Par Maike Hickson
SOURCE :One Peter Five
Le 8 avril 2016
Vatican
François vient de publier son Exhortation Apostolique tant attendue sur la famille, Amoris Laetitia. Dans ce document, il répète plusieurs des déclarations problématiques et controversées entendues lors des Synodes des Évêques sur la famille de 2014 et de 2015. Parmi ceux-ci, on trouve la loi du gradualisme en ce qui concerne les relations pécheresses, l'affirmation selon laquelle il y a des « graines » de bonté dans ces relations qui sont objectivement contraires aux Lois de Dieu ; il y a aussi dans ce document un ton général à ne pas parler de péché du tout en ce qui concerne ces modes de vie qui mettent l'âme du pécheur persistant gravement à risque de ne pas atteindre le salut éternel.
François cite amplement les deux rapports du Synodes de 2014 et de 2015, ce qui démontre qu’il approuve la façon dont les questions ont été traitées ainsi que la façon dont on a habilement dirigé l'Église vers une attitude plus clémente en ce qui concerne le pécheur et son inconduite. Aussi il « réaffirme clairement que tous les débats doctrinaux, moraux ou pastoraux ne doivent pas être tranchés par des interventions magistérielles ». Selon François, il peut y avoir « différentes interprétations de certains aspects de la doctrine ou certaines conclusions qui en dérivent ». Il insiste explicitement :
« En outre, dans chaque pays ou région, peuvent être cherchées des solutions plus inculturées, attentives aux traditions et aux défis locaux. Car « les cultures sont très diverses entre elles et chaque principe général (...) a besoin d’être inculturé, s’il veut être observé et appliqué ».
Le Pape choisit cependant de ne pas définir ce qu’il veut dire par « solutions plus inculturées ». Est-ce, en fait, une forme de relativisme culturel et moral ? La réponse n’est pas évidente sur le coup.
A côté de ces thèmes, si l’on considère les problématiques en elles-mêmes, il y a deux graves et très sérieuses déclarations dans ce nouveau document du Pape qui n’ont pas été discutées au cours des deux précédentes sessions du Synode de la manière et qui apparaissent dans l'Exhortation. Chacune représente un écart par rapport à l'enseignement moral traditionnel de l'Église Catholique, conséquemment elles s’écartent effectivement du Magistère Universel de l'Église.
Dans le chapitre 8 (paragraphe 298), François parle des divorcés et « remariés » et déclare qu’il faut examiner chaque cas individuellement — suggérant une forme de Nominalisme — puisque chaque cas ne doit pas être évalué de la même manière. Comme exemple, il se réfère à un second « mariage » qui a été « consolidé » et qui a également « de nouveaux enfants, avec une fidélité prouvée, un don de soi généreux, un engagement Chrétien » — mais qui est aussi « conscient de l’irrégularité de sa propre situation et une grande difficulté à faire marche arrière sans sentir en conscience qu’on commet de nouvelles fautes ». Comme exemple, François amène l'éducation des enfants qui appelle le couple « remarié » de rester étroitement ensemble comme couple. Alors que cet exemple a été amené à plusieurs reprises au cours deux dernières années, François ajoute une nouveauté dans sa note (329) à ce paragraphe :
« Dans ces situations, connaissant et acceptant la possibilité de cohabiter « comme frère et sœur » que l’Église leur offre, beaucoup soulignent que s’il manque certaines manifestations d’intimité « la fidélité peut courir des risques et le bien des enfants être compromis » (Conc. œcum. Vat. II, Const. past. Gaudium et spes, sur l’Église dans le monde de ce temps, n. 51). » [ ici, il est fait référence à la constitution du Concile Vatican II sur l'Église dans le monde moderne, Gaudium et Spes.]
Ce que cela signifie concrètement, c’est que le Pape envoie un message profondément troublant : ceux qui vivent dans l'état objectif de l'adultère (car ils sont encore sacramentellement et valablement mariés à leur conjoint réel, pas à la personne avec qui ils vivent) et ont des enfants de ce deuxième « mariage », ils sont tenus de rester essentiellement dans cette relation, en vivant comme mari et femme (qu’ils ne sont pas) et en continuant à se livrer à des actes appropriés seulement aux conjoints dûment mariés et, donc, qui sont des relations adultères dans leur nature. Dans le cas contraire, le Pape raisonne-t-il, leur nouvelle relation — et le bien-être des enfants impliqués — pourraient être mis en danger ! En cela, François sape l’enseignement moral Catholique à sa base et met les préoccupations supposément pratiques au-dessus du souci supérieur du salut des âmes.
Au paragraphe 299 du chapitre 8, qui traite en général des unions « irrégulières », François affirme également que les divorcés et « remariés » devraient être plus « intégrés » dans la vie de l'Église, « afin que non seulement ils sachent qu’ils appartiennent au Corps du Christ qu’est l’Église, mais qu’ils puissent en avoir une joyeuse et féconde expérience ». Il propose de supprimer » les formes d'exclusion » dans « les domaines liturgique, pastoral, éducatif et institutionnel ».
Dans ce contexte, au paragraphe 300, François apporte cette notion d'un « processus responsable d'accompagnement et de discernement » avec l'aide du « for interne » dans lequel les divorcés « remariés » discernent leur situation particulière propre à l'aide d'un prêtre. « Discernement », « accompagnement pastoral » et « intégration » sont des mots clés ici. Dans ce contexte, le Pape appelle aussi à l'humilité, la discrétion, l'amour pour l'Église et son enseignement et pour la recherche de la Volonté de Dieu de la part de ceux prenant conseil avec un prêtre et il dit que :
« Ces attitudes sont fondamentales pour éviter le grave risque de messages erronés, comme l’idée qu’un prêtre peut concéder rapidement des “exceptions”, ou qu’il existe des personnes qui peuvent obtenir des privilèges sacramentaux en échange de faveurs ».
Cette question de l'accès aux sacrements pour les divorcés remariés est repris au paragraphe 305 :
« À cause des conditionnements ou des facteurs atténuants, il est possible que, dans une situation objective de péché – qui n’est pas subjectivement imputable ou qui ne l’est pas pleinement – l’on puisse vivre dans la grâce de Dieu, qu’on puisse aimer, et qu’on puisse également grandir dans la vie de la grâce et dans la charité, en recevant à cet effet l’aide de l’Église ».
A la fin de cette phrase, note 351 Précise : «Dans certains cas, il peut s’agir aussi de l’aide des sacrements. Voilà pourquoi, « aux prêtres je rappelle que le confessionnal ne doit pas être une salle de torture mais un lieu de la miséricorde du Seigneur » Je souligne également que l’Eucharistie « n’est pas un prix destiné aux parfaits, mais un généreux remède et un aliment pour les faibles ».
Ces déclarations rappellent la substance de la proposition dite Kasper. La langage de l'Eucharistie comme n’étant « pas un prix » est quelque chose qu’à la fois Kasper et François ont utilisé dans des déclarations publiques sur ce sujet depuis que le processus Synode a commencé en 2014. Il n'y a pas de prescription spécifique que les divorcés « remariés » peut avoir accès aux Sacrements en cela, mais on voit l'ouverture d'une porte.
Le deuxième scandale majeur vient au paragraphe 301. Dans le contexte de la question de « discernement » pour les relations « irrégulières », François supprime l’affirmation que ceux qui ne vivent pas selon la loi de Dieu vivent en état de péché mortel ! Il dit :
« Par conséquent, il n’est plus possible de dire que tous ceux qui se trouvent dans une certaine situation dite “irrégulière” » [est-ce que ça inclut les relations homosexuelles ?] vivent dans une situation de péché mortel, privés de la grâce sanctifiante ». « Les limites n’ont pas à voir uniquement avec une éventuelle méconnaissance de la norme. Un sujet, même connaissant bien la norme, peut avoir une grande difficulté à saisir les « valeurs comprises dans la norme [?] » ou peut se trouver dans des conditions concrètes qui ne lui permettent pas d’agir différemment et de prendre d’autres décisions sans une nouvelle faute ».
Parmi d'autres facteurs atténuants à cet égard, le Pape mentionne « l'immaturité affective » et la « force de l'habitude acquise » et les « conditions d'anxiété », ainsi que d'autres « facteurs sociaux ou psychologiques » qui permettraient d'atténuer la culpabilité d'une personne.
Cette déclaration du Pape semble faire disparaître tout fondement moral sur la question du mariage et du divorce. Elle brise le fondement même de la loi morale et ouvre la porte à une approche laxiste et relativiste à la sainteté du mariage.
Pris dans son ensemble, nous voyons que le Pape prétend que les couples « remariés » qui ont des enfants devraient continuer à vivre comme « mari » et « femme » et ne devraient pas vivre « comme frère et sœur » et que toutes les relations « irrégulières » qui ne sont pas en conformité avec les lois de Dieu ne signifient pas nécessairement que les personnes vivant dans de telles situations sont dans un état de péché. De ce fait, le Pape ouvre aussi indirectement la porte à l'admission de toutes ces personnes aux Sacrements, et, en même temps, sape non seulement un, mais trois Sacrements : le Sacrement du mariage, le Sacrement de la Pénitence, et le Sacrement de la Sainte Eucharistie.
Il y a beaucoup plus dans ce document qui reste à déballer. Mais sur la base de ces points seulement, nous voyons le potentiel de danger grave pour les âmes des fidèles qui suivraient les conseils qui y sont inclus.
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