est chroniqueur dans plusieurs autres sites catholiques dont Le Remnant Newspaper.

Mais si un Pape devait prononcer un faux enseignement « en tant que docteur public », est-ce qu'il le fait, à proprement parler, comme Vicaire du Christ sur terre ? Ici, la distinction du Cardinal Burke mérite une discussion plus approfondie. Dans le texte original complet de l'intervention du Cardinal que j'ai examiné, il a fait une observation supplémentaire : « Il est absurde de penser que le Pape François peut enseigner quelque chose qui n'est pas conforme à ce que ses prédécesseurs, par exemple les Papes Benoît XVI et Saint Jean-Paul II, ont enseigné solennellement ».

Une lecture superficielle de cette assertion pourrait conduire à penser que le Cardinal a commis une erreur, compte tenu des exemples historiques, peu nombreux, des Papes qui ont prononcé une sorte d'erreur théologique, comme Jean XXII ( 1316-1334 ), mentionnée dans ma dernière chronique, ou Honorius I ( 625-638 ), qui a été réellement condamné et anathématisé à titre posthume comme complice de l'hérésie par un Concile Oecuménique et par son propre successeur, Léon II.

Comme je l'ai noté dans ma chronique précédente sur ce sujet, la distinction du Cardinal entre les capacités de la personne qui occupe la fonction papale n'excuse pas la responsabilité du Pape des conséquences de la promulgation de vues théologiques personnelles en contradiction avec le Magistère perpétuel. Les conséquences peuvent être désastreuses car les Catholiques assis dans les bancs ne perçoivent pas la distinction que le Cardinal tire.

Néanmoins, il me semble évident que le Cardinal ne se référait pas à « l'enseignement » comme une simple expression verbale qui provient d'un Pape sous forme orale ou écrite, mais plutôt à l’« enseignement » en tant que présentation formelle de la Doctrine Catholique liant clairement l'Église — et non pas une simple opinion, commentaire, suggestion ou spéculation, comme on en voit dans Laudato si , qui est rempli avec un tel matériel étranger.

Considérons une fois de plus l'exemple de Jean XXII, qui a prêché à plusieurs reprises l'erreur que les âmes des bienheureux qui nous ont quittés, même après le Purgatoire, ne profiteront pas de la Vision Béatifique jusqu'au Jour du Jugement, quand ils seront finalement admis dans la plénitude de la communion éternelle avec Dieu. En outre, Jean XXII a publié un traité soutenant son opinion novatrice. Il semble certainement parler en tant que Vicaire du Christ. Mais quand on examine les détails de l'affaire, on voit que ça correspond précisément à la distinction du Cardinal Burke entre le Pape agissant comme Vicaire du Christ et le corps du Pape en tant que personne privée avec ses propres vues personnelles. Dans le récit historique exhaustif du Père Victor François O'Daniel, nous lisons ce qui suit :

« [ Le Pape Jean a maintenu] qu'il avait prêché comme un simple théologien privé, et non en tant que chef de l'Église, qui définit une doctrine à être acceptée comme un article de Foi ; que, par conséquent, son avis, étant donné comme celle d'un docteur privé, était soumis au jugement et à la décision de l'Église à être approuvé ou condamné, car son avis pouvait être trouvé vrai ou faux ; qu’en outre, la question était ouverte à la discussion et que chaque théologien était libre d'accepter et de défendre quel que soit leur côté de la controverse qu'il jugerait être le vrai. Il n'a pas, par conséquent, donner une décision ex Cathedra liant les consciences des fidèles ... »

Notez bien : Jean XXII a admis ce qui était déjà évident du contenu même de sa fausse prédication : ce n’était rien de plus que son opinion égarée en tant que « théologien privé ». Ce n’est pas devenu égaré parce qu'il a admis qu’il en était ainsi, mais plutôt parce que ce l’était en soi-même, étant en effet quelque chose que l'Église n'avait jamais enseignée auparavant.

Maintenant, François peut ne pas être disposé à admettre expressément ce que Jean XXII se sentait obligé d'admettre lorsque son erreur a été reçue avec une opposition furieuse à travers la Chrétienté : c'est-à-dire qu'il exprimait simplement ses vues personnelles, qui sont discutées et sujettes à correction. Le Pape François peut même être tellement malavisé de penser que tout ce qu'il dit ou écrit est obligatoire pour les fidèles simplement par le fait qu'il l'ait dit ou écrit, peu importe le contexte ou le contenu de l'énoncé.

Mais, à mon avis, cela ne change pas la réalité de la distinction que le Cardinal Burke a tirée : le Vicaire du Christ agissant exactement comme Vicaire du Christ ne peut pas enseigner l'erreur, pour la même raison que le Magistère authentique en tant que l’authentique Magistère ne peut pas contenir d'erreur. Il n'y a pas de « magistère du Pape » , mais seulement le Magistère de l'Église. Les concepts d’« erreur » et de « Magistère » sont mutuellement exclusifs. Ainsi, je ne vois pas comment un Catholique pourrait raisonnablement dire « le Magistère a commis une erreur » au sujet d'une déclaration erronée d'un Pape particulier. Et si le Magistère n'a pas commis une erreur quand un Pape particulier commet une erreur, comment peut-on dire raisonnablement que le Vicaire du Christ a commis une erreur par opposition au Pape à titre personnel ?

Donc, il semble assez clair que le Vicaire du Christ, agissant en tant que tel, ne puisse pas transmettre des vues personnelles erronées sous le label « Magistère » simplement en refusant d'admettre que ce sont ses points de vue personnels. S'il en était autrement, nous aurions alors à dire qu’avec l'avènement du Pape François, le Vicaire du Christ a passé les quatre dernières années à pousser toutes sortes d'opinions fausses ou douteuses, comme indiquées ici (Denzinger en anglais) .

Par conséquent, n’est-il pas au moins raisonnablement possible de soutenir que ce serait vraiment absurde de dire que le Vicaire du Christ en tant que tel et qui est actuellement régnant a contredit tous ses prédécesseurs Vicaires du Christ ? S'il y a une contradiction, c'est entre un Pape qui parle en tant que théologien privé et les précédents Vicaires du Christ enseignant comme Vicaires du Christ. Lorsque le Pape abuse de son pouvoir en faisant passer ses vues personnelles comme s'il s'agissait du Magistère, soutient le Cardinal Burke, il ne le fait pas, à proprement parler, comme Vicaire du Christ même si son abus de pouvoir a des conséquences terribles pour lesquelles un tel Pape égaré est responsable.

La distinction proposée par le Cardinal Burke est, souligne-t-il, dans le raisonnement des théologiens au Moyen-Âge :

« Au Moyen-Âge, l'Église a parlé des deux corps du Pape : le corps de l'homme et le corps du Vicaire du Christ. En fait, les vêtements traditionnels papaux, en particulier la mozette rouge avec l'étole représentant les Apôtres Saint Pierre et Paul, représente visiblement le véritable corps du Pape quand il présente l'enseignement de l'Église ».

Il est révélateur que, quand François est apparu sur le balcon de Saint-Pierre après son élection, et même le résolument « normaliste » Vatican Insider admet que : « Alors que Marini a placé la mozette sur François, le Pape a simplement dit : « Je préférerais que vous ne le fassiez pas » ».

Faites-en de ce que vous voulez. Mais il est évident que nous avons un Pape qui, peut-être instinctivement ou même sous la contrainte négative du Saint-Esprit, évite ce degré de formalité ou de langage de commandement dans ses déclarations qui indiquerait une véritable intention, en tant que Vicaire du Christ, de lier l'Église à ses opinions innovatrices.

En conclusion, il semble raisonnable de faire valoir — et sûrement qu'il y a place au débat — que les nouveautés du Pape François ne peuvent pas, à proprement parler, être attribuées au Vicaire du Christ par opposition à la personne de l'homme qui occupe maintenant l’office de Pape. S'il n'y avait pas une telle distinction, il faudrait dire que chaque énonciation de François est une déclaration du Vicaire du Christ sur terre pour autant qu'il n'exprime pas expressément « ce n'est que mon opinion ». Cela entraînerait vraiment des absurdités et donc une érosion de la confiance parmi plusieurs envers le Pape en tant que Vicaire du Christ.



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